Syndicalisme
Au devant des députés pour "entreprendre en agriculture"
Pour «renforcer la souveraineté alimentaire de la France et améliorer la compétitivité du secteur agricole», la FNSEA et les JA ont planché sur une proposition de loi nommée «Entreprendre en agriculture». Ce 27 septembre, des élus des syndicats départementaux rencontraient les députés de la Somme pour présenter ces propositions.
Pour «renforcer la souveraineté alimentaire de la France et améliorer la compétitivité du secteur agricole», la FNSEA et les JA ont planché sur une proposition de loi nommée «Entreprendre en agriculture». Ce 27 septembre, des élus des syndicats départementaux rencontraient les députés de la Somme pour présenter ces propositions.
Une baisse de production et, parallèlement, une hausse de l’importation, qui représente plus de 50 % de l’alimentation des Français. Pour les élus de la FDSEA et des JA de la Somme, comme pour ceux du national, l’agriculture est sérieusement en danger. «Il est urgent de redonner un cap clair à l’agriculture française», plaident-ils. Pour compléter le Pacte et loi d'orientation et d'avenir agricoles (PLOA), dont le travail a été stoppé par le remaniement, la FNSEA et les JA proposent un nouveau projet de loi intitulé «Entreprendre en agriculture». Ce 27 septembre, des élus de la FDSEA et des JA de la Somme rencontraient quatre députés du département* pour leur présenter le texte.
Celui-ci s’articule autour de six thématiques majeures : réaffirmer et conforter la souveraineté alimentaire, accompagner les transitions et pouvoir produire, garantir le revenu des agriculteurs et renforcer la compétitivité, proposer un métier attractif et répondre à l’envie d’entreprendre, orienter la transmission et oser l’installation des jeunes, et simplifier le quotidien des agriculteurs et alléger leurs contraintes. «Les agriculteurs souhaitent retrouver du bon sens dans les textes législatifs», résume Denis Bully, président de la FDSEA. «Le PLOA avait pour but de faciliter l’installation des jeunes. Avec ce nouveau projet de loi, nous allons plus loin en proposant des mesures nécessaires pour pérenniser les installations», ajoute Quentin Thibaut, secrétaire général des JA de la Somme. Lui insiste sur l’urgence : «On a perdu cent-mille agriculteurs ces dix dernières années. Un des enjeux est d’enrayer le vieillissement. Il faut agir vite, car dans cinq ans, il sera trop tard.»
Les représentants syndicaux ont mis l’accent sur certains points de la proposition de loi. À propos de la compétitivité des produits, Denis Bully plaide pour le besoin «d’uniformisation de la réglementation au sein de l’Europe». «Ces dernières années, la volonté politique a été la montée en gamme de nos productions, pour une meilleure rémunération des agriculteurs. Or, on constate que ça ne fonctionne pas, car on continue d’importer des produits à bas coût, moins qualiteux mais plus accessibles aux consommateurs. On doit continuer à maîtriser nos coûts de production pour rester compétitif.» Les échanges de produits avec les autres pays restent néanmoins une nécessité. Quentin Thibaut, éleveur porcin d’Ailly-sur-Somme, en témoigne. «Dans notre filière, on importe énormément de jambon, mais on exporte nos bas morceaux, comme les pieds de cochons.
Ces échanges permettent l’équilibre.»
Une solution environnementale
Le sujet de l’environnement était aussi sur la table. «L’agriculture est le tiroir idéologique qui absorbe tous les maux de la terre, alors qu’elle est la seule alternative viable et durable pour répondre aux enjeux environnementaux», assure Quentin Thibaut. Bertrand Roucou, élu de la FDSEA et éleveur de volailles à Cavillon, prend l’élevage pour exemple. «On fait face à un mouvement contre l’élevage. Mais c’est une des solutions pour préserver les productions variées, et les prairies puits de carbone. En le délaissant, on risque de se cantonner à une plaine de pommes de terre et céréales.» À propos du carbone, Romain Dubois, élu de la FDSEA installé à Hornoy-le-Bourg, mettait aussi en évidence la «nécessité de créer une filière carbone agri», évoquée dans la proposition de loi. «Nous ne sommes pas encore parvenus à valoriser ce carbone que nous stockons grâce à la photosynthèse des plantes.» Ces propositions sont désormais entre les mains des parlementaires.
