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Activ Paille cultive la maison de demain

Activ Paille, l’entreprise de fabrication de caissons préfabriqués en ossature bois et isolée en paille pour tout type de bâtiments est en activité à Itancourt. Les premiers caissons sont sortis en avril 2021 et la demande continue de croître. Reportage.

Installé sur une exploitation de grandes cultures à Remaucourt avec son père, Adrien Cardon cherche à se diversifier. «Nous avions des chevaux en pension et nous faisions des ballots de foin et de paille pour les nourrir. Quand on en avait trop, on vendait le reste.» Et de fil en aiguille, le commerce de petits ballots commence à prendre forme et à se développer. En 2017, Adrien Cardon créait alors la SARL Le Petit Ballot pour produire du fourrage paille et foin à destination des particuliers et des collectivités. 

Quelques années auparavant, lorsqu’il suivait ses études, Adrien avait sympathisé avec Arnaud Delobel, fils d’agriculteurs du Nord qui, lui, est devenu commercial pour une société canadienne. En 2017, ils se retrouvent, réfléchissent et décident d’amplifier la vente des petits ballots. D’autant que l’on commence sérieusement à entendre parler de construction en paille. Ils s’y intéressent de près, et s’engage sur la voix du biosourcé. Face à une demande croissante, les deux compères créent en 2020, Activ Paille pour développer et commercialiser un procédé de fabrication industrielle d’éléments préfabriqués ossatures en bois et paille. «L’Oréal, à Caudry, avait lancé un gros projet de construction paille et nous leur avons fourni la paille en 2019, à cette occasion, nous avons rencontré Activ Home qui a développé le process industriel de préfabrication. Nous pouvons produire un mur préfabriqué en bois et en paille qui s’adapte aux demandes qu’elles soient individuelles, collectives ou industrielles. Ce process de fabrication démocratise la construction paille. Elle fait entrer directement le concept en concurrence avec le béton et séduit les professionnels», explique Adrien qui entend développer la construction paille dans les Hauts-de-France avec une filière locale et durable. Son but, «c’est travailler au niveau local, que les producteurs axonais puissent profiter de la dynamique, et dégager de la valeur ajoutée sur le territoire».  

Des normes spécifiques et strictes

Fabriquer des caissons d’isolation à partir de ballots de paille pour la construction ne s’improvise pas. Des normes très spécifiques et strictes sont à respecter. Les dimensions sont pour la hauteur 36 cm, 47 cm pour la profondeur et 90-110 cm pour la longueur. Les ballots doivent peser environ 20 kg, et présenter une certaine densité pour obtenir une performance thermique de 7,7 m2 KW pour 36 cm d’épaisseur. Cela leur confère naturellement une résistance au feu. La teneur en eau sur poids sec de la paille doit être inférieure à 20 %. Activ Paille se veut être l’élément fédérateur de la filière et faire le lien avec la fourniture de pailles par les agriculteurs. «Notre but, c’est de sécuriser nos approvisionnements sur l’année en mettant en face, des contrats annuels renouvelables avec les agriculteurs, une dizaine aujourd’hui», expliquent les deux jeunes entrepreneurs. «Réaliser 20 000 m2 de caissons, nécessitent 40 000 bottes que l’on comprime à 120 kg/m3, soit près de 300 ha de paille. Nous répondons à nos commandes. Nous montons doucement et c’est sûr, demain, il nous faudra plus», détaille Adrien, précisant toutefois que certains critères devront être respectés par les agriculteurs comme ramasser les ballots aussitôt la moisson, pouvoir stocker à la ferme pendant un an, faucher avec une barre de coupe de moins de 7,5 m, etc. C’est pourquoi c’est une entreprise de travaux agricoles qui récolte et conditionne la paille en petites bottes chez les agriculteurs livrant à Activ Paille. «Nous n’avons pas le droit à l’erreur, la qualité des ballots est essentielle.»

