Betteraves
Des betteraves déterrées, des silos bien protégés : un gain pour la filière
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Le déterrage et la protection des silos contre le gel ont fait l'objet de débats à l'assemblée générale du syndicat betteravier de la Somme.
En Alsace le bâchage mécanique des silos a été généralisé.
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AAP
La dernière campagne betteravière a été marqué, on s'en souviendra, par des conditions climatiques particulièrement difficile : excès de pluie sur le littoral d'une part, gel d'autre part. D'où des rendements en net retrait, une tare terre en nette augmentation (voir les chiffres en encadré), et des problèmes de conservation des betteraves au silo. Certains ont même du être écrémés, chose que l'on n'avait pas vue depuis longtemps.
Comment mieux s'en prémunir? Les débats de l'assemblée générale de l'Asbs (Association syndicale betteravière de la Somme) se sont focalisée cette année sur ces questions, d'autant plus importantes aujourd'hui que les campagnes se poursuivent beaucoup plus tardivement dans la saison. Et pour la première fois cette assemblée s'est décentralisée pour se tenir le 27 mai dernier sur le site de la Sica pulpe de Haute Picardie à Epénancourt. L'occasion de faire découvrir ces installations aux planteurs et de présenter les nouveaux matériels de déterrage. Présidée par Dominique Fiévez, elle bénéficiait de la participation d'Eric Lainé, président de la CGB (Confédération générale des planteurs de betteraves).
Gel : de lourdes conséquences pour le planteur et l'industriel
Gel : de lourdes conséquences pour le planteur et l'industriel
Lors d'une première table ronde, consacrée à la protection contre le gel, Guy Le Pargneux, directeur des sucreries de Roye et Eppeville, a tout d'abord mis en évidence les graves conséquences que peut entraîner l'apport de betteraves gelées dans le processus industriel. La betterave, a-t-il rappelé, est composée aux trois quart d'eau. Dès - 2° C celle-ci se transforme en glace, ce qui fait éclater les cellules de la racine, et amorce un processus de pourrissement. Exposée quelques jours à - 5° C la betterave meurt. La fermentation échauffe le silo et s'en trouve d'autant accélérée. A l'usine, au lavage le jus des betteraves gelées coule dans l'eau, à la diffusion les cossettes diffusent des résidus de cellules, des acides, des macro molécules dont le dextrane qui va se déposer sur les filtres et bloquer ainsi la filtration. "Il n'y a pas d'autres solutions que d'enlever les filtres et d'aller les nettoyer au karcher, ce qui prend une demi journée. Résultat, l'usine peut être ralentie à la moitié de sa capacité. Et il suffit pour cela de seulement 2 à 3% de betteraves gelées", explique Guy Le Pargneux. "Il y a bien entendu une perte de sucre pour le planteur et pour l'industriel, ce dernier pouvant aussi avoir des difficulté à maintenir la qualité du sucre", a-t-il ajouté.
Bâchage mécanique un expérience en Alsace
Pour se prémunir du gel, on peut préventivement niveler le silo. Ensuite, il faut bâcher le tas de betteraves. L'opération n'est pas toujours aisée et le débâchage encore moins, elle nécessite de la main-d'oeuvre. A la sucrerie d'Erstein (groupe Cristal Union) en Alsace, une expérience de mécanisation du bâchage a été menée conjointement avec le syndicat betteravier, à l'exemple de ce qui est largement pratiqué en Allemagne. "Les arrachages sont faits exclusivement par intégrales, les silos sont réguliers.
Après un premier test plutôt concluant, nous avons décidé de généraliser le bâchage mécanique pour la campagne 2011-2012, a témoigné Joseph Behr, directeur du syndicat betteravier d'Alsace. Trois ETA ont acheté chacune une machine allemande. On a cousu ensemble des bâches et on les a enroulées sur des tubes de 6 m de long. La machine déroule la bâche après ancrage du côté nord. Le débâchage se fait en sens inverse. La base du silo n'est pas couverte, mais on réfléchit à la mise en place de jupettes fixées par des bandes velcros".
