Des tweets et des vidéos contre l’agribashing
Installé dans la Sarthe (72), Étienne Fourmont réalise des vidéos sur Youtube et surfe sur les réseaux sociaux pour expliquer et défendre l’agriculture et l’élevage français. Rencontre en amont de sa participation à la table ronde organisée par les Jeunes agriculteurs de la Somme à l’occasion de leur assemblée générale, ce vendredi.
sur l’agriculture quand elle est dénigrée.
Pourquoi avoir accepté l’invitation des Jeunes agriculteurs de la Somme ? Dans quel état d’esprit vous y présentez-vous ?
En tant qu’ancien responsable national des Jeunes agriculteurs, j’ai beaucoup de plaisir à participer aux assemblées générales départementales quand on m’y invite. J’ai également trouvé le sujet et les autres intervenants intéressants. Nous allons vivre un moment d’échanges passionnants. Je viens pour parler de mon expérience, mais aussi pour écouter et discuter avec ouverture. Nous devons communiquer sur ce que nous faisons, sur notre métier. Plus nous occuperons l’espace, moins cela en laissera à nos détracteurs.
Pourquoi vous êtes-vous lancé dans la réalisation de vidéos sur le quotidien d’une ferme française, puis lancé sur les réseaux sociaux au point d’être suivi aujourd’hui par plusieurs milliers d’internautes et d’avoir enregistré près de 2,5 millions de vues ?
Je m’y suis mis à l’époque où j’étais administrateur chez JA national. Au départ, je parlais essentiellement de syndicalisme agricole, de la défense de notre métier. Je me suis vraiment pris au jeu en 2015, quand mon département (la Sarthe) a accueilli le congrès national des JA. J’étais chargé de tweeter pendant le congrès. J’ai ensuite continué à poster des messages, à répondre à des discussions quand je me suis trouvé face à des personnes qui parlaient d’élevage sans y connaître grand chose. L’inconvénient de Twitter est de ne permettre que des messages relativement courts. Les vidéos permettent d’explorer un sujet particulier et de montrer simplement la réalité de l’agriculture française, au travers du fonctionnement d’une ferme laitière, avec 80 hectares.
De quelle manière conciliez-vous ces activités d’ambassadeur de l’agriculture avec votre métier d’agriculteur sur une ferme d’élevage ?
Ce n’est pas facile (rires). Je ne dors pas beaucoup chaque nuit, j’ai des extinctions de voix, mais c’est avant tout un coup de main à prendre et une organisation. Je le vis comme un loisir. Le week-end, certains vont faire du vélo ou du football. Moi, je jette un coup d’œil sur les réseaux sociaux, je réponds aux interpellations et je fais mes vidéos.
Malgré vos efforts, avez-vous encore le sentiment d’être incompris par vos concitoyens ?
D’une manière générale, les messages que je reçois sont positifs. Cela doit tourner autour de 95 %. Les 5 % restants sont négatifs, agressifs, voire insultants, mais c’est aussi le propre des réseaux sociaux. Les réactions y sont parfois violentes. L’agriculture française n’est pas comprise par la société, d’où l’importance de communiquer, y compris sur les réseaux sociaux. C’est là où se trouvent les futurs consommateurs. Une part importante des jeunes ne s’informent que via ces outils. Si nous n’y sommes pas, d’autres prendront la place. Mais les choses sont en train de changer. De plus en plus d’agriculteurs s’y mettent et c’est tant mieux. C’est même génial !
Chacun doit-il prendre son courage à deux mains et se lancer dans la Twittosphère ou la grande communauté des utilisateurs de Facebook ?
On peut comparer cela à la prise de parole en direct. Certains aiment et sont à l’aise. Pour d’autres, c’est plus compliqué, parce qu’ils n’aiment pas ou parce qu’ils ne savent pas comment faire. Dans ce cas, on peut apprendre. Je participe régulièrement à des réunions pour partager quelques règles de base et des conseils. Les vidéos ne doivent pas être trop longues. Trente secondes pour délivrer un message, c’est bien. Ensuite, plus on pratique et plus on est à l’aise.
Communiquer régulièrement et intensément ne vous met pas à l’abri de comportements malveillants, comme vous en avez été victime il y a quelques semaines ?
J’ai effectivement eu de la visite sur mon exploitation, pendant la nuit du 31 décembre au 1er janvier. Des antispécistes sont venus taguer un mur de ma ferme, mais ils sont aussi allés chez un voisin et ils y ont fait plus de dégâts. À vrai dire, je me doutais bien que cela arriverait un jour, mais je m’en sors bien. Ce n’est pas la fin du monde et ce n’est pas pour cela que je vais arrêter. Au final, je ne suis même pas sûr que les gens qui sont venus chez moi avaient connaissance de ce que je fais sur les réseaux sociaux.
Au-delà du plaisir que vous éprouvez à communiquer sur votre métier, avez-vous le sentiment que cela participe à changer l’image du monde agricole auprès du grand public ?
J’ai plutôt l’impression que l’agribashing ambiant a tendance à diminuer. Ce n’est pas encore complètement flagrant, mais j’ai le sentiment que plus de gens ont compris qu’il ne servait à rien de taper sur l’agriculture. Dans les médias généralistes, on donne de plus en plus la parole à des agriculteurs et les messages sont plus positifs qu’ils ne l’étaient il y a encore quelques mois. Cela peut paraître long, mais je pense que les choses peuvent changer.
La communication via les réseaux sociaux a-t-elle vocation à remplacer le dialogue direct ?
Communiquer sur les réseaux sociaux est complémentaire de tout ce que l’on peut faire autrement. Il faut bien entendu continuer à ouvrir nos fermes, organiser des événements, parler dans différents médias, aller à la rencontre des consommateurs.