Don manuel : on déclare ou pas ?
Le don manuel consiste en la remise matérielle, de la main à la main, d’une chose mobilière, sans qu’aucun acte soit établi. Faut-il les déclarer ?
Principe
Le code civil prévoit que «tous les actes portant donation entre vifs seront passés devant notaire, dans la forme ordinaire des contrats ; et il restera minute, sous peine de nullité». Le don manuel est une exception au formalisme requis pour les donations. L’argent, les biens meubles, les objets d’art, les bijoux peuvent faire l’objet d’un don manuel et ne nécessitent aucun écrit. Il en est de même pour la remise d’un chèque ou un virement bancaire pour des parts de parts sociales, des actions ou des obligations du compte du donateur (celui qui donne) au donataire (celui qui reçoit). Toutefois, certaines banques exigeront un acte de donation notariée ou une déclaration de don manuel pour procéder au virement. En revanche, le don manuel ne peut pas porter sur un bien immobilier (terrain, maison, …) car un acte notarié est obligatoire dans ce cas. Cependant, des précautions doivent être prises pour réaliser ce que l’on veut. En effet, en cas de litige, le juge recherchera l’intention libérale du donateur, c’est-à-dire sa volonté réelle de donner.
Le don manuel consenti à un futur héritier (enfant par exemple) est toujours considéré comme une avance sur la succession à venir. Au décès du donateur, selon l’article 843 du code civil, l’héritier qui a bénéficié d’un don est soumis à l’obligation de rapport pour la liquidation de la succession, ce qui peut être délicat si celui-ci a servi à acheter un bien.
Don manuel et fisc
Une donation notariée est portée obligatoirement à la connaissance du fisc par le notaire. En revanche, le bénéficiaire du don manuel n’est pas tenu de le déclarer au fisc. Néanmoins, il devra le faire, au plus tard au décès du donateur, car si l’administration s’aperçoit de l’omission, elle exigera les droits, ainsi que les intérêts de retard et éventuellement des pénalités. A cet égard, il faut rappeler que les dons manuels sont taxés au même tarif que les donations notariées avec les abattements de droit commun. A savoir, chaque parent peut donner 100 000 E (biens immeubles et meubles) à chacun de ses enfants en franchise totale de droits soit 200 000 E lorsque le don est consenti par les deux parents, ce n’est pas forcément la meilleure formule. Pour les sommes d’argent, vous pouvez aussi profiter de l’exonération des «dons d’argent» à hauteur de 31 865 euros tous les quinze ans. Par contre, il faut le déclarer dans le mois qui suit la réception du chèque par le donataire. Quand il s’agit de dons d’argent, vous avez tout intérêt à le déclarer, cela évitera d’éventuels redressements.
Les sommes d’argent qui transitent par un compte bancaire, laissent des traces sur les relevés bancaires. Bien souvent, des sommes passent de compte à compte, notamment chez les personnes d’un «certain âge», quand elles arrivent en fin de vie. Attention, l’administration peut vérifier les écritures des six derniers mois sur le compte du défunt, au moment de la succession. Si des sommes ont transité, et qu’elles n’ont pas été déclarées, vous risquez un redressement avec des pénalités.
Si vous avez reçu un don manuel d’un parent, vous devez le déclarer au moment de la succession. Sachez que le fisc a six ans pour vous coller les droits, s’il retrouve l’existence de ce don qui n’a été déclaré. La déclaration du don auprès de l’enregistrement permet de pouvoir bénéficier tous les dix ans de la franchise d’impôt, et permet de figer la valeur du don à la date à laquelle il est consenti, peu importe si le bien donné a pris de la valeur par la suite. C’est le cas quand vous recevez des titres ou des parts sociales, vous pourrez ainsi justifier le prix d’acquisition, ce qui permettra d’éviter une taxation sur la valeur totale en cas de ventes des titres. Les valeurs ayant tendance à augmenter avec les années, on a toujours intérêt à déclarer le don le plus tôt possible. De même, quand le don sert à acheter un bien, il est préférable de déclarer le don au moment de sa réalisation.
Le fisc peut réclamer des droits de donation dans quatre cas, selon les articles 757 et 784 du code général des impôts. Le premier cas est celui du donataire, celui qui reçoit le bien, qui déclare son existence par écrit au fisc. C’est souvent le cas lorsque l’on dépose, par exemple, le formulaire auprès des services fiscaux. Le deuxième concerne les enfants qui ont déjà reçu un don manuel relativement ancien et que le donataire reçoit du même donateur une nouvelle donation notarié ou hérite. Le troisième vient du fait que le donataire révèle le don au fisc tardivement. Et c’est souvent litigieux, car le fisc et les juges n’ont pas forcément la même interprétation. Cela se découvre souvent au cours d’un contrôle fiscal. Dans ce cas, si la personne prouve les fonds par un don, le fics n’est pas en mesure de réclamer les droits correspondants. En clair, si vous recevez un don d’une personne, bien souvent sans lien de famille, et dont vous n’avez pas vocation à hériter de cette personne, vous pouvez garder le silence. Toutefois, il y a un risque : voir ses héritiers agir en justice s’ils découvrent le don que vous avez eu. Et le dernier, celui qui intervient suite à une décision judiciaire.
Formalisme
En ce qui concerne le formalisme, le donataire (celui qui reçoit) doit déclarer le don sur un imprimé spécifique Cerfa n° 2735 disponible dans les recettes des impôts ou sur www.impots.gouv.fr.
Il doit être déposé à la recette des impôts du domicile du donataire, accompagné des droits de donation éventuellement dus. Pour ceux qui veulent régulariser un ou (des) don (s) non déclaré, il est possible de le faire à la recette des impôts en apportant la preuve du don (talon de chèque). Dans ce cas, le délai de dix ans ne partira qu’à compter de l’enregistrement. Il convient de rappeler que la loi du 29 juillet 2011 avait instauré l’obligation pour les dons manuels de plus de 15 000 euros d’établir une déclaration dans le délai d’un mois. Si cette donation est réalisée par un notaire, c’est lui qui fait la démarche auprès de l’enregistrement.