Des propositions régionales pour soutenir la compétitivité agricole
Marques régionales, mission pour l’approvisionnement local, zones franches rurales… En visite sur le Salon, les élus avancent des pistes pour sortir de la crise.
Visite présidentielle mouvementée, destruction du stand du ministère de l’Agriculture, saccage des emplacements tenus par les transformateurs, c’est avec fracas qu’a débuté le Salon international de l’agriculture (SIA) de Paris, le 27 février dernier. Pourtant, malgré une journée inaugurale agitée et un contexte agricole tendu, c’est dans «l’œil du cyclone» que s’est tenue cette 53e édition.
«La passion, l’envie d’expliquer le métier et de défendre les savoir-faire ont surpassé la crise cette semaine», a déclaré Michel Dubrulle, président de la Maison de l’élevage du Nord, lors du lancement de la journée dédiée au Nord-Pas-de-Calais-Picardie, le 1er mars Porte de Versailles. Pour la première fois, les deux anciennes régions ont baptisé un stand commun de 550 m2 regroupant l’ensemble des filières régionales.
Consommer local et créer une marque régionale
Visiteurs, élus, responsables politiques et agricoles ont été nombreux à se rendre sur l’emplacement du Nord-Pas-de-Calais-Picardie. C’est par une sommation à «consommer local» que Xavier Bertrand, président du Conseil régional du Nord-Pas-de-Calais-Picardie, a engagé sa visite : «Soyez prêts à payer un peu plus le lait et toutes sortes de produits, si vous avez l’assurance que cela va dans la poche du producteur.» «C’est une des clés pour maintenir la valeur ajoutée sur nos exploitations», renchérit Marie-Sophie Lesne, vice-présidente en charge de l’agriculture au Conseil régional.
Et l’occasion pour Christophe Buisset de confirmer le projet de création d’une marque régionale. «Saveurs en’Or et Terroirs de Picardie sont devenues des fleurons de la grande région, explique-t-il. Nous travaillons actuellement au rassemblement des deux labels. Les premiers cheminements auront lieu dès le mois d’avril.» Pour le président de la Chambre d’agriculture de région, la démarche ne s’arrête pas là. «Pourquoi ne pas lancer une marque régionale «Lait du Nord-Pas-de-Calais-Picardie, comme il existe du «lait de montagne» ?, poursuit Christophe Buisset. Nous pourrions faire de même pour la viande, il faut se mettre autour d’une table et discuter de la relance de la consommation locale.»
Circuits-courts, diversification…
Conseil régional et Département du Nord unissent leurs moyens pour instaurer une politique d’approvisionnement local dans la restauration hors foyers. «Il s’agit d’une véritable politique agricole dont les premiers destinataires sont les agriculteurs», précise Patrick Valois, vice-président à la ruralité au Conseil départemental. Une équipe opérationnelle vient d’être mise en place avec pour mission d’aller à la rencontre des gestionnaires de cantines, notamment dans les collèges et lycées. Et Edith Macke, présidente de l’Union Rouge Flamande, de signaler «de ne pas omettre les animaux de races régionales» dans la démarche. «Encore une fois, même si le coût des produits est plus élevé, l’important est que les filières locales demeurent», complète Xavier Bertrand, songeant aussi à la possibilité de créer des partenariats avec les associations départementales des maires. La diversification apparaît donc comme un levier économique des exploitations agricoles.
«Nous envisageons par ailleurs de développer un label spécifique pour l’accueil familial à la ferme de personnes âgées ou handicapées, indique Patrick Valois. Un travail qui présente une autre source de rémunération.» Ce dernier a été interpellé par Yves Spriet, président du syndicat d’élevage Trait du Nord. «La filière équine souffre aussi de l’absence de revenus, affirme l’éleveur. Il est nécessaire de développer de nouveaux débouchés, comme le ramassage des déchets par les chevaux.»
«Légiférer la vente à perte»
Si les représentants du Nord-Pas-de-Calais-Picardie affichent leurs propositions et leurs ambitions pour le territoire, le véritable sursaut interviendra au niveau français et européen. «Je suis conscient que le plan régional de soutien à l’élevage ne suffira pas si une politique nationale n’est pas instaurée, lance Xavier Bertrand. De son côté, la Commission européenne doit se réveiller et apporter des solutions qui permettent de contrebalancer la situation.»
Parallèlement au travail d’audits stratégiques d’exploitation mené par la Région, Christophe Buisset a assuré que les ingénieurs des Chambres d’agriculture accompagneraient les exploitations «au cas par cas, sans faire de différence entre elles». «Il faut être capable de diminuer les coûts de production et de raisonner les investissements, tout en étant professionnel et compétitif», complète-t-il. Sur la question épineuse des prix, le responsable a exprimé le souhait de «légiférer pour éviter la vente à perte». «Le problème français n’est pas la qualité, mais la compétitivité, répète Xavier Bertrand. Nous avons clairement un objectif : ne jamais associer agriculture et paysans au passé.»