Inondations
Coulées de boue : les agriculteurs ne veulent pas porter le chapeau
Les inondations qui ont touché la vallée de la Somme fin de semaine dernière relance le débat sur la prévention du phénomène d’érosion et la responsabilité des acteurs locaux.
Les inondations qui ont touché la vallée de la Somme fin de semaine dernière relance le débat sur la prévention du phénomène d’érosion et la responsabilité des acteurs locaux.
Face aux phénomènes d’inondations qui ont touché une partie du département de la Somme ces derniers jours, entraînant érosion et coulées de boue, les agriculteurs sont des victimes comme les autres, entendaient rappeler Chambre d’agriculture et FDSEA. Et sûrement pas des boucs-émissaires. Agriculteur sur la commune de Sailly-Laurette, Simon Catteau fait partie des agriculteurs dont les parcelles ont été durement touchées. Fin de semaine dernière, il cherchait encore à comprendre comment le phénomène a pu se produire : «Jusqu’à aujourd’hui, on n’avait encore jamais connu ça…» En ce qui concerne les aménagements qui pourraient permettre d’en réduire les effets, l’agriculteur explique avoir, comme d’autres voisins, «planté volontairement des haies depuis une dizaine d’années.» Mais face à l’ampleur de la pluviométrie, leur effet s’est montré insuffisant : «Nos haies vont avoir un effet positif quand il pleut entre 15 et 20 millimètres. Pas quand il tombe 70 millimètres en l’espace de quelques heures…» Selon les relevés effectués sur le territoire, «l’équivalent de 250 piscines olympiques est tombé du ciel en deux heures.»
Cultures détrempées
Pour Simon Catteau, pas de doute, «c’est vraiment l’intensité de l’événement qui fait que l’on a eu des dégâts». Chez lui, les conséquences sont visibles sur des parcelles de pommes de terre avec des buttes lessivées ; dans un autre champ, prêt à accueillir des carottes, les pré-buttes n’ont pas tenu. «Heureusement que je n’avais pas semé… À 300 €/ha de semences, ça aurait fait mal…» Chez un voisin, ce sont des betteraves qui se sont retrouvées sous 15 centimètres d’eau boueuse. La suite ? «On doit maintenant attendre que les sols s’assèchent pour voir ce qu’il conviendra de faire», estimait Simon Catteau dont le coup de main des habitants de la commune pour nettoyer leurs propriétés a été apprécié. «Tout a été nettoyé rapidement, mais quand on entend certains élus mettre la responsabilité sur les agriculteurs, ça fait mal…»
L’agriculture première victime
Pour la FDSEA, qui a tenu un bureau délocalisé lundi 27 mai à Sailly-Laurette, «cette épreuve attise de nombreux raccourcis et doit permettre à tous d’appréhender les chaines de responsabilité, non pas pour éviter ce type d’accident climatique, mais pour le surmonter collectivement au mieux». Autrement dit, pour l’organisation syndicale, certains discours tenus par des élus locaux auprès de leurs administrés pointant la responsabilité du monde agricole ne passent pas. «L’agriculture a sa part de responsabilité dans la situation, mais l’affubler de tous les maux serait nier deux évidences. D’un côté, qui pourrait croire qu’un tel épisode pluvieux aurait été contenu avec des productions d’automne ou des prairies ? À ce niveau de violence, aucune solution n’est en mesure de contenir un pareil épisode», soulignait la FDSEA, dans un communiqué. Et de poursuivre : «Il ne faut pas oublier que l’agriculture est la première à subir les affres du climat : chaque année, de nombreux dégâts climatiques abîment les récoltes et les parcelles, et seuls les épisodes les plus critiques occasionnent des dégâts sur les biens privés.» Critique envers d’autres acteurs du territoire, la FDSEA regrette que «sur l’ensemble des réseaux routiers, les travaux d’entretien des accotements, de curage des fossés collecteurs, de réfections des saignées ne sont plus aussi fréquemment assurés» et que lorsque certaines communes ont identifié des mesures de prévention ou des ouvrages d’aménagement, «les processus décisionnels sont devenus trop longs et incertains.»
En visite le jeudi 23 mai dans les communes touchées, la présidente de la Chambre d’agriculture de la Somme, Françoise Crété a dit vouloir «plus de moyens consacrés à la prévention quand on voit ce que des phénomènes comme celui-là vont coûter.» Du côté de la FDSEA, la demande est la même. Dans sa lettre ouverte, le syndicat appelle en effet à «l’amplification des travaux de Somea, et appelle l’ensemble des acteurs du territoire à porter une réflexion parallèle, pour mettre en œuvre les mesures simples et efficaces de rétention/canalisation des eaux, plutôt que de se défausser parfois sur l’agriculture.»
La FDSEA demande la possibilité de valoriser les jachères
Conséquence des inondations et d’une forte pluviométrie qui ne semble pas vouloir s’arrêter, de nombreux éleveurs du département de la Somme sont confrontés à une double peine, a alerté il y a quelques jours la FDSEA 80. Dans un courrier daté du 24 mai adressé à la DDTM, le syndicat s’inquiète de «la situation des éleveurs subissant des pertes fourragères liées aux inondations persistantes dans leurs prairies». Pour ces agriculteurs, demande la FDSEA, «il serait judicieux, voire nécessaire de permettre la récolte de leurs propres jachères ainsi que la valorisation de jachères d’autres agriculteurs». Pour cela, elle demande donc l’activation du cas de force majeure qui permettrait une valorisation des surfaces non culti-vées comme fourrages.