Le cidre de la Somme surmonte-t-il la crise ?
Le Covid-19 n’épargne pas la filière cidricole qui demande un «plan de soutien fort». L’impact pour les producteurs de la Somme dépend surtout de leur mode de commercialisation.
Le cidre est dégusté en famille, entre amis et, surtout, au restaurant ou au café. Le confinement ne fait donc pas l’affaire de la boisson festive, issue de la délicate fermentation du jus de pomme. «La crise est immédiate sur les ventes de boissons cidricoles et une deuxième vague de difficultés majeures est probable pour cet automne. La prochaine récolte risque de connaître des surplus importants que les transformateurs, en cidre comme en spiritueux, ne pourront absorber dans un marché déjà excédentaire», s’alarme l’Unicid (Union nationale interprofessionnelle cidricole) dans un récent communiqué. Aussi, la filière cidricole «demande d’urgence un plan de soutien fort» (cf. encadré).
À la Ferme des cloîtres, à Bayonvillers, l’effet du confinement se fait bien sentir. «Nous observons une diminutions des ventes depuis plusieurs années, notamment due à la concurrence des grandes surfaces, assure Amélie Dumontier, co-gérante. Nous avons d’ailleurs produits 1 000 bouteilles cette année, au lieu de 1 500 d’ordinaire, car nous avions encore du stock. Mais la crise, et surtout la fermeture des marchés, rend la situation encore plus difficile.» Il faut dire que la production de la Ferme des cloîtres est surtout vendue au marché et dans les salons, presque tous annulés. «Nous avons un magasin de produits locaux à la ferme, ouvert sur rendez-vous, mais c’est calme.»
Pour Éric Caron, qui gère la cidrerie du Pays des Coudriers avec ses fils, à Saint-Gratien, la diversité des modes de commercialisation a sauvé la mise. «Quelques circuits de vente ont été stoppés, comme la vente aux crêperies, par exemple. Mais l’engouement des consommateurs pour les produits locaux a fait que d’autres sont montés en flèche.» Les drive fermiers, la Ruche qui dit oui, et Quel bon goût, ont un succès exponentiel. «Les ventes s’équilibrent donc», estime Éric Caron.
Reste que lui aussi constate un essoufflement de la popularité du cidre. «Cette boisson est surtout liée à des temps forts, comme l’épiphanie et mardi gras. On a tout de même une petite clientèle avertie, qui en consomme régulièrement. Il y a les clients à cidre, et tous les autres, qui sont séduits par les jus de pomme, pomme-cassis, pomme-poire, pétillants…» Pour perdurer son activité, le cidrier mise sur deux qualités : «des bons produits, avec un prix abordable. C’est ce qui fait notre force.»
Une orientation que toute la profession veut prendre. «Depuis plusieurs mois, la filière est entrée dans une nouvelle dynamique, portée par la montée en gamme, la diversification et la modernisation des produits, estime Marc Roubaud, Président de l’Unicid. Et aussi par la progression des modes de production les plus respectueux de l’environnement, notamment la bio, en forte croissance. Cet élan ne doit pas s’arrêter, tout doit être fait pour que la filière retrouve au plus vite sa dynamique.»
Des mesures de soutien
La filière cidricole a interpellé le gouvernement pour que «des mesures soient prises rapidement et massivement». Parmi ces mesures, des dispositifs spécifiques de soutien à la filière sont demandés :
• Dégagement du marché par le retrait de cidres (à travers la distillation industrielle, notamment) et de pommes à cidre. Les volumes à retirer du marché sont aujourd’hui estimés à 200 000 hectolitres de cidre et 100 000 tonnes de pommes.
• Pour les Organisations de producteurs, réinscription du cidre sur la liste des produits à base de fruits et légumes transformés dans l’OCM Fruits et Légumes, dont il a été indument écarté depuis quelques années alors qu’il représente la majorité des volumes et de la valorisation des pommes à cidre.
• Mesures d’appui financier à la communication de crise telles que prévues notamment dans le cadre de FranceAgriMer.
D’autres mesures visant à faire redémarrer le marché, notamment de la consommation hors domicile, actuellement à l’arrêt, et à renforcer les soutiens aux entreprises, par des allègements de charges, des dispositions fiscales, sociales, bancaires, commerciales et liées à la gestion des investissements, sont également demandées, de concert avec les autres boissons.