Quant au coût de l'opération (la machine et son utilisation), il a été décidé de le faire supporter à l'ensemble des planteurs qu'ils aient dû bâcher ou non selon le planning d'enlèvement. "L'objectif était de 10 cts la tonne. Il a été tenu en 2011, mais pas l'an dernier où on est monté à 15 cts à cause des conditions météo. Mais l'objectif initial est maintenu", a précisé Joseph Behr. "Et nous avons un bon retour des planteurs", a-t-il ajouté.
Outre la protection contre le gel, Joseph Behr a cité plusieurs avantages au bâchage : on évite la casse des tapis sur les avaleurs, le fond du silo se dégrade moins rapidement car le sol est ressuyé et surtout on améliore le déterrage.
Jupettes en Belgique
En Belgique, une expérimentation est menée sur la pose de jupettes accrochées aux bâches toptex, sachant que le froid arrive par le bas. Une entreprise a d'ailleurs lancé la production de différents modèles. Une pratique intéressante, selon Guy Legrand, ingénieur à l'Irbab (l'homologue belge de l'ITB). Il y voit une protection nécessaire contre le gel adaptée au climat. Sa généralisation est à l'étude.
Le bâchage a un coût. Des indemnités sont versées par les industriels. Mais selon les calculs de l'Asbs, elles paraissent inférieures aux coûts supportés par le planteur qui s'élèveraient à 44 cts la tonne. "Il y a sans doute une discussion interprofessionnelle à avoir avec les industriels sur ce sujet", a commenté Dominique Fiévez, président de l'Asbs. Tout en sachant que le paillage est une autre technique de protection, mais qui reste encore discutée.
ZOOM
La campagne 2012 dans la Somme en chiffres
• Avec 83,8 tonnes à 16 (86,2 tonnes en France), le rendement est en net retrait par rapport à l'année précédente.
• La tare terre s'élève en moyenne à 16,4% avec 67% de betteraves déterrées (il faut remonter à 2008 pour retrouver une valeur approchante : 15,4%). Compte tenu des différentes pratiques
et références des industriels, le coût du déterrage pour le planteur varie de 50 à 65 cts la tonne, et le coût total de la terre s'élève à 38 cts à Ste Emilie, 49 cts pour le secteur Abbeville, 57 cts à Eppeville, 65 cts à Roye et 69 cts à Boiry. Comme quoi les systèmes sont plus ou moins favorables aux planteurs, celui de Ste Emilie est le moins coûteux alors que la tare terre est plus forte, mais cela devrait changer à l'avenir.
• La tare collet remonte à 9,9% contre 8,5% en 2011, ceci étant du en partie au fait que les betteraves avaient davantage de gros collets et beaucoup de feuilles.
• 38 540 ha de betteraves ont été récoltés (39 070 en 2011), soit 3,2Mt qui ont permis d'honorer tous les contrats. Les parts de quotas et de betteraves destinées à l'industrie sont respectivement de 58% et 38% pour Tereos, 79% et 16% pour Saint Louis Sucre, 85% et 12% pour SVI.
• Le supplément de prix (partage entre le planteur et l'industriel de la valorisation du sucre au-delà du prix de référence européen), à rajouter aux
25 euros/t, est de 12,32 euros chez Tereos, 12,35 euros chez Saint Louis Sucre et 5,31 euros chez SVI, et ce pour les ventes de sucre 2011. L'an prochain, ce supplément de prix devrait encore être substantiel, de 8 à 14 euros selon les industriels.
• La marge brute moyenne (hors DPU), calculée par l'Asbs, atteint 2465 euros pour les coopérateurs Tereos (2203 pour les non coopérateurs), 2199 euros pour les planteurs de Roye et 1947 euros pour les planteurs de Ste Emilie.
• On compte 2 975 planteurs dans la Somme.