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Didier Guillaume, nouveau ministre de l’Agriculture

A l’exception du Modef, les syndicats agricoles ont salué l’arrivée de Didier Guillaume à la tête du ministère de l’Agriculture, ce 16 octobre. Il a l’originalité d’être issu d’un département leader de l’agriculture biologique, dont il est un promoteur.

Lors de la passation de pouvoirs avec Stéphane Travert (à droite) le 16 octobre, Didier Guillaume (à gauche) a qualifié 
la rue de Varenne de «ministère fabuleux et formidable». 
Lors de la passation de pouvoirs avec Stéphane Travert (à droite) le 16 octobre, Didier Guillaume (à gauche) a qualifié
la rue de Varenne de «ministère fabuleux et formidable». 
© Xavier Remongin/agriculture.gouv.fr



Didier Guillaume avait déjà failli être ministre de l’Agriculture. C’était en 2014. Son nom était le plus fréquemment cité lorsque le torchon brûlait entre le ministre de l’Agriculture de l’époque, Stéphane Le Foll, et le syndicalisme majoritaire, et que Matignon tomba dans les mains de Manuel Valls dont il était un proche - il fut plus tard son directeur de campagne lors des primaires de la gauche aux dernières élections présidentielles.
Alors rapporteur au Sénat du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, le Drômois s’était montré attentif aux suggestions du syndicalisme majoritaire qui, à cette époque, n’aurait pas vu sans satisfaction la nomination de ce membre du groupe d’études de l’économie agricole et alimentaire et ancien membre du Haut conseil des biotechnologies. Finalement, Stéphane Le Foll resta en poste jusqu’à la fin du quinquennat de François Hollande, et Didier Guillaume dut patienter… quatre ans.
On comprend mieux l’enthousiasme exprimé par celui-ci lors de la passation de pouvoirs avec Stéphane Travert le 16 octobre, allant jusqu’à qualifier la rue de Varenne de «ministère fabuleux et formidable». Le nouveau ministre de l’Agriculture en a profité pour faire sa première déclaration d’orientation générale : «L’agriculture française, c’est deux choses. C’est la compétitivité, le développement économique, l’export. Et en même temps, c’est le lien local, l’agroécologie, qui est tellement importante dans notre pays». Et de conclure : «Si nous réussissons, à la fin, à la fois cette agriculture compétitive, à la faire rayonner, exporter, et à la fois la transition écologique, travailler sur les territoires, je pense que nous serons plus en phase avec la population.» Il a prévenu enfin : «Il ne faut céder à aucun lobby.»

Le profil idéal
Après Stéphane Travert, souvent critiqué pour son manque de connaissance des dossiers - en particulier à son arrivée - Didier Guillaume avait le profil idéal : celui d’un spécialiste de l’agriculture. Un profil qui rassure en tous les cas presque l’ensemble des syndicats agricoles. Ancien de conseiller au cabinet de Jean Glavany lorsqu’il était ministre de l’Agriculture, il a pour réputation d’être un spécialiste de l’agriculture sur les bancs de la Chambre basse, où il siège depuis 2008. «Dans le cadre de son mandat, il s’était forgé une spécialité dans le domaine de l’agriculture», témoigne son ancien homologue socialiste au Sénat, Yannick Botrel, pour qui Didier Guillaume se situe dans la ligne de Stéphane Le Foll : «Lorsqu’ils examinaient le projet de loi d’avenir, il n’y a jamais eu de rupture entre eux. Il est très attaché à ce qu’il n’y ait pas d’opposition entre la compétitivité et les sujets environnementaux, et il était très attaché a ce qu’il n’y ait pas de rupture sociétale».
Dans son département de la Drôme, il discute avec l’ensemble des syndicats. Il est «très apprécié du monde agricole» et il est connu pour être un «gros bosseur», explique Régis Aubenas, responsable de la section fruit de la FDSEA de la Drôme. «Il bosse avec tout le monde, mais reconnaît le fait majoritaire.» Un constat que partagent les représentants départementaux de la Confédération paysanne et de la Coordination rurale. «Il est ouvert et franc, confirme Vincent Delmas, co-porte parole de la Conf’ dans le département. Et il connaît mieux ses dossiers que Stéphane Travert

