Céréales : évaluer les risques possibles suite au froid
D’avril à début mai, les céréales d’hiver ont été exposées
à de fortes amplitudes thermiques importantes et des épisodes de froid, voire de gel.
Pour analyser les risques de ces coups de froid, il est nécessaire de prendre en considération plusieurs
facteurs, notamment le stade de la parcelle.
Retour sur les différentes séquences climatiques. Autour du 4 avril, un épisode de gel a eu lieu avec des températures relevées sous abri de - 1°C, et jusqu’à - 4°C dans l’ouest de l’Oise. A cette période, les blés les plus tardifs étaient encore au stade Epi 1 cm, mais la majorité des parcelles de blés et d’orge d’hiver avait débuté leur montaison.
Durant la nuit du 14 avril, les températures minimales relevées sous abri sont encore descendues jusqu’à - 4°C (de - 1°C à - 6°C selon les secteurs). Les céréales étaient à cette période en pleine montaison (stade 1-2 nœuds).
Le 29 avril et le 6 mai, deux nouveaux épisodes de froid, moins intenses, ont été relevés avec des températures proches de 0°C, plus particulièrement dans l’Oise et le Nord de l’Aisne. Selon les stades de développement, certaines parcelles d’orge d’hiver étaient au stade gonflement, stade proche de la méiose, période assez sensible aux stress climatiques. Les blés, quant à eux, n’avaient pas atteint ce stade, sauf peut-être quelques parcelles les plus avancées qui avaient déjà dépassé les stades dernière feuille ligulée, début gonflement.
Quels risques représentent ces coups de froid pour les céréales ? Il n’existe pas de seuils fiables de la sensibilité des céréales à des accidents climatiques. Avant tout de chose, rappelons que les repères historiques retenus chez Arvalis doivent être considérés comme des seuils d’alerte, pas des seuils de dégâts.
Analyse du risque
Les conditions d’apparition du gel (arrivée du froid progressive ou non), la durée du gel (quelques heures ou plusieurs jours), l’état de la culture, l’orientation de la parcelle ou encore l’humidité du milieu, sont autant de facteurs qui pourront être pris en compte pour l’analyse de risque.
Concernant le gel d’épi pendant la montaison, le seuil habituellement retenu est de - 4°C, peu après épi 1 cm. De récents travaux montrent que le seuil d’alerte est plutôt de - 5 à - 7°C sous abri puis s’élève progressivement au cours de la montaison pour arriver à 0°C à floraison. Certains blés étaient encore au stade Epi 1 cm et ont pu être exposés à ce premier épisode de gel du 4 avril, mais les températures ont à peine dépassé le seuil d’alerte, et le froid ne s’est pas prolongé. Au final, on peut penser que le risque de dégât reste faible. Si dégât il y a, il va affecter le maître-brin ; celui-ci risque d’être détruit, mais une compensation par les autres talles se met immédiatement en place.
Pour le second épisode de gel du 13 avril, les parcelles de céréales étaient en pleine montaison. A ce stade, des températures gélives peuvent affecter tout ou partie de l’épi. En début de montaison, l’épi dans la tige est plus fragile car plus petit, et il peut être touché dans sa totalité. Pour les parcelles plus avancées, dépassant le stade 2 nœuds, l’épi est plus grand et il est donc moins sensible et seuls certains épillets peuvent être affectés. Globalement, peu de secteurs de la région sont concernés par des températures proches du seuil d’alerte, le risque reste faible, mais des symptômes pourraient ponctuellement apparaître. Des compensations sont encore possibles. Pour être significatifs, les dégâts doivent toucher plus de 5 % des épis, soit >20 épis/m².
Enfin, début mai (5-6 mai), les températures ont approché les 0°C et la question d’un préjudice peut se poser pour certaines parcelles qui étaient au stade méiose. Pour cet événement qui dure à peine deux jours, les pénalités sont présentes dès lors que la température devient négative (<0°C). Mais des préjudices sont susceptibles d’être également présents pour des températures basses et positives (de l’ordre de 4°C) si elles sont accompagnées d’un rayonnement faible, inférieur à 200 calories environ. La sensibilité à la méïose met également en jeu un effet variétal très fort (on se souvient des variétés Moulin ou Pernel, très affectées en 1987).
Difficile de présager les dégâts
Pour cette année, les températures ont certes étaient froides, mais non gélives, et le rayonnement est resté autour de 300 cal/m², ce qui ne place pas l’année en risque extrême. Les blés n’étaient pas encore au stade sensible, en revanche, les orges d’hiver étaient plus avancées en stade et donc ont été plus exposées au risque. Au final, difficile de présager d’éventuels dégâts. Les symptômes ne seront visibles qu’après la floraison, l’épi a une structure normale, mais des grains sont absents dans certaines fleurs par absence de fécondation, et ce n’est visible qu’au moment du remplissage.
En résumé, les blés ou les orges d’hiver ont pu être exposés à ces séquences de gels, selon leur stade de sensibilité, la localisation de la parcelle, mais le risque de préjudice important reste faible a priori. La présence de symptômes pourraient néanmoins s’observer localement.