S’aligner sur les prix du béton

En France, la construction avec isolation paille est en pleine expansion. Et pourtant, la plus vieille maison utilisant ce matériau date de plus de 100 ans. «À l’époque, les charpentiers mettaient la paille à la main», explique Adrien. Le béton a ensuite changé la donne. Mais aujourd’hui, c’est la construction avec des matériaux renouvelables qui reprend le dessus. Aussi, pour bien connaître le métier du bâtiment, les deux garçons ont rencontré des charpentiers, des menuisiers… et suivi une formation Pro-Paille et pratiqué la fabrication chez Activ’Home, dans l’Allier, le premier distributeur des modules constructifs à ossature bois et isolant biosourcé. «Cette société a mis au point un procédé, ECOSTRAUV® qui injecte les bottes de paille directement dans les caissons bois. Nous suivons la même technique qui permet de fabriquer 30 m2/h.
Eux gèrent le développement du procédé sur la France et nous, la fabrication pour le Nord
». Cette automatisation offre aux entrepreneurs la possibilité de bénéficier de prix compétitifs pour concurrencer le béton à terme et avoir une réactivité plus importante aux besoins de ses clients. «Nous adaptons la taille des panneaux à la demande, on répond à tous les projets que ce soit maisons ou bâtiments industriels», assure Arnaud. Pour aller plus loin, «on construit les panneaux et on fait aussi la pose sur chantier de nos ossatures».

Écologie et économie réunies

Aujourd’hui Activ Paille travaille avec des collectivités, des architectes, des maîtres d’œuvre, des promoteurs immobiliers, des bailleurs sociaux… En fin d’année, une nouvelle réforme des bâtiments (RE 20.20) va se renforcer et stipuler que tous bâtiments neufs devront intégrer des matériaux biosourcés et justifier un bilan carbone du bâtiment. Selon les chiffres, 1 m2 de panneaux stocke 15 kg de carbone. «Ce sera une vraie opportunité pour notre entreprise», se félicitent Adrien et Arnaud. Et s’il reste des sceptiques sur la construction paille et éventuellement ses risques, les deux entrepreneurs assurent qu’un caisson paille a une résistance au feu d’une à deux heures aujourd’hui. Car la recherche et développement sur la filière paille se poursuit pour toujours améliorer le produit et trouver de nouvelles utilisations. 

On l’aura compris, on est bien loin de la maison en paille de Nouf-Nouf dans les Trois petits cochons de Charles Perrault qui s’envole au premier coup de souffle du loup... Les intérêts de la maison en paille ? Écologique, car c’est un excellent isolant thermique, économique, car la paille est bon marché et facile à trouver sur place.  «La provenance de la paille est importante, il faut favoriser au maximum les circuits courts pour ce matériau local, éco-responsable et bénéfique pour l’économie départementale. Les professionnels du bâtiment sont en attente de paille et il s’agit pour les agriculteurs, d’une source potentielle de revenus complémentaires.»

 

Rénover et construire avec des matériaux biosourcés

«Dans le département de l’Aisne, le parc immobilier vieillissant représente un chantier aux enjeux multiples sur les plans économiques, environnementaux, énergétiques, mais aussi en termes de qualité de vie. Aujourd’hui, le développement au niveau départemental, d’une filière de rénovation et de construction à partir de matériaux biosourcés trouve tout son sens. L’enjeu d’un tel projet consiste à développer dans l’Aisne de l’activité économique et de l’emploi dans le secteur des composants pour le bâtiment intégrant les critères du développement durable. Ce nouveau débouché est une bonne nouvelle pour les agriculteurs», explique la Chambre d’agriculture de l’Aisne. «Il est possible d’exporter des pailles tout en conservant les stocks de matières organiques des sols pour répondre à l’émergence des biomatériaux. Dans l’Aisne, nous avons les surfaces potentielles en paille de blé avec l’objectif d’utiliser les coproduits. L’objectif est également de répondre aux attentes du marché sans pour autant réduire les besoins en paille des éleveurs». 
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