Entreprise : la «Touch’Agri» de Céline Buisset et Lucas Dernoncourt
Tous deux passionnés d’agriculture, Céline Buisset et Lucas
Dernoncourt ont monté une agence de communication pour
le monde agricole.
C’est du côté de l’envie de faire quelque chose pour les agriculteurs qu’il faut chercher pour comprendre pourquoi Céline Buisset, animatrice syndicale chez JA 80, et Lucas Dernoncourt, analyste économiste dans un cabinet parisien, se sont lancés, il y a un an, dans la création d’une agence de stratégie en communication des producteurs locaux. Les boîtes de communication, ce n’est pourtant pas ce qui manque. Mais des boîtes spécialisées dans la communication des producteurs locaux, vous pouvez chercher, vous n’en trouverez pas.
Ce sont à ces producteurs, qui produisent et commercialisent différemment, que ce duo a décidé de proposer ses services pour les aider à se faire connaître et toucher directement leur cible. «La communication est incontournable au développement d’un produit ou d’un service. Elle est pourtant sous-estimée, voire ignorée dans le monde agricole. Or, les consommateurs sont à portée de main, mais ne connaissent pas toujours les producteurs locaux et leurs produits», relève Céline Buisset.
Pour sortir de cette quadrature du cercle, et «faire entrer la communication dans les exploitations, car leurs exploitations, c’est leur vie», dit-elle, les deux acolytes proposent leur «touche» personnelle aux agriculteurs, comprenez une communication sur-mesure et atypique, pour que ces derniers puissent ensuite toucher leur clientèle. Avec ces objectifs-là, le nom de leur agence s’est imposé de lui-même : Touch’Agri. Portée sur les fonts baptismaux en mars 2018, l’agence de communication fêtera son premier anniversaire le mois prochain.
Gagner en visibilité
Petit retour en arrière. Lucas ne connaissait rien au monde agricole jusqu’à ce qu’il vienne faire un stage de fin d’études, dans le cadre de son master d’économie sociale et solidaire, chez les JA de la Somme. Céline, elle, est née dedans. Fille d’agriculteurs, et en contact permanent avec cette profession au sein des JA de la Somme, le monde agricole n’a pas vraiment de secret pour elle. Issus de milieux différents, Céline et Lucas tirent pourtant le même constat : les agriculteurs ne parlent pas de ce qu’ils font alors qu’ils ne manquent pas de projets et font des produits de qualité. Certains aimeraient bien se lancer dans la communication, mais ne savent pas comment faire. Aussitôt le constat posé, Céline lance l’idée de monter une boîte de communication exclusivement orientée sur cette thématique. Lucas n’y voit aucune objection. Son stage se termine. Chacun garde cette idée en tête, puis trace son chemin.
Le déclic viendra d’un agriculteur, qui demande un coup de main en communication à Céline pour le lancement de son nouveau produit local sur le marché, en février 2018. De quoi confirmer l’intuition première qu’elle a eue. Ne reste plus qu’à transformer l’essai en s’attelant à la construction du projet d’entreprise. Durant un week-end, Céline et Lucas vont plancher sur la question, façon brainstorming. Les idées fusent autour des deux problématiques qui vont constituer leur offre : les besoins réels des agriculteurs en matière de communication et ce qui peut leur être proposé.
La répartition des rôles est vite trouvée. A Lucas, les chiffres, les graphiques, les statistiques, les analyses de marchés et de concurrence, la gestion. A Céline, la partie créatrice de la communication, autrement dit le choix des outils qui permettront aux agriculteurs de gagner en visibilité. Mais leurs tâches respectives tendent vers le même objectif : permettre aux agriculteurs de s’affranchir des intermédiaires et reprendre la main sur leurs produits, de leur production à leur commercialisation.
Si les outils de communication s’avèrent classiques (dépliants, logo, site internet, réseaux sociaux, mailings, banderoles, affiches, cartes de visite, etc.), leur mise en place est définie à partir d’une analyse fine de l’exploitation, des marchés potentiels, de la concurrence et des besoins de l’agriculteur. Plus qu’un «kit» tout prêt, c’est un accompagnement que propose leur agence, voire des formations pour que leurs clients puissent se familiariser avec l’ensemble des outils retenus. Et si les agriculteurs décident ensuite de réaliser leur communication eux-mêmes, c’est en leur pouvoir.
Le choix du partenariat
«Ce n’est pas une relation fournisseur-client que nous établissons, mais plutôt un partenariat. D’une part, parce qu’ils ne sont pas obligés d’être dépendants de nous. D’autre part, parce que nous réfléchissons ensemble à l’histoire de leur exploitation et confrontons notre vision du monde», explique Lucas. Inutile de dire que cette confrontation peut parfois décoiffer l’agriculteur ou les deux compères. «Ce qui est difficile, parfois, pour certains, c’est lorsque nous leur demandons de nous dire tout de leur exploitation et de mettre carte sur table. Ce n’est pas toujours évident pour eux, mais c’est le seul moyen pour construire avec eux un projet qui leur ressemble et qui puisse également toucher la clientèle visée», ajoute Céline.
Reste que, pour que la mayonnaise prenne, «on a besoin d’être emballés. Si le projet ne nous plaît pas plus que cela, on ne pourra pas y travailler dessus», reconnaît-elle. C’est aussi cela être partenaire, être convaincu de part et d’autre de pouvoir marcher ensemble sur un même chemin. Démarche atypique, mais pour la bonne cause, celle de l’agriculture.