Règles d’usage des phytosanitaires à proximité des lieux sensibles
Un arrêté départemental fixe les règles d’utilisation des produits phytosanitaires à proximité des lieux accueillant des personnes vulnérables.
Le sujet avait fait bondir à l’automne 2016 : par abrogation de l’arrêté ministériel de 2006 qui fixait les modalités d’usages des produits phytopharmaceutiques, le ministère de l’Ecologie et du Développement durable avait élaboré un projet qui définissait des distances minimales en deçà desquelles l’usage des produits phytosanitaires était interdit à proximité des habitations, bois, cours d’eau et zones enherbées. L’empressement du ministère avait doublement exaspéré la profession agricole qui s’était alors mobilisée pour deux raisons : la première, c’était la surface concernée par cette interdiction, qui n’avait pas été calculée ou ne serait-ce qu’imaginée par le ministère, et qui s’élevait globalement dans une fourchette allant de 10 à 15 % selon les exploitations françaises.
La seconde, moins connue, c’est que précisément, les homologations des produits phytosanitaires prévoient depuis un arrêté du 10 mars 2016, des phrases de risque sur ces lieux, à compléter par des mesures de protections locales. Suite à l’épisode de cet automne, conclu par l’engagement de l’Etat à revenir au texte de 2006, les discussions ont repris au niveau local pour fixer les règles d’usage de produits phytosanitaires à proximité de lieux accueillant des personnes vulnérables. Ces discussions ont abouti à un projet d’arrêté préfectoral qui a été soumis à la consultation du public avant d’être signé le 10 février dernier.
Une définition précise
Qu’entend-on par «lieux accueillant des personnes vulnérables» ? L’arrêté en définit une liste exhaustive : les cours de récréation et espaces habituellement fréquentés par les élèves dans l’enceinte des établissements scolaires, les espaces habituellement fréquentés par les enfants dans l’enceinte des crèches, des haltes garderies et des centres de loisirs ainsi que les aires de jeux destinées aux enfants dans les parcs, jardins et espaces verts ouverts au public ; les centres hospitaliers et hôpitaux, les établissements de santé privés, les maisons de santé, les maisons de réadaptation fonctionnelle, les établissements qui accueillent ou hébergent des personnes âgées et les établissements qui accueillent des personnes adultes handicapées ou des personnes atteintes de pathologie grave. Ces établissements sont au nombre de 258 dans le département.
La notion de proximité est fixée à une distance de moins de 5 mètres pour les cultures basses (grandes cultures, cultures légumières,…), et de moins de 50 mètres pour l’arboriculture.
Des dispositifs de protection
L'arrêté prévoit donc que l’application des produits phytopharmaceutiques à proximité de ces lieux en présence des personnes n’est possible qu’à condition soit de l’utilisation d’un moyen permettant de diminuer le risque de dérive inscrit au Bulletin Officiel du ministère chargé de l’agriculture, soit de la mise en place d’une haie antidérive efficace et continue entre la parcelle traitée et le lieu accueillant des personnes vulnérables, d’une hauteur supérieure à celle de la culture en place ou des équipements du pulvérisateur (cf. schéma). A défaut de ces mesures, l'application des produits phytopharmaceutiques à proximité des lieux accueillant des personnes vulnérables est toujours possible aux jours ou heures de fermeture de ces lieux.
Une réciprocité
Bon nombre de situations conflictuelles localement étant issues des nouvelles constructions qui s’effectuent en proximité immédiate des champs cultivés, la profession départementale a proposé et obtenu un principe «de réciprocité». En effet, l’arrêté le stipule expressément : en cas de nouvelle construction d'un établissement mentionné au présent article à proximité d'exploitations agricoles, le porteur de projet prend en compte la nécessité de mettre en place des mesures de protection physique. Lors de la session de la chambre d’agriculture du mardi 28 février, le Préfet de la Somme, Philippe De Mester, s’est dit satisfait de l’approche pragmatique mise en ½uvre, qui a abouti sans difficulté à un texte équilibré pour toutes les parties.
Des buses antidérive agréées
Les éléments antidérive agréés par le ministère de l’Agriculture font l’objet d’une liste officielle inscrite au Bulletin Officiel. Pour les cultures basses, il s’agit surtout d’une liste complète de buses antidérive. Elles sont homologuées à condition de réduire d’au moins 75 % le phénomène de dérive, tout en permettant de travailler à des pressions usuelles. On y trouve notamment les buses à injection d’air et les buses «basse pression». Selon les modèles, leur prix varie dans une fourchette de un à trois en comparaison à des buses classiques.