* Les représentants syndicaux rencontraient François Ruffin (Picardie Debout), Matthias Renault (RN), Yaël Ménaché (RN) et Jean-Philippe Tanguy (RN). Zahia Hamdane, députée LFI de la deuxième circonscription de la Somme, sera rencontrée le 11 octobre.
ILS ONT DIT
François Ruffin
Député du groupe Écologiste et Social, 1ère circonscription.
«J’ai pour objectif de transformer l’agriculture française»
J’ai pour objectif de transformer l’agriculture française. Pour ça, les agriculteurs ont besoin d’accompagnement et non de coups de bâtons. Ils ont été les premiers à sonner l’alerte de l’escalade de la réglementation. Ça vaut pour tous les secteurs. La question est «comment passer de toujours plus de réglementation à de la régulation ?». Je pointe néanmoins des ambiguïtés et des manques dans cette proposition de loi. J’aurais aimé que la priorité soit mise sur la souveraineté alimentaire du pays, avant l’Europe et le monde. L’accent n’est pas assez mis non plus sur le foncier et la défense du statut du fermage. Le risque est que, demain, les terres appartiennent à des sociétés financières. Enfin, la «compétitivité» ne doit pas être un objectif final, sous peine de tirer vers le bas. On doit s’adapter. Mais on ne peut pas vouloir être compétitif face aux fermes usines du Brésil, en se rapprochant de leur modèle, donc en régressant sur les normes fiscales, sociales et environnementales. Le but, c’est de transmettre une terre en bon état à la future génération, qui leur permettra d’en vivre décemment, et de nourrir la population.
Jean-Philippe Tanguy
Député du groupe Rassemblement National, 4e circonscription
«Cette proposition de loi, c’est du concret»
Maintenir les filières agricoles est nécessaire. Parce que quand une filière disparaît, c’est comme une usine, bonjour pour la remettre sur pied. Pour cela, je trouve que cette proposition de loi, c’est du concret. L’agriculture a besoin d’aller plus loin. Je vais par exemple demander un rapport sur les OGM. Où sont tous les morts qu’on nous avait annoncés ? Où sont les rapports qui ont scientifiquement justifié l’interdiction des OGM ? C’est pourtant une avancée majeure. Vous évoquez l’uniformisation européenne. On avait justement voté l’interdiction des surtranspositions des directives. Je ne sais pas où c’est passé. Quant aux crédits carbone, j’y suis opposé. Je suis pour une taxe carbone à la frontière des pays européens. Mais, si ça doit exister, autant que ça profite aux agriculteurs. A. P.
Yaël Ménaché
Député du groupe Rassemblement National, 5e circonscription.
«On fait face à une concurrence déloyale»
Je me suis emparée de nombreux sujets comme les endives, la hausse de l’énergie et les néonicotinoïdes. J’ai également rencontré beaucoup d’acteurs industriels qui fonctionnent autour de l’agriculture comme Tereos et Mousline. Sur la question de l’importation, j’ai comme l’impression que l’on exporte de très bons produits alors que l’on importe des produits de moins bonne qualité sur le territoire. On fait face à une concurrence déloyale, on dépend trop de l’Europe. Sans les agriculteurs, il n’y a rien dans nos frigos. C’est un vrai métier, un vrai savoir-faire qu’il faut valoriser. Sur la plupart des points avancés, notre mouvement va dans votre sens, ce sont des principes que l’on défend. C’est une période compliquée, qu’il faut prendre en considération. Mais nous allons continuer de travailler. B. R.
Matthias Renault
Député du groupe Rassemblement National, 3e circonscription
«Il y a des propositions intéressantes dans le texte»
Lorsque j’ai pris mon poste, j’ai demandé une liste des surrèglementations qui pesaient sur le monde agricole. Et j’ai été surpris de voir que cela n’existait pas. Sur le principe des surrèglementations, nous sommes d’accord qu’il ne faut pas d’interdiction sans solution alternative. Concernant les produits alimentaires, nous voulons également une traçabilité totale des produits. Il y a des propositions intéressantes dans le texte pour renforcer le contrôle d’une part, et ensuite créer une sorte d’Egalim européen. On sait que c’est une façon d’échapper à cette loi, c’est-à-dire de créer des transferts entre pays européens pour casser les prix de rachats aux agriculteurs. Nous avons une immense sympathie envers la profession, mais nous avons quelques inquiétudes tout de même sur de futures mobilisations. B. R.