Sécheresse : la FRSEA conteste le projet de nouvel arrêté
Agriculteurs et représentants de la FRSEA Hauts-de-France
se sont mobilisés le 29 juin devant le siège de l’agence
de l’eau Artois-Picardie à Douai (59) pour s’opposer au projet d’harmonisation du déclenchement des seuils sécheresse souhaité par la Dreal. Explications...
Alors qu’avec les conditions météorologiques particulièrement sèches du mois de juin certains agriculteurs ont sorti leurs matériels d’irrigation des cultures, la sécheresse fait à nouveau parler d’elle dans la région. Pour l’heure, pas d’épuisement des nappes phréatiques ou des cours d’eau cette année, mais une nouvelle réglementation en discussion qui pourrait devenir une source de contrainte pour les agriculteurs estime la profession.
Une harmonisation de déclenchement des seuils ?
La Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal) Hauts-de-France souhaite revoir l’arrêté cadre relatif à la mise en place de principes de surveillance et de gestion des usages de l’eau en cas de sécheresse ou de pénurie sur le bassin Artois-Picardie.
Pour résumer, cet arrêté permet de définir les seuils (vigilance, alerte, alerte renforcée et crise) de déclenchement des différentes mesures de limitation. Il tient donc un rôle de première importance pour l’ensemble des professionnels agricoles. «La Dreal propose d’harmoniser, au niveau des Hauts-de-France, le déclenchement des alertes sécheresse, ce qui impliquerait que les restrictions ne soient plus spécifiques aux lieux mais à l’ensemble de la grande région, explique Françoise Crété, présidente de la FDSEA de la Somme. Or, les niveaux ou les techniques de pompage d’eau sont propres à chaque territoire. Il est essentiel d’évaluer l’impact de la sécheresse à l’échelle locale avant d’enclencher des restrictions communes.»
Le syndicat régional majoritaire craint donc un durcissement de la réglementation en place, à savoir une augmentation des fréquences de passage des seuils sécheresse ainsi que des restrictions d’eau supplémentaires. «Nous évaluons qu’environ 20 % du volume initial sur une campagne pourraient être perdus, d’après les simulations réalisées à partir des années antérieures», s’inquiète Françoise Crété.
Un mois pour trouver un accord
Les raisons de la mobilisation douaisienne résident également dans le manque de cohésion entre les acteurs du dossier. «L’arrêté a été écrit sans concertation, ni avec la profession, ni avec la commission eau et agriculture du comité de bassin», souligne Nicolas Georget, directeur de la FDSEA du Pas-de-Calais.
Un comité, réuni en session, qui devait pourtant statuer sur ce projet d’arrêté vendredi dernier, à la demande de la Dreal. «Suite à la manifestation des agriculteurs, nous avons pris la décision de ne pas rendre d’avis sur cette délibération, indique Bruno Roussel, membre de la commission agriculture et de la FDSEA du Pas-de-Calais. C’est une belle avancée car il est rare que le comité de bassin annule un vote. Il nous est désormais offert jusqu’au 31 juillet pour entamer une discussion, avec la Dreal et toutes les catégories socioprofessionnelles concernées par l’arrêté, et trouver un terrain d’entente.»
Alerte activée en Belgique
Le code d’alerte jaune pour sécheresse a été activé le 28 juin en Flandre orientale et occidentale (le long de la frontière avec le département du Nord) ainsi qu’en Brabant flamand. Chez nos voisins belges, cette alerte, définie en consultation avec l’Agence flamande de l’environnement, invite les habitants à ne pas gaspiller d’eau (lavage de voiture, nettoyage…). Pas d’interdictions en place donc pour le moment.
REACTION Françoise Crété, présidente de la FDSEA de la Somme
«Un étau à deux vis !»
Une partie du développement passé et futur de l’économie agricole de notre département repose sur l’irrigation. L’attractivité de notre territoire a toujours été renforcée par la capacité qu’apporte l’irrigation à avoir des volumes de productions sécurisés, tant bien sûr pour les cultures industrielles que fourragères par endroit. La ressource en eau se doit d’être gérée en parfaite responsabilité, tant pour préserver la ressource pour les usages des concitoyens que pour permettre un cadre de travail lisible pour les productions irriguées. Cadrer la gestion de l’eau, cela se fait par arrêté préfectoral. Il faut d’un côté définir les seuils de surveillance du territoire, et ce en observant l’état de la ressource (nappes et rivières) et de l’autre définir les mesures qui s’appliquent à chaque basculement. Et du coup, on s’aperçoit qu’on est dans un étau à deux vis : d’un côté, la Dreal de bassin veut harmoniser les critères de seuils de basculement, et en l’appliquant en l’état, ça aurait été un déclenchement plus rapide des seuils pour la Somme. Et de l’autre côté, les mesures de restrictions relèvent d’un autre arrêté départemental, qui, appliqué à ces nouveaux seuils générerait d’autant plus vite des restrictions de volumes. Notre démarche n’est pas de s’arc-bouter sans comprendre, mais bien de considérer que, pour l’irrigation, on a deux limites réglementaires, et qu’on ne peut pas toucher l’une sans se soucier de la seconde. Le travail doit donc être conduit pour trouver le bon niveau de paramétrage pour éviter une restriction aveugle et injustifiée sur les volumes. C’est vital pour les productions, pour les producteurs, pour les filières et le territoire.