Conditions d’abattage : pas si mal, mais des progrès à faire
La grande majorité des abattoirs ne présente aucun défaut de conformité, selon une inspection générale menée. Les non conformités les plus graves concernent 5 % des chaînes d’abattage inspectées.
L’inspection générale demandée par le gouvernement suite à la publication en mars d’une troisième vidéo de l’association L214 dénonçant des maltraitances animales dans un abattoir s’est achevée le 30 avril : 259 abattoirs sur 263 ont ainsi été contrôlés, soit 460 chaînes d’abattage, a indiqué le ministre de l’Agriculture. Auditionné le 18 mai par la commission d’enquête sur les conditions d’abattage d’animaux de boucherie, Stéphane le Foll a fait savoir que «pour les deux tiers, aucun défaut de conformité» n’avait été observé. Dans le tiers restant, il s’agit dans la majorité des cas, «d’absence de preuve documentaire, mais pas de manquements constatés envers les animaux».
Des défauts de conformités moyens à graves ont cependant été relevés : défauts d’étourdissement dans 39 chaînes d’abattage, avec «dans la plupart des cas des mesures correctives immédiates exigées par les services» et la possibilité de reprendre l’activité. «Les manquements les plus graves ont concerné 5 % des chaînes inspectées, soit 19 chaînes», a précisé le ministre. 99 avertissements ont été signifiés et 77 exploitants ont été mis en demeure d’apporter des corrections à leur système, dans un délai fixé par les services d’inspection. Enfin, «dans deux établissements, des arrêts d’activité ou retrait d’agrément ont été ordonnés», indique Stéphane Le Foll, pour qui «cette inspection démontre que nous avons encore des progrès à faire». Ce qui est bien l’objectif de la stratégie «Bien-être animal» mise en place par le ministre, et de la commission d’enquête qui auditionne depuis le 4 mai des représentants de la filière (Interbev, Inaporc), des chercheurs, les syndicats d’abatteurs, et des ONG.
Améliorer les conditions de travail des salariés
Il ressort ainsi qu’une attention plus forte doit être apportée aux salariés des chaînes d’abattage. Le faible nombre de candidats à ces postes ne permet pas d’être très sélectif en amont, mais leur formation pourrait être améliorée. Stéphane Le Foll avance l’idée d’une sécurisation des parcours professionnels avec des certificats de compétence pour faciliter les évolutions de carrière dans ces métiers que l’on peut difficilement exercer sur une longue durée.
Si le ministre n’est pas opposé à la vidéosurveillance, il met en garde contre la pression supplémentaire que cela pourrait exercer sur les employés. Au-delà de la formation, «on peut encore investir pour améliorer les conditions de travail», a indiqué Stéphane Le Foll : environ 32 millions d’euros sont encore disponibles sur les 50 millions d’euros débloqués au titre du PIA2 (Programme d’investissements d’avenir). Quatre millions d’euros sont par ailleurs consacrés au projet de sexage des poussins «in ovo», dans l’œuf, pour éviter le broyage des poussins mâles à la naissance. Le ministre a également rappelé les principales mesures de sa stratégie bien-être animale : nomination obligatoire d’un responsable de la protection animale dans tous les abattoirs, renforcement des sanctions pénales, transparence des résultats des contrôles.
Les contre-vérités de Libération
Dans son édition du 17 mai, le journal Libération a publié au sujet des abattoirs un dossier remarqué pour la virulence de sa charge. Interrogé par la commission d’enquête le 18 mai, Stéphane Le Foll a apporté des précisions sur le témoignage de Martial Albar, présenté comme «ex-inspecteur des services vétérinaires» qui aurait «travaillé dans de nombreux abattoirs». Selon les informations du ministère, il s’agirait d’un technicien vétérinaire en poste entre 1999 et 2012, mais n’ayant travaillé en abattoir que lors de trois vacations entre 2009 et 2012, avant une démission sans rapport avec ces missions. «Je respecte toutes les opinions et les opinions des militants sont respectables. Mais la présentation qui était faite est que c’était un vétérinaire, or ce n’est pas un vétérinaire», a déclaré le ministre, dénonçant à mots couverts la partialité du témoignage.
Dans un communiqué du 18 mai, Culture Viande (entreprises de la viande) s’est également attaqué à l’article de Libération en relevant des contre-vérités. Alors que le journal considère qu’en vingt ans «rien n’a bougé pour les animaux», Culture Viande rappelle ainsi les progrès réalisés ces dernières années en matière de bien-être animal avec la mise en place du règlement européen 1099/2009 sur la protection animale entré en vigueur le 1er janvier 2013, obtention de 6 000 «certificats de compétence opérateur» par les salariés, formation de 1 000 responsables protection animale (RPA). «Les actes condamnables diffusés dans certaines vidéos ne sont en rien une généralité dans les abattoirs français. Vouloir faire croire à cette généralisation relève du militantisme anti-viande, pas du bien-être animal», rappelle Culture Viande.