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Endive : rajeunir le coeur de cible pour stopper la baisse de clientèle

Le nombre d'endiviers est passé sous la barre symbolique des 500 producteurs. Il n'en reste plus que 442 en Nord-Picardie.

© D R

Encore une année très compliquée pour la filière endivière, avec des voyants qui sont passés pour la plupart au rouge vif : les surfaces reculent, le nombre de producteurs atteint la cote d'alerte, les ventes dégringolent et la gouvernance de la filière est (pour l'instant) en panne. C'est le constat amer réalisé lors de l'assemblée générale de l'AOP endive, qui s'est tenue le 27 mai dernier à Arras.

Baisse de 6 % des surfaces emblavées depuis 2009
«D'après le relevé des déclarations de bacs qui a été repris depuis le début de la campagne 2013, on constate une baisse importante des surfaces depuis l'an dernier», a indiqué Frédéric Le Vigoureux, directeur de l'Apef. Depuis 2009, les surfaces emblavées ont reculé de 6 %, avec une accélération du phénomène lors de la dernière campagne (- 2,6 % par rapport à la campagne 2012-2013). «Cela s'explique principalement par les arrêts d'exploitation», précise le directeur de l'Apef.
D'ailleurs, le nombre d'endiviers est passé sous la barre symbolique des 500 producteurs : on n'en compte plus que 492 dans toute la France dont 338 dans le Nord-Pas de Calais (69 %) et un peu plus d'une centaine en Picardie (21 %).
La région reste le premier bassin de production tant en termes de surfaces que de volumes produits (62 %). Elle est suivie de la Picardie, qui produit deux fois moins d'endives, avec seulement 30 % des volumes. Réunies, celles-ci représentent 92 % de la production nationale, loin devant la Bretagne (4 %).

«Une année exceptionnellement mauvaise à partir de janvier»
Après une première moitié de campagne plutôt stable pour l'endive, le produit est entré en crise dès la fin janvier. Les cours enregistrés sont à des niveaux très faibles en raison notamment d'une sous-consommation en rayon pour tous les légumes d'hiver.
La comparaison avec les niveaux de la fin d'hiver et du début de printemps de la campagne précédente fait apparaître une baisse sur les ventes, de 15 à 20 %, voire même de 30 % pour certaines enseignes. Les seuils de crise régulièrement atteints en février et mars ont été plus précoces pour la campagne en cours.
Malgré la mise en oeuvre d'opérations volontaires de régulation de marché, les retraits et les destructions de produits ne sont pas parvenus à rétablir l'équilibre des prix à l'expédition. «La météo a exacerbé la concurrence avec les autres produits, précise Frédéric Le Vigoureux. Les campagnes radio, les promotions, les opérations de dégagements, ainsi que les dons aux banques alimentaires n'ont pas permis d'inverser la tendance». Selon lui, «l'endive doit trouver sa place dans les rayons en pleine campagne».
Les derniers bilans de consommation démontrent que «les consommateurs ont été aussi nombreux que l'année passée et qu'ils ont acheté un peu plus souvent de l'endive entre septembre 2012 et août 2013». D'où des volumes en légère progression par rapport à l'année précédente mais toujours en recul par rapport à la moyenne triennale. «Nous avons des difficultés à trouver des relais auprès des consommateurs, analyse le directeur de l'Apef. L'enjeu pour la profession est de parvenir à rajeunir son coeur de cible pour ainsi stopper la baisse de clientèle qui atteint 76 % pendant la période, soit une diminution de 5 points en trois ans».

Échec de l'accord interprofessionnel sur la qualité
En juillet dernier, le conseil d'administration de l'AOP endive avait proposé la mise en place d'un accord interprofessionnel pour une longueur relative d'axe inférieure ou égale à 75 % sans tolérance. Il s'accompagnait notamment d'un plan opérationnel de surveillance de la qualité. «Ce projet n'a pas pu aboutir pour des raisons statutaires, regrette Frédéric le Vigoureux. Il aurait pu donner un nouvel élan collectif à la filière».
Une OP détenant plus de 15 % des voix a exercé sa minorité de blocage. Cette organisation souhaitait la mise en place d'un cahier des charges plutôt que d'un accord interprofessionnel, en soulignant qu'il lui manquait des éléments pour accepter le document en l'état. Ce revers a des conséquences importantes pour la filière endivière, puisque l'amélioration de la qualité du produit reste la condition sine qua non pour financer des campagnes de promotion de l'endive.
«Dans l'immédiat, l'Apef réfléchit à des solutions plus pédagogiques, confie le directeur. Nous avons lancé un travail expérimental et opérationnel avec le soutien de plusieurs OP sur la formation du prix et la première mise en marché qui devrait donner ses premiers résultats en septembre prochain». Pour l'heure, l'AOP endive reste en panne.

«Les jeunes doivent créer une nouvelle dynamique»
Pour autant, tout n'est pas perdu. Il subsiste encore quelques lueurs d'espoir : d'abord, la mise en place du groupe des Jeunes producteurs qui s'étoffe. Celui-ci a vocation à porter les projets et à donner le ton à la filière : «On attend de ce groupe de jeunes qu'il crée une nouvelle dynamique», insiste Catherine Decourcelle, la présidente de l'Apef. Et de poursuivre «Ce sont les responsables de la filière de demain. C'est avec eux qu'il faut maintenant bâtir un avenir pour l'endive, avec plus de sérénité, plus de conviction, plus d'ambitions, plus d'écoute et de tolérance. Nous devons redonner à notre produit sa juste valeur et ses qualités qui font sa réputation dans les rayons».
Cette dernière souhaiterait également que les producteurs indépendants s'investissent davantage au sein de l'Apef. «Eux aussi doivent être des moteurs pour la filière», affirme-t-elle.
Enfin, l'arrêt de la Cour d'appel de Paris va permettre aux endiviers de tourner la page après sept années de procédures. Le délibéré blanchit les endiviers des accusations d'entente sur les prix ; et reconnaît les spécificités, en matière de droit de la concurrence, d'un secteur agricole soumis à des particularités de marché. «Nos organisations agricoles devront y donner suite, pour que tous les acteurs des filières, en collaboration avec les ministères concernés, puissent rendre lisible et juridiquement sans faille la nature de ces aménagements», prévient Catherine Decourcelle. Avant de conclure : «Nous espérons que ces bonnes nouvelles permettront de reconstruire rapidement un collectif fort et solide autour du produit, et que la confiance et l'optimisme des producteurs, mis à mal par ce procès, reviendront».

De nouvelles variétés sur le marché d'ici 2 à 3 ans

«Depuis cinq ans, les surfaces emblavées de Carmine sont en baisse de 44 %, même si le nombre de producteurs s'est stabilisé lors des trois dernières campagnes», indique Frédéric Le Vigoureux, directeur de l'Apef.
La baisse des volumes en production est estimée à 250 tonnes (t) pour la campagne 2013 contre 573 t l'année précédente, soit un recul de plus de 50 % de la production sur un an. «La Carmine traverse une phase difficile, toujours à cause de problèmes en matière de multiplication de semences, explique-t-il. Les professionnels espèrent néanmoins retrouver, d'ici deux à trois ans, des graines de qualité». Ces derniers ont en effet consacré d'importants moyens pour la mise au point de nouvelles variétés conformes au cahier des charges. «Ce programme de recherche, financé par les producteurs de Carmine via des cotisations spécifiques, est toujours considéré comme prioritaire dans le cadre de la diversification de l'endive», précise le directeur de l'Apef.

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