Bio Agri Énergies, la méthanisation cohérente avec l’activité agricole
À Cottenchy, huit agriculteurs sont associés au sein de la SAS Bio Agri Energies, pour une activité de méthanisation. Depuis le 29 octobre dernier, ils alimentent l’équivalent de 2 400 foyers en biogaz, grâce au recyclage de déchets 100 % agricoles. Aucune surface dédiée aux cultures alimentaires n’est amputée. Une volonté commune.
À Cottenchy, huit agriculteurs sont associés au sein de la SAS Bio Agri Energies, pour une activité de méthanisation. Depuis le 29 octobre dernier, ils alimentent l’équivalent de 2 400 foyers en biogaz, grâce au recyclage de déchets 100 % agricoles. Aucune surface dédiée aux cultures alimentaires n’est amputée. Une volonté commune.
Il en faut, du volume, pour alimenter leur gros bébé. Les deux digesteurs de 2 200 m3 du méthaniseur de la SAS Bio Agri Energies, à Cottenchy, avalent 90 t chaque jour. «Il s’agit uniquement de déchets agricoles : effluents d’élevage, dont du fumier, du lisier et des fientes, des pulpes de betteraves de Tereos et de Saint-Louis, et les couvertures hivernales que nous optimisons. Nous ne produisons aucune Cive d’été (Culture à valeur énergétique), alors que la réglementation les tolère à hauteur de 15 % des apports. Notre volonté était de ne pas sacrifier de surfaces de cultures alimentaires», explique Camille Deraeve. Tontes de pelouses, issues de céréales et autres déchets contrôlés des industries agroalimentaires complètent la ration. Ce 31 mai, Camille et les sept autres associés (Loïc Lemaire, Laurent d’Halluin, Hervé Nowak, Fabrice Declerck, Olivier Cocquerelle, Edouard Corsyn et Bertrand Sorel), ils conviaient des adhérents de la FDSEA80 à visiter leur nouvelle installation.
Le projet est né en 2018 d’une volonté commune de diversification. «Le chiffre 8 nous a toujours suivi : nous nous sommes réunis à 8 autour d’une table, et nous sommes 8 aujourd’hui, avec des fermes à 8 km autour du méthaniseur, pour un projet à 8 M€», résume Camille. La matière organique apportée est dégradée par des micro-organismes, en conditions contrôlées et en l’absence d’oxygène. Cette réaction permet la production de 400 nm3/h de gaz vert (CH4), injecté dans le réseau GRDF, soit l’équivalent de 2 400 foyers en biogaz. «Nous produisons 5 % de la consommation annuelle de la ville d’Amiens, et 35 % de cette consommation le 15 août à minuit», précise Loïc Lemaire.
Pour faire fonctionner le tout, l’enjeu est d’équilibrer la ration de ce méthaniseur. «Il est comparable à une vache, avec une bouche qui ingère, un œsophage, un estomac et un anus», explique Camille Deraeve. Pour cela, l’équipe est accompagnée d’un biologiste de son constructeur, AES Dana. La partie solide est chargée dans les incorporateurs bio-push, pendant que le digestat (qui permet de faire glisser le tout) est amené par tuyaux. «Chaque volume de chaque ingrédient est noté sur tablette. Nous effectuons un week-end sur huit de permanence, et il faut que le chargement soit exactement le même à chaque fois.» Soixante-dix à quatre-vingt jours seront nécessaires entre l’entrée de la matière et sa transformation.
En plus du biogaz, le méthaniseur produit du digestat. Ici, il est entièrement liquide. «Nous avons fait le choix de ne pas nous équiper d’un séparateur de phase. Nous voulions un engrais NPK complet (azote, phosphore, potassium). Pour son stockage, une fosse enterrée a été construite à Merville-au-Bois (hameau d’Ailly-sur-Noye), et une autre est en projet à Chaussoy-Epagny, «au plus près des champs». À la question «appauvrissez-vous vos sols en exportant les couverts», les agriculteurs répondent par la négative. «Tous les résidus des cultures sont restitués. En plus du digestat, le bilan est très bon.»
Une entente indispensable
Un tel projet collectif nécessite de s’entendre. «Nous avons opté pour la méthode EPR (méthode de l’évaluation participative rapide) pour mieux se connaître les uns les autres. Aujourd’hui, chacun a ses engagements, ses fonctions, et s’y tient.» Fabrice et Loïc occupent notamment un mi-temps chacun au sein de la SAS pour assurer son fonctionnement. «Nous recrutons désormais une personne à temps complet pour la logistique du site.» Un des associés, à la tête d’une ETA, a aussi embauché 1,5 ETP pour effectuer le transport des matières vers les silos.
Pour pousser plus loin le bouchon de l’autonomie, les associés souhaitent investir dans des panneaux photovoltaïques, qui leur offriraient une autosuffisance en électricité. «Cela peut faire sourire, mais pour produire de l’énergie, la première dépense est l’énergie.» Une inauguration, avec visite du site, sera organisée cet automne.