«La fraise hors sol, c’est un métier»
La fraise, plus tardive que l’année dernière à cause du froid, arrive à maturité dans les serres de la Somme. La star du printemps se fait désirer. Aux serres Gauthier, à Bovelles, les premières barquettes sont attendues.
La fraise, plus tardive que l’année dernière à cause du froid, arrive à maturité dans les serres de la Somme. La star du printemps se fait désirer. Aux serres Gauthier, à Bovelles, les premières barquettes sont attendues.
Au bout de leur pédoncule, les fruits commencent à rougir. Dans les serres Gauthier, à Bovelles, à l’ouest d’Amiens, les premières fraises devraient être récoltées avec une dizaine de jours de retard par rapport à l’année dernière. La faute au printemps froid. Elles sont pourtant très attendues. «On a hâte de pouvoir s’en régaler à nouveau. Chaque année, on guette les premières ventes», assure Christine, une habituée du lieu.
«Ici, les fraises sont vendues uniquement au détail, à 10 €/kg. Mais la qualité est assurée : un goût exceptionnel et une production sans pesticide, en lutte intégrée», affirme Michel Gauthier. Le maraîcher s’est installé en 1982 sur un peu plus de 5 ha, après une carrière d’enseignant en physique-chimie, et a toujours cultivé les fraises. «Avant, je faisais des fraises de plein champ. Mais depuis douze ans, j’ai fait le choix du hors sol, sous serre», explique-t-il. Les hivers doux suivis de fortes gelées printanières, la sécheresse estivale, ou encore les orages dont les fortes précipitations font pourrir les fruits font partie des raisons de ce choix. La tâche reste délicate : «la fraise hors sol, c’est un métier.»
Darselect et Charlotte : un régal
Dans les 700 m2 de serre poussent deux variétés. La première est la Darselect, assez précoce, à gros calibre, longue et conique, dotée d’une chair ferme. «Elles sont non remontantes. C’est-à-dire qu’elles ne produisent qu’une fois.» Mille fraisiers ont été plantés fin février. Ils s’apprêtent à donner leurs premières fraises, jusqu’au 15 juin environ. Mille autres pieds seront à nouveau plantés après la récolte pour une deuxième production en août. Trois-mille pieds de Charlotte ont aussi été plantés. La fraise cordiforme est réputée parmi les plus savoureuses et fruitées et se distingue par sa chair moelleuse. «Ce n’est pas la plus productive, mais elle est merveilleusement bonne !»
Il s’agit cette fois d’une variété remontante, donc plus délicate à gérer. «Il faut être très soigneux et nettoyer la hampe florale après chaque récolte, car les ravageurs ont le temps de s’y installer», précise Michel Gauthier.
Thrips, acariens et pucerons sont les principales bêtes noires des fraisiculteurs. «Pour repérer leur présence et leurs attaques, il faut un bon sens de l’observation.» Les thrips, par exemple, logent dans les fleurs et empêchent la bonne pousse du fruit : les fraises sont bronzées et déformées. Invendables. «Les acariens, eux, s’attaquent aux pieds et empêchent la reproduction.» Pour lutter contre ces ravageurs, les auxiliaires sont d’une aide précieuse. Michel Gauthier fait appel aux services de la société Koppert, qui développe des biosolutions, pour fournir ses petits prédateurs. Au printemps, des bourdons, pollinisateurs de la fraise par excellence, sont aussi introduits.
Une technique à maîtriser
Pour prévenir les maladies (pourriture grise, anthracnose ou oïdium), rien de tel qu’une serre bien ventilée. L’alimentation, apporté grâce au système d’irrigation, joue aussi un grand rôle dans la recherche de la fraise idéale. «J’évite un apport trop important d’azote, car cela nuit à la qualité. Je compense par l’apport d’oligo-éléments et de fer, même si c’est onéreux.» Le cycle d’arrosage de trois minutes par heure est un programme automatique. En cas de forte chaleur, ce temps est allongé. «Il faut savoir anticiper les besoins de la plante», indique l’expert, scrutant un fraisier de prêt. Ce jeudi, l’heure était au peignage des fraises, soit démêler les hampes et retirer les grosses feuilles pour faire ressortir les fleurs et les fruits, et ainsi favoriser le mûrissement. En tout, entre 3 et 4 tonnes seront produites, selon la saison.
Les fraises de la serre Gauthier, ainsi que les mûres, framboises, cassis et groseilles, tomates, courgettes, poivrons, aubergines, bettes et haricots verts, sont en vente directe, sur place, tous les jeudis, de 15h à 20h, ainsi qu’aux marchés amiénois et au marché de Cayeux-sur-Mer le dimanche matin, en période estivale.