Promoteur de l’agriculture bio
Avant de devenir sénateur puis président du groupe socialiste, Didier Guillaume a été pendant plus de dix ans président du Conseil général de la Drôme, département leader dans l’agriculture biologique, dont il est un promoteur de longue date. Il y a notamment porté l’initiative Agrilocal, pour l’approvisionnement de la restauration collective, qui rassemble aujourd’hui plusieurs dizaines de collectivités territoriales. Localement, il est reconnu par les différents syndicats pour avoir fortement soutenu au travers du conseil général l’arboriculture locale lorsqu’elle fut touchée par la sharka (maladie des arbres fruitiers).
Pour la FDSEA de la Drôme, il a également fortement œuvré au maintien du TODE au début du mandat de François Hollande. Il est également apprécié pour ses prises de positions sur les prédateurs. Dans son rapport pour le projet de loi d’avenir en 2014, il plaidait pour la révision de la directive européenne «Habitats» et de la Convention de Berne. «Le loup n’est plus une espèce en voie de disparition, déclarait-il à l’époque à Agra Presse. La population du loup augmente et il faut protéger les éleveurs. Entre le loup et l’éleveur, je choisis l’éleveur.»

Une vie politique chaotique
Ces derniers mois, Didier Guillaume avait traversé une période chaotique de sa vie politique. Après un départ annoncé de la vie politique en janvier 2018, il retourne à son mandat quelques mois plus tard, et en profite pour quitter le groupe socialiste au Sénat dont il avait auparavant la présidence, et rejoint le groupe RDSE, constitué majoritairement de radicaux de gauche. Face au gouvernement d’Edouard Philippe, il a adopté jusqu’ici une position plutôt «constructive», notamment lors de l’examen du projet de loi Egalim ; par exemple, il votera contre la motion de rejet en dernière lecture, à l’inverse du groupe socialiste. Un parcours récemment chamboulé, dans un paysage politique tout aussi chamboulé récemment, qui le conduit naturellement aux fonctions qu’il occupe désormais.

Les syndicats agricoles saluent l’arrivée de Didier Guillaume

La FNSEA, les Jeunes agriculteurs, la Coordination rurale et la Confédération paysanne ont accueilli favorablement l’arrivée de Didier Guillaume, au travers de communiqués de presse ou de déclarations. Le Modef fait exception ; dans un communiqué, il dit ne s’attendre à «aucun changement». De son côté, la FNSEA accueille un «élu rural et familier du monde agricole», dont elle souhaite qu’il inscrive son mandat «sous le signe de l’action et du pragmatisme». Pour les Jeunes agriculteurs, Didier Guillaume est «quelqu’un qui connaît bien le dossier agricole et un pragmatique sur les questions sociétales». Les syndicats le rappellent aux dossiers d’actualité : les ordonnances de réforme des relations commerciales, la négociation de la Pac, la prédation et le TODE. La CR s’inquiète de son côté de ses premières déclarations en faveur de l’exportation.



Rétablissement du TODE : FNSEA et JA saluent un «premier pas»

Questionné par Agra Presse à propos de sa position sur le TODE (exonération dédiée aux travailleurs occasionnels), à l’issue de la passation avec Stéphane Travert, Didier Guillaume avait répondu : «Je pense qu’il y aura des évolutions dans les jours qui viennent.» La Commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale a en effet réintégré le dispositif dans le PLFSS 2019 le 16 octobre, via un amendement. Pour la FNSEA et JA, il s’agit d’un «premier pas important mais pas encore suffisant». En effet, «les employeurs de saisonniers resteraient les seuls employeurs à ne pas bénéficier d’une compensation totale de la perte du CICE», expliquent les deux organisations qui demandent au gouvernement de remettre en place «le même niveau d’exonération qu’à l’heure actuelle», au cours de la séance publique.

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