Emmanuel Macron veut donner un second souffle aux Égalim
En l’absence de Salon de l’agriculture, le chef de l’État s’est rendu dans une exploitation agricole à Étaules (Côte-d’Or) le 23 février. À une semaine
de la fin des négociations annuelles, Emmanuel Macron s’est employé à tracer des perspectives pour pacifier les relations commerciales.
En l’absence de Salon de l’agriculture, le chef de l’État s’est rendu dans une exploitation agricole à Étaules (Côte-d’Or) le 23 février. À une semaine
de la fin des négociations annuelles, Emmanuel Macron s’est employé à tracer des perspectives pour pacifier les relations commerciales.
Porcs élevés sur paille et vendus en direct, rotations allongées avec introduction de légumineuses, haies pour favoriser la biodiversité, certification HVE 3 sur les rails... Près de Dijon (Côte-d’Or), la ferme d’Étaules, sélectionnée pour la visite d’Emmanuel Macron le 23 février, coche toutes les cases des «transitions» souhaitées par l’Élysée. Un cas d’école idéal pour que le chef de l’État rappelle la condition indispensable pour mener à bien ces évolutions : «Donner de la visibilité» aux producteurs. Une semaine avant la fin des négociations commerciales annuelles – particulièrement tendues cette année –, la répartition de la valeur était au cœur du déplacement présidentiel. «Aujourd’hui même, des grands distributeurs demandent - 10 % à des producteurs de charcuterie», a dénoncé Emmanuel Macron lors d’une table ronde réunissant des acteurs des filières alimentaires. «On se fiche du monde», a-t-il tonné, considérant que «ceux qui ne jouent pas le jeu ont un train de retard» sur les attentes des consommateurs.
La filière laitière mise en avant
Au-delà de cette saillie verbale, les échanges ont été marqués par un ton policé, contrastant avec l’ambiance délétère des négociations commerciales. La part belle a été faite à la filière laitière, qui «fait partie des filières qui me rendent optimiste», considère Emmanuel Macron, avec des initiatives vertueuses, comme celle de l’APBO (association des producteurs laitiers Bel de l’Ouest). En 2018, ses 170 éleveurs ont proposé à leur collecteur un cahier des charges visant une plus juste rémunération des producteurs, des vaches ayant accès au pâturage et nourries sans OGM. La contrepartie ? Un prix de base de 350 E/1 000 l, assorti de 21 E de primes. Mais la filière laitière reste «loin de l’objectif», déplore Marie-Thérèse Bonneau, vice-présidente de la FNPL (producteurs de lait, FNSEA) : «Les indicateurs de coût de production ne sont soit pas utilisés du tout, soit utilisés pour une partie minimale des échanges.»
Emmanuel Macron s’est employé à tracer des perspectives pour pacificier les relations commerciales. Un chantier basé sur le triptyque «plus grande transparence», «visibilité» et «parachèvement de l’organisation des producteurs». «On va l’accompagner avec des changements de loi, j’y suis tout à fait ouvert», a-t-il lancé. M. Macron a ouvert la question de la «compatibilité entre certaines dispositions de la loi dite LME (Loi de modernisation de l’économie de 2008, ndlr) et la loi Égalim». Promulguée en 2008, la loi LME a assoupli la négociation des prix et services entre les centrales d’achat des grandes surfaces et leurs fournisseurs «On doit passer une étape supplémentaire (…). Le ministre [de l’Agriculture] aura à proposer cela», a déclaré le chef de l’État. Selon Michel Biéro, directeur exécutif achats de Lidl France, «la loi Egalim, où l’on part des prix à la production, ne peut pas coexister avec la LME, où l’on part de tarifs et on négocie des services».
«Ce qu’a dit Serge Papin, on va le faire»
«Il faudra peut-être aménager la LME pour rendre les indicateurs de coût de production incontournables», ajoute l’ancien patron de Système U Serge Papin. L’ex-distributeur, missionné par le ministre de l’Agriculture pour renforcer la mise en œuvre de la loi Égalim, a rappelé les trois pistes qu’il proposera dans son rapport d’ici fin avril : faire figurer les indicateurs de coût de production dans les contrats commerciaux ; accroître la transparence avec un tiers de confiance («Ce n’est pas facile, monsieur le président...») ; et développer la contractualisation pluriannuelle et tripartite. «Ce qu’a dit Serge Papin, on va le faire», a répondu Emmanuel Macron, indiquant que le ministre de l’Agriculture a «commencé à travailler dessus avec Bercy».