Contre les contraintes administratives : la Somme mobilisée
Les agriculteurs dénoncent l'empilement des contraintes qui pénalisent la production nationale.
L'action syndicale des 23 et 24 juin dernier s'est orchestrée en plusieurs points autour de Paris. Lancée en soirée le 23 juin, elle dénonçait l'empilement des contraintes qui pèsent sur la production agricole nationale.
En prolongement du rassemblement à Rungis, les péages de Senlis (nord) et Saint Arnould (sud) étaient le théâtre de barrages filtrants. Les camions immatriculés hors de France y étaient stoppés.
Pourquoi Rungis ?
Les marchés sont dits d'intérêts nationaux, et aujourd'hui les productions nationales n'y sont pas majoritaires. Le lien était donc fait avec la pression réglementaire mise et remise sur l'agriculteur et l'enjeu national.
Pour sa part, le département de la Somme n'est pas passé à côté du rendez-vous. En pleine nuit, les Sms avaient rassemblé plus de 70 agriculteurs du réseau Fdsea et JA au péage de Senlis, prêtant main forte aux collègues de l'Oise pour organiser le barrage. Durant deux heures, entre routiers étrangers exprimant comme ils le pouvaient leur mécontentement et forces de l'ordre, les manifestants ont poursuivi ce blocage, retardant d'autant l'approvisionnement de Rungis sur ces circuits de commercialisation.
Les suites ?
Quelles avancées après une action ? C'est parfois difficile à quantifier. Sur celle-ci, le ministre de l'Agriculture s'est livré à un brillant exercice de rétropédalage en tandem avec la ministre de l'Ecologie : l'interdiction de protection des plantes à moins de 200 m des écoles ou des habitations n'aurait «jamais été étudiée», voire aurait été «une interprétation erronée» de la part des agriculteurs. Ben voyons ! Si pour une fois le gouvernement aurait été (presque) aussi rapide à remiser ses annonces qu'à les formuler, qu'en sera-t-il du travail de fond à engager sur les contraintes quotidiennes : déclarations, enregistrement, contrôle, interdictions de tous ordres... Si le plus incroyable a été évité, le monde agricole n'en est pas pour autant sorti de ces lourdeurs, et dans la poursuite des Etats Généraux de l'Agriculture lancés par la Fnsea et JA en février dernier, le combat se poursuit.
Les députés vont bientôt à nouveau examiner la loi d'avenir. Deux points chauds y seront débattus : le foncier (régulation, contrôle des structures, baux à clause environnementale, rôle des Cdcea, etc.) et le statut de l'animal, qui est vécu comme un débat inutile sur les animaux de rente, qu'il s'agisse d'élevage ou de cirque.
Affaire à suivre, donc.
Mobilisation sur les parmentaires
L'action engagée dans la Somme a débuté avec une rencontre de députés. En amont de l'examen en commission économique de l'Assemblée Nationale de la loi d'avenir, ceux de la majorité actuelle, Pascale Boistard et Jean-Claude Buisine, ont été rencontrés à Abbeville le 20 juin. Avant le passage du texte en session pleinière, les autres seront à leur tour sollicités.Dans le même temps que l'action syndicale, un courrier type dénonçant la surenchère réglementaire, notamment l'annonce surréaliste d'interdiction de produits de protection des plantes à proximité des habitations, a été transmis par mail à tous les adhérents FDSEA et JA, pour le leur faire parvenir, accompagné d'un chardon et d'un épi de blé. A eux de faire leur choix...Ce courrier est disponible sur le site internet de la FDSEA, www.fdsea80.fr
REACTIONS
Guillaume Clop, secrétaire général de Jeunes Agriculteurs
«Manger français demain ?»
Tel était l'objet de notre mobilisation dans la nuit de lundi à mardi au péage de Senlis. Nous, Jeunes Agriculteurs, connaissons déjà la lourdeur administrative à l'installation ; mais avec le déchainement de contraintes inutiles qu'on voit arriver du Ministère de l'Agriculture ou de l'environnement, ce n'est plus une carrière d'agriculteur que l'on prépare, c'est une carrière de paperasses, de contraintes et de contrôles qu'on nous promet. De quoi en décourager plus d'un. Alors, oui, avec la Fdsea, nous étions près de 80 à Senlis, parce que pour nous qui avons envie de nous installer, de travailler, de donner le meilleur de nous pour fournir les meilleurs produits, cet état d'esprit, ça suffit ! Notre force nationale est d'avoir une agriculture diversifiée sur des territoires nombreux. Nous offrons la meilleure qualité à nos consommateurs et nous le revendiquons. Alors qu'on nous fasse confiance, et qu'on nous laisse faire ! Je tiens personnellement à remercier tous les Jeunes qui se sont mobilisés : notre combat n'est pas que pour notre métier, il sert aussi la société dans son ensemble, pour les générations futures.
Denis Delattre, secrétaire général adjoint de la Fdsea
«Vite fait, bien fait !»
"Les actions sur Paris et aux différents péages ont été mises en oeuvre au pied levé par notre réseau national et régional. Chacun savait ce qu'il avait à faire. Dans la Somme, nous nous étions engagés, avec les collègues de l'Oise, à bloquer les camions immatriculés hors de France. Avec les Jeunes Agriculteurs, la mobilisation a été efficace et rapide, et nous étions plus de 70 agriculteurs samariens à avoir répondu à l'appel. Un grand merci à tous les participants. Au-delà du coup de poing, l'action se poursuit dans la durée. Nous avions envoyé par mail un courrier type à adresser à chaque parlementaire concernant l'annonce délirante d'un périmètre de 200 m autour des écoles ou des maisons sans produits de protection des plantes, phytopharmaceutiques ou agréés agriculture biologique ! Sur ce point, le ministre a vite fait de faire marche arrière à la veille de notre action syndicale, mais ça ne suffit pas ! Il reste tant à faire pour ramener le bon sens, sur les annonces d'interdiction de traitement de jour, sur les durées d'instruction des dossiers d'élevage ou de méthanisation... Nous avons entamé des rencontres avec les parlementaires, nous les poursuivons. Le texte que les députés vont à nouveau examiner est celui de la loi d'avenir. Nous, dans avenir, nous entendons développement, valeur ajoutée, production nationale et emplois. Dans quelques jours, nous saurons ce que nos gouvernants entendent... Notre mobilisation reste entière, donc !"