Bailleurs : quelle stratégie adopter en 2018 ?
Avec l’entrée en vigueur du prélèvement à la source en 2019, les revenus de 2018 ne seront pas taxés, sauf pour certains revenus. Il n’est pas certain que les bailleurs aient intérêt à réaliser des travaux en 2018 pour réduire la note. Explications.
La réforme du prélèvement à la source (PAS) de l’impôt sur le revenu, inscrite dans la loi de finances pour 2017, doit entrer en vigueur au 1er janvier 2019, laissant ainsi une année à l’administration fiscale. Le barème progressif de l’impôt sur le revenu ne sera pas supprimé et la déclaration d’impôts restera toujours obligatoire.
Rappel du PAS
L’impôt ne sera plus payé avec un an de décalage par rapport à la perception des revenus.
La retenue à la source consiste à faire prélever le montant de l’impôt par un tiers payeur au moment du versement au contribuable des revenus sur lesquels porte l’imposition.
Pour les bailleurs qui perçoivent des revenus fonciers (location de foncier ou de logement non meublé), le montant de l’impôt sera prélevé sur votre compte bancaire par le fisc tous les mois, ou sur option, tous les trimestres, sous forme d’un acompte. Le montant de l’acompte sera calculé par le fisc sur la base des revenus fonciers nets de 2017 pour les acomptes prélevés entre janvier à août 2019 et sur la base des revenus fonciers nets de 2018 pour ceux payés de septembre 2019 à août 2020.
Si vous louez en meublé, vos loyers, imposables dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, feront l’objet également d’un acompte.
L’année 2018 sera une année blanche, ce qui signifie que l’impôt dû sur les revenus 2018 sera effacé par un dispositif spécifique, le CMIR (crédit d’impôt de modernisation du recouvrement). Habituellement, quand les bailleurs réalisent des travaux dans les logements qu’ils louent, les montants déductibles viennent minorer le montant des revenus fonciers. Quelquefois, cela permet de créer un déficit qui vient s’imputer sur les autres revenus et qui fait baisser la note de l’impôt dû à l’administration.
C’est pourquoi, compte tenu de cette mesure bien spécifique, les bailleurs auront-ils intérêt à engager des dépenses dans leurs logements qu’ils louent ?
Vous prévoyez des travaux
Une remise en état, des travaux de peinture, des fenêtres ou des volets à changer… 2018 n’est certainement pas la meilleure année pour engager des travaux de rénovation ou d’entretien. Et surtout, si vous établissez une déclaration au régime réel (recettes supérieures à 15 000 € par an ou sur option). Faute d’imposition des loyers ou des fermages, les dépenses engagées en 2018 ne pourront être déduites. Il en va de même pour les déficits. Sur le principe, elles sont bien déductibles, mais sur des recettes non taxées. Faut-il pour autant ne faire aucuns travaux sur les logements loués ? pas forcément.
En effet, le législateur a prévu une sorte de compensation fiscale. Les travaux réalisés en 2018 seront comptabilisés pour 1,5 fois leur valeur : déduit à 100 % en 2018, puis à 50 % en 2019, puisque les travaux déductibles pour 2019 seront plafonnés à la moyenne des dépenses de 2018 et 2019, en 2019. Par conséquent, si vous ne faites aucuns travaux en 2018, vous ne pourrez déduire que 50 % en 2019. Ce qui veut dire qu’il faut atteindre un certain niveau de revenus pour tirer parti du dispositif transitoire. En pratique, un bailleur ayant 10 000 € de recettes locatives devrait réaliser au moins des travaux d’un montant de 41 400 € pour profiter du dispositif mis en place par le législateur. Mais, quitte à réaliser une opération de travaux relativement importante, mieux vaut la réaliser en 2018 qu’en 2019.
Pour rappel, en 2019, les travaux ne seront tenus qu’à hauteur de 50 %. La déductibilité à 100 % est maintenue en 2019 pour les travaux d’urgence, ceux décidés par le syndic ou ceux liés à l’achat d’un logement acquis en 2019 ou encore lier par une tempête.
Face à ce dilemme, si vous faites des travaux en 2018, vous ne tirerez pas forcément un avantage fiscal, sauf si vous disposez de revenus exceptionnels (voir ci-après). Mais en 2019, vous ne déduirez que 50 %. En clair, si aucuns travaux n’étaient prévus en 2018, il est conseillé d’attendre 2020 pour profiter de la déduction totale, car en 2019, la déduction des factures sera réduite de 50 %. Dans tous les cas, il faudra adapter votre stratégie à votre situation personnelle.
Bailleurs taxés pour les recettes «inhabituelles»
Les revenus dits «exceptionnels», c’est-à-dire ceux non susceptibles d’être perçus tous les ans, restent taxables en 2018. Ce sont essentiellement les indemnités de pas-de-porte perçues par le propriétaire à l’entrée dans les lieux ; le supplément de loyer résultant de l’attribution gratuite en fin de bail des aménagements effectués par le locataire, les subventions perçues pour financer des charges déductibles ; certains compléments de loyers et fermages spécifiques des propriétés rurales, les réintégrations d’amortissements (Périssol, Borloo ou de Robien), en cas de rupture d’engagement locatif, le revenu foncier issu de la régularisation en 2018 des provisions pour charges de copropriétés déduites en 2017…
Attention, les recettes foncières perçues en 2018 qui correspondraient à des échéances afférentes à d’autres années sont exclues également du CIMR.
Déficit foncier en 2017
Si vous avez un déficit foncier en cours et qui n’est toujours pas soldé, vous disposez d’une période de dix ans pour pouvoir l’imputer sur des revenus fonciers. Cette fraction reportable sera prise en compte dans vos revenus 2018. Normalement, elle aurait dû réduire votre impôt à payer en 2019, sauf que celui-ci sera effacé par le CIMR. En clair, la part de déficit n’apportera aucune réduction supplémentaire en 2018 et, en plus, vous perdrez une année de déficit reportable.
Exemple : vous aviez un déficit en 2017 de 20 700 € dont 10 700 € ont été imputé sur votre revenu global en 2017. Le solde de votre déficit est de 20 000 € imputable sur les revenus fonciers pendant dix ans. En 2018, vous disposez de 16 000 € de revenus fonciers sur lesquels on pourra déduire le déficit de 20 000 €, et il restera à imputer 4 000 € en 2019 sur les prochains revenus fonciers à venir. Cette imputation de déficit en 2018 ne procure aucun intérêt fiscal, puisqu’il est effacé par le CIMR. En revanche, il restera à imputer 4 000 € en 2019 sur les prochains revenus fonciers à venir.
Logement en meublé
Les loueurs en meublé partagent le même régime que les indépendants et les commerçants. Les bénéfices de 2018 seront comparés à ceux des trois années précédentes (2015, 2016 et 2017). Si le bénéfice de 2018 dépasse celui d’une des trois années de référence, le loueur sera taxé pour la fraction qui dépasse. En revanche, dans le cas où la hausse de recettes se confirmerait en 2019, il sera épargné. Si les gains baissent en 2019, mais restent au-dessus de ceux des trois années précédentes, seul l’écart entre 2018 et 2019 sera taxé. Donc, il faut s’attendre à des calculs complexes en 2018 et 2019.