Créer des logements étudiants à la ferme
Créer un logement étudiant à la ferme avec Campus Vert :
ça marche comment ? Et quel intérêt pour les agriculteurs ?
Que peut-il y avoir de commun entre un agriculteur et un étudiant ? Rien, de prime abord. D’un côté, un homme et son exploitation, généralement en campagne. De l’autre, un jeune homme ou une jeune femme à l’université ou dans une école, plutôt en ville. Le point commun entre ces deux-là ? Ce sont des agriculteurs de Béthune, dans les années 1990, qui l’ont trouvé.
Sur leurs exploitations, des bâtiments non utilisés étaient en train de se détériorer au fil du temps. Pour continuer à les entretenir, les trois agriculteurs décident de les aménager en studios de location pour étudiants. L’idée, depuis, a fait son chemin. Une association est née, Campus Vert, pour mettre en musique la création de logements étudiants à la ferme autour des villes universitaires, et à laquelle participent aujourd’hui 122 agriculteurs. Plus de cinq cents logements étudiants à la ferme ont été construits depuis 1995 dans les Hauts-de-France, et une centaine sont en cours de réalisation dans tous les territoires où l’association est présente.
Les studios proposés sont tous meublés et équipés de vaisselle. Deux modèles de studios existent. Le premier est le T1, soit un studio individuel entièrement équipé (plus de 21 m2), avec une pièce principale comprenant kitchenette, coin, bureau et coin lit. Le second est un T2, T2 bis ou un duplex, soit un studio individuel entièrement équipé (plus de 25 m2), avec une chambre séparée de la pièce principale.
Des locations pas comme les autres
Mais avec plus de 3 000 demandes en 2017 dans tous les territoires de l’association (essentiellement présente dans les Hauts-de-France, en Ile-de-France et en Bretagne), dont 2 574 pour les Hauts-de-France, le nombre de logements étudiants à la ferme est loin de répondre à toutes les attentes. «A Amiens, nous avons plus de cent demandes alors que nous n’avons aucun logement à proposer, et que nous n’avons fait aucune publicité dans les établissements d’enseignement supérieur», précise Odile Colin, directrice de Campus Vert. A Beauvais, l’association a enregistré, en 2017, sept demandes pour une offre, et neuf demandes pour une offre à Lille, pour ne citer que quelques exemples.
Ces locations s’adressent en priorité aux étudiants, aux jeunes en formation, aux stagiaires des entreprises et aux jeunes qui démarrent dans la vie professionnelle. «Ces derniers, soit des jeunes qui viennent de trouver un premier emploi et sont en période d’essai, ou bien des jeunes qui ont décroché un CDD très court, ne sont pas cependant notre priorité», précise Odile Colin.
Quoi qu’il en soit, le concept séduit de plus en plus. Et pour cause. La location ne se résume pas seulement à un contrat entre un propriétaire et un locataire. Au-delà d’un logement de qualité à prix modéré dans un corps de ferme, et où loge aussi l’agriculteur, la location comprend aussi un accueil particulier du nouveau venu et des échanges entre le propriétaire et ce dernier. L’agriculteur est tenu, suivant le type de son exploitation, de proposer des services ou des activités de loisirs, qui peuvent aller du panier paysan lors de l’arrivée du locataire, au prêt d’un atelier de vélos, de mise à disposition d’un jardin, etc. De quoi rassurer les parents qui voient leur progéniture quitter le nid familial pour vivre loin d’eux.
Un concept gagnant-gagnant
Pour l’agriculteur, c’est l’assurance d’une bonne valorisation de son patrimoine, d’un complément de revenus sans trop augmenter son temps de travail, et des liens intergénérationnels sur son exploitation. Mais pour pouvoir entrer dans le dispositif, celui-ci doit répondre à un cahier des charges précis, dont les trois critères principaux sont : être agriculteur, habiter dans le corps de ferme, et proposer des logements se situant à vingt minutes maximum du lieu d’études des jeunes.
Par ailleurs, grâce au dispositif de Campus Vert, qui propose notamment une plate-forme de réservation en ligne et la gestion administrative des contrats, l’agriculteur n’a pas à s’occuper de chercher des locataires et est assuré, de ce fait, d’un bon taux d’occupation. En 2017, le taux d’occupation a atteint 96 %, soit onze mois et demi de location sur douze mois. De même, l’association l’accompagne pendant les travaux d’aménagement et tout au long de la location de ses biens. «Comme nous sommes en réseau, le propriétaire n’est jamais seul et, en cas de problème, nous jouons, s’il le faut, un rôle de médiation. Une fois cela dit, nous avons géré peu de soucis depuis notre création», commente Odile Colin. Un concept bel et bien gagnant-gagnant.