Agroécologie : le conseil doit s’adapter
Près d’une centaine de conseillers agricoles des Hauts-de-France participaient fin de semaine dernière à un webinaire sur l’impact de la transition agroécologique sur les métiers d’agriculteur et de conseiller.
Près d’une centaine de conseillers agricoles des Hauts-de-France participaient fin de semaine dernière à un webinaire sur l’impact de la transition agroécologique sur les métiers d’agriculteur et de conseiller.
S’engager dans la transition agroécologique n’a pas qu’un impact sur le fonctionnement d’une exploitation et le métier d’agriculteur tel qu’on l’apprend dans les écoles. Pour ceux dont le quotidien est d’accompagner les agriculteurs, le virage agroécologique s’accompagne aussi d’un certain nombre de bouleversements. Que ces derniers se rassurent, la transition écologique n’est ni le premier ni le dernier changement qui leur fait face, et c’est pour cela que le réseau SCA (Système de conseil agricole) dans les Hauts-de-France intervient. Président de la commission environnement de la Chambre d’agriculture régionale, Bruno Haas l’assure : «Pour accompagner la transition, le conseil doit être structuré. Beaucoup de choses sont en train de se mettre en place même si en matière d’agroécologie, il n’y a pas de réponses toutes faites».
Du côté de la Coopération agricole Hauts-de-France, où l’on revendique «une capacité à démultiplier des techniques auprès des agriculteurs» dixit son président Marc Braidy, on sent la même volonté d’aller de l’avant, même si celle-ci est pressée : «Le temps des penseurs est passé. Le législateur a fait son œuvre et c’est désormais à nous, les acteurs de terrain, d’entrer en action.» Chez Agro Transfert, «quasiment tous les sujets sur lesquels on travaille parle d’agroécologie», a détaillé pour sa part Claire Ramette ; évoquant des projets qui s’adressent soit directement aux agriculteurs, soit aux conseillers ou parfois même aux deux.
Des métiers en mutation
Après avoir abordé les contours de l’agroécologie – le concept est finalement assez vaste et rassemble un certain nombre de réalités et de pratiques parfois seulement remises au goût du jour -, les échanges se sont poursuivis sur le rôle proprement dit du conseiller. Pour cela, deux «anciens» - ils ont tous deux commencé leur carrière en 1987 -, ont livré leurs expériences. Conseiller au sein de la coopérative Noriap, Francis Beauvisage est formel : «L’évolution du conseil est réelle (…) On a un rôle technique, mais aussi social parce qu’on doit veiller à la pérennité des agriculteurs que l’on suit, avec des techniques qui évoluent et qui continueront encore d’évoluer.» Conseiller à la Chambre d’agriculture de l’Oise, François Dumoulin rappelle ainsi que «l’agriculture se donne des objectifs et au conseiller de lui donner des outils pour l’aider dans son choix». «Il est assez rare qu’un agriculteur demande qu’on l’aide à se poser des questions, mais il faut le faire pour qu’il s’approprie les réponses.»
Les clés d’une transition réussie
Toujours forts de leurs expériences, les deux hommes reviennent ensuite sur les conditions requises pour un changement de pratiques réussi. «Il faut se mettre d’accord avec l’agriculteur sur ses objectifs, témoigne ainsi François Dumoulin. On ne peut pas se contenter de dire ce qu’il y a à faire.» Pour lui, expérience, partage et échange sont sans conteste «plus efficaces que le meilleur des conseillers». Pas surprenant donc que ce dernier insiste sur la notion de collectif. Pour Francis Beauvisage, la réussite d’une relation entre un agriculteur et un conseiller repose sur la confiance : «Compte tenu que l’on peut essuyer des plâtres, il faut s’entendre et se faire confiance. Cela passe notamment par beaucoup d’échanges d’informations.»
Pas de retour en arrière
Quels que soient les changements qui sont déjà engagés ou ceux à venir, il n’est de toutes façons «plus possible de revenir en arrière», souligne François Dumoulin : «L’agroécologie va devenir une évidence. Dans le conseil, il y a une question de savoir-être et de connaissances. Il faut être transparent avec l’agriculture et ne pas hésiter à dire que l’on ne sait pas tout.» De toutes manières, poursuit-il, «tout n’est pas calé avec l’agroécologie. Il faut savoir faire la différence entre une référence, une probabilité et un avis qu’on peut avoir (…) Il faut parfois savoir scier la branche sur laquelle on est assis pour en saisir une plus prometteuse». Lui-même assure «croire aujourd’hui en des choses auxquelles il ne croyait pas il y a quinze ans». François Dumoulin estime enfin à «5 ans» le temps nécessaire à la remise en cause des pratiques et le temps de la transition. Moins de temps qu’il ne faudra pour former un grand nombre de conseillers dans la région pour y accompagner ses agriculteurs.