Gérard Clay : «Les trois piliers de Tereos ne changeront pas»
Meneur de la contestation d’une partie des coopérateurs sur la stratégie de Tereos, Gérard Clay est le nouveau président du conseil de surveillance du groupe. Avec un objectif : redresser la barre.
Meneur de la contestation d’une partie des coopérateurs sur la stratégie de Tereos, Gérard Clay est le nouveau président du conseil de surveillance du groupe. Avec un objectif : redresser la barre.
Le 18 décembre, la décision du tribunal de Senlis, qui a maintenu dans leurs fonctions trois nouveaux membres du conseil de surveillance, est tombée comme un point final à la crise de gouvernance traversée par le groupe sucrier depuis 2017. Parmi les trois concernés, Gérard Clay, installé à Brias (Pas-de-Calais), a été élu président de la coopérative sucrière le soir-même.
Dans quel état d’esprit étiez-vous avant le verdict ?
Je n’ai jamais douté. La justice est là pour préserver la démocratie. Hélas, chez Tereos, il aura fallu que la première se prononce pour que puisse s’exprimer la seconde. Mais tout ceci est derrière nous. Nous allons à présent travailler pour l’ensemble des coopérateurs et des élus.
Quelles seront vos premières actions ?
Les trois piliers de Tereos sont le sucre de betterave en France, la diversification canne et l’amidon, ils ne changeront pas. Nous voulons vivre ce changement de gouvernance comme un atout pour les coopérateurs de la région, et remettre en place une profitabilité pour renforcer la pérennité de notre coopérative.
En parallèle, nous allons réaliser dès ce mois de janvier un audit pour faire le point sur les comptes de la coopérative. Nous le réclamions depuis des années. Il sera réalisé par un organisme externe pour avoir une vue objective de nos finances, et de nos activités industrielles. Les résultats, qui tomberont fin mars, nous éclaireront sur les décisions à prendre. Enfin, nous allons lancer un chantier de gouvernance.
Qu’entendez-vous par là ?
Tereos est une coopérative, elle doit rester l’outil des agriculteurs. Ses membres doivent être tenus au courant des bonnes nouvelles comme des mauvaises. Cela n’a pas été le cas ces dernières années, où l’entreprise avait - par exemple - tendance à communiquer sur ses résultats en termes d’Ebitda (un indicateur des résultats économiques américain, qui se rapproche de l’excédent brut d’exploitation (EBE, ndlr), alors que seul compte le résultat net.
Il faut donc repenser cette gouvernance, et le rôle des élus. Il faut que les coopérateurs se sentent proches d’eux, et que ces élus conseillers de région se sentent à leur tour proches du conseil de surveillance. La communication entre ces différentes strates va dans le sens de l’intérêt général. Le conseil de région ne doit pas se contenter d’être une caisse d’entérinement de décisions venues d’en haut. Il faut revoir le fonctionnement des commissions qui alimentent les débats des conseils de région, qui alimentent à leur tour le conseil de surveillance. Il faut communiquer aux coopérateurs, propriétaires de la coopérative, une vue d’ensemble de son fonctionnement.
Comment comptez-vous vous y prendre ?
Par une éventuelle modification des statuts. L’entreprise doit-elle rester sous le statut d’un conseil de surveillance, ou passer sous le régime du conseil d’administration ?
Il appartiendra à l’ensemble des élus et des coopérateurs de répondre à cette question. Ensuite, il y aura d’autres sujets à aborder, comme notamment notre proposition d’avoir des élus dans toutes les filiales du groupe, y compris à l’international, ce qui n’est aujourd’hui pas le cas.
Y aura-t-il des fermetures d’usines ?
La situation des différentes activités du groupe sera évaluée par l’audit. Néanmoins, aucune fermeture n’est prévue en France. La première mission de Tereos est de travailler les produits agricoles de ses coopérateurs. Il faut tout faire pour que les usines soient rentables. Il y va de l’intérêt de tous de les saturer.
Quelle sera votre stratégie vis-à-vis des 2,5 milliards de dette ?
La dette ne sera plus un sujet d’inquiétude quand on aura trouvé de la profitabilité au sein du groupe. Aujourd’hui, elle est insuffisante. Il faudