Arboriculture
Des pratiques durables dans le vent
A la tête d’un verger créé par son grand-père à Fresnes-Mazancourt, dans le Santerre, Antoine Vanoye ouvrira son exploitation au grand public pour une première participation aux portes-ouvertes du réseau des vergers écoresponsables les 28 et 29 août.
A la tête d’un verger créé par son grand-père à Fresnes-Mazancourt, dans le Santerre, Antoine Vanoye ouvrira son exploitation au grand public pour une première participation aux portes-ouvertes du réseau des vergers écoresponsables les 28 et 29 août.
Ouvrir les portes de son verger aux consommateurs, ce n’est pas une première pour Antoine Vanoye puisque le producteur vend déjà une partie de sa production en direct. Ce qui l’est en revanche, c’est sa participation aux portes-ouvertes du réseau des vergers écoresponsables animé par l’association nationale pommes-poires (ANPP). Il espère ainsi «répondre à de nombreuses questions», et lancer sa saison de libre-cueillette. Les Vergers du Santerre sont partagés entre la production de pommes (10 ha) et de poires (5ha). La campagne 2021 démarrera avec une seule variété, la Delbar Estival. Les autres allées seront ouvertes un peu plus tard pour laisser le temps aux fruits d’atteindre leur maturité. La saison des poires devrait débuter le 8 septembre avec la variété Conférence, «ce qui est nettement plus tard que l’an dernier où nous avions commencé à récolter fin juillet», rappelle le producteur. Si Antoine Vanoye cultive jusqu’à 22 variétés, certaines se détachent par rapport aux autres : Jonagold et Boskoop pour les pommes, Conférence et Angelys pour les poires. D’ici quelques temps, l’arboriculteur espère aussi récolter des abricots : «On s’est lancé cette année en plantant quelques arbres. C’est lié au réchauffement climatique...», explique-t-il avec humour. Une façon de se diversifier et d’élargir son offre de fruits.
Lutte biologique
Lors des opérations portes ouvertes – une seconde opération est programmée le 25 septembre au Domaine de Moismont à Vron –, il s’agit pour l’ANPP de promouvoir sa démarche de production durable baptisée «vergers écoresponsables», et dont la traduction concrète est «la mise en place de méthodes de production respectueuses de l’environnement, de la biodiversité, tout en assurant l’équilibre économique». Aux Vergers du Santerre, la présence d’éléments qui leur valent d’être labellisés «vergers écoresponsables» est discrète, mais efficace. «La première exigence, explique Antoine Vanoye, c’est de n’utiliser que des produits homologués en France…»
Dans les allées de ses vergers, entre les arbres, il installe des pièges à phéromones et use du principe de confusion sexuelle pour empêcher les ravageurs (carpocapses) de s’attaquer à ses fruits. Favoriser la présence de typhlodromes dans ses parcelles lui permet de lutter contre la présence de certains acariens phytophages, comme l’araignée rouge. De manière à limiter l’impact des traitements sur l’environnement, il a opté pour la lutte biologique intégrée. Nichoirs pour chauve-souris, refuges pour les chrysopes sont également installés dans les arbres. Depuis 4 ans, Antoine Vanoye a investi dans une station de traitement de l’eau qui lui permet de «diviser les traitements par deux», assure-t-il. Se convertir au label Agriculture Biologique n’est en revanche pas prévu, ni souhaité par l’arboriculteur : «Il y a trois ans, j’ai essayé de me passer de solutions de synthèse. J’ai morflé…»
Tout ce qui est mis en œuvre n’est pas toutefois couronné de succès, comme cela est le cas cette année avec l’implantation de bandes de couverts mellifères : «J’ai semé un peu trop et les températures ne m’ont pas aidé, concède Antoine Vanoye. Mais je recommencerai…».
Des certifications multiples
Parmi les certifications et démarches engageantes pour les Vergers du Santerre, cette dernière détient le label Bee Friendly qui reconnait des pratiques qui respectent, favorisent et intègrent les pollinisateurs. La multiplication des cahiers des charges et démarches de certification l’effraie toutefois et l’interroge : «Chaque client veut ses propres garanties… On a le sentiment de participer à une course à l’échalote». S’il apprécie la démarche des «vergers écoresponsables», «c’est parce qu’il s’agit d’une démarche créée par les producteurs et qu’elle est reconnue», assure M. Vanoye. Depuis 2013, l’engagement dans la démarche «Vergers écoresponsables» donne en effet aux arboriculteurs français une équivalence de certification HVE 2. Comme lui, la totalité des adhérents de la coopérative Nelfruit – 13 producteurs, 180 hectares et une production de 5 000 tonnes par an – au travers de laquelle il vend l’autre partie de sa production sont également certifiés «vergers écoresponsables». Il y a quelques semaines, l’arboriculteur du Santerre a décroché le niveau 3 de la certification HVE, en passant par la voie B ; autrement dit celle qui nécessite d’avoir un pourcentage de SAU en infrastructures agroécologiques supérieur ou égal à 10% (ou un pourcentage de SAU en prairies permanentes de plus de 5 ans d’au moins 50%) et que le poids des intrants dans le chiffre d’affaires de l’exploitation n’excède pas ou soit égal à 30%. Une certification de plus pour laquelle il a reçu un visuel qu’il pourra afficher aux murs de son magasin avec les panneaux pédagogiques que lui a fourni l’ANPP pour ses portes-ouvertes.
Avec le gel, une estimation de récolte en chute libre pour la poire, légère hausse pour la pomme
Des pertes dans le Santerre aussi
Chez Antoine Vanoye, le gel a aussi causé quelques dégâts, même s’il s’estime «être épargné par rapport à d’autres. Au sein de la coopérative Nelfruit, d’autres producteurs sont plus touchés». «Avec mes fils, expliquait-il fin de semaine dernière, on a fait six nuits blanches pendant l’épisode de gel. On a brûlé des ballots de paille pour créer un écran de fumée, on a allumé des bougies, fait tourner notre éolienne… Finalement, on ne s’en sort pas trop mal puisqu’en pommes, j’estime que nous pourrons faire 90% de la récolte prévue». En poire, les choses sont différentes : «Je pense perdre 20% de la récolte estimée avant le gel. On a lutté tant qu’on a pu…» Ces pertes de production, le producteur samarien considère qu’elles seront «difficiles à récupérer et à répercuter sur le prix de vente.»