Des agneaux et du revenu en plus !
Echos de la journée technique régionale ovine organisée en décembre dernier dans la Somme.
Malgré le froid, ce sont près de 120 personnes, éleveurs et étudiants, qui ont participé à cette quatrième édition organisée en décembre dernier par le Réseau d’Elevage, en partenariat avec le GIE Lait Viande et Bergers du Nord Est.
La journée fut riche en échange autour d’un thème, toujours d’actualité, la réduction de la mortalité des agneaux. Ce critère a tendance à augmenter ces dernières années, ce qui impacte le revenu des éleveurs de la région.Rappelons que 10 % d’agneaux morts représentent 10 € de perte de marge par brebis. Ce sujet passionnant est pourtant difficile à maîtriser. Via les interventions de Laurence Sagot, de l’Institut de l’Elevage et de Nicolas Moreaux, vétérinaire référent de Bergers du Nord Est, le public a cependant pu repartir avec quelques pistes de marges de manoeuvre
Des études complètes pour affiner les connaissances sur le sujet
Ces dernières années, deux études ont été menées par Limovin sur 24 élevages et par le CIIRPO sur 60 élevages afin d’essayer de déterminer les facteurs déterminants dans la variabilité du taux de mortalité des agneaux. Laurence Sagot a exposé les résultats de ces suivis approfondis d’élevages. La dernière étude a fait état d’une mortalité moyenne jusqu’à 60 jours d’âge (avortons et morts nés inclus) de 14.5 %. Les écarts entre élevages sont très importants : entre 4 et 27 %.
70 % de la mortalité intervient dans les dix premiers jours et plus de la moitié dans les deux premiers jours. Le lien entre le poids à la naissance des agneaux et leur taux de survie est prépondérant.
Il semble ainsi indispensable de maîtriser à la fois l’état des brebis et l’équilibre alimentaire des rations en fin de gestation. La prise de colostrum est toujours indispensable mais sa surveillance est parfois trop tardive. Ainsi, contrôler que l’agneau tête dans les premières heures de vie permet de réduire de 8 % son risque de mortalité.
Un enseignement plus récent est l’importance de la complémentation en sélénium des brebis en fin de gestation pour développer l’immunité des agneaux. Sans cette complémentation, les agneaux sont souvent carencés.
Les essais de distribution d’un CMV enrichi en sélénium pendant les cinq dernières semaines de gestation sont encourageants. D’autres essais adoptant d’autres modes de complémentation vont être menés.
Enfin, il a été montré que pailler abondamment (1 kg/jour/femelle) pendant l’agnelage et le début de lactation et réformer les brebis de plus de 7 ans permettent également de réduire le taux de mortalité agneaux.
Prévenir les principales causes de mortalité
Nicolas Moreaux, vétérinaire référent de la coopérative Bergers du Nord Est, a refait le point sur trois principales causes de mortalité que sont les avortements, les colibacilloses et l’entérotoxémie.
Les avortements ne doivent pas toujours paraître anodins. Leur origine peut être multiple : virale, bactérienne, mycosique,… Pour détecter cette origine, il faut décrire les signes cliniques et réaliser des prélèvements à 15 jours/3 semaines d’intervalle pour surveiller l’évolution de la réponse immunitaire. Si la cause est infectieuse, et en fonction de l’objectif d’assainissement, un programme de vaccination des agnelles peut être mis en place, d’une durée moyenne de 5 à 7 ans.
L’entérotoxémie est la circulation dans le sang de toxines produites par des bactéries de l’instestin.
Elle est souvent liée à un déséquilibre du fonctionnement intestinal. Le traitement de l’entérotoxémie est difficile mais des mesures de prévention peuvent être mises en place assez facilement dans les systèmes bergerie : aménager des transitions alimentaires longues, prévenir les coccidioses et les acidoses. En système herbager, la variation de la qualité et de la quantité de l’herbe dans le temps rend plus compliqué la gestion des transitions alimentaires. La vaccination peut alors être recommandée.
Mais attention, une vaccination des mères ne dispense pas de réaliser deux injections sur les agneaux.
Les collibacilles qui affectent les agneaux dans leurs premiers jours de vie sont des germes qui prolifèrent dans des conditions d’ambiance défavorables. Ces conditions peuvent être liées à une surpopulation, à un bâtiment inadapté ou aux mélanges d’agneaux d’âges différents. Les agneaux plus légers, nés de mères moins laitières ou n’ayant pas bu de colostrum, y sont plus sensibles. La vaccination n’intervient que dans quelques cas bien spécifiques. La prévention passe par le contrôle des conditions d’hébergement et par la conduite alimentaire de ces brebis qui garantit un bon état en fin de gestation et un colostrum de qualité.
ZOOM
Une exploitation qui mise sur la complémentarité ovins-cultures
L’exploitation de M. Drouvin à Longré-les-Corps-Saints a été le support, lors de l’après midi de cette journée technique, d’ateliers spécifiques autour de la mortalité des agneaux. L’éleveur a également exposé aux participants ses motivations et ses choix quant au développement de sa troupe et à la construction d’une bergerie automatisée.
En développant son atelier ovin, M. Drouvin avait deux objectifs : maintenir l’emploi salarié par la création de valeur ajoutée, et bénéficier de la fumure organique produite sur l’exploitation.
Il oriente aujourd’hui ses techniques culturales vers le non labour. La richesse du sol en matière organique en est un critère de réussite essentiel. En favorisant au maximum le pâturage de cultures implantées en dérobées, il bénéficie ainsi d’un enrichissement naturel des sols. Cependant passer de 200 à 700 femelles ne s’est pas fait du tout au hasard. M. Drouvin a réfléchi longuement pour mettre en adéquation performances, économie, bien-être de l’éleveur et bien-être animal. La bergerie ne dispose par de surface de couloirs d’alimentation ni de surveillance pour limiter les coûts d’environ 25 %.
La distribution des concentrés est assurée par deux robots distributeurs circulant sur les auges surélevées. Le fourrage est distribué à partir d’un chariot se déplaçant sur les même auges. La pénibilité est ainsi fortement réduite. Les déplacements d’animaux sont réalisables grâce à des jeux de barrières et la surveillance est assurée à partir des auges. Grâce à ces aménagements l’éleveur estime limiter, lors de l’hivernage, à 1h30 par jour le temps consacré à l’alimentation, au paillage et à la surveillance de ses 700 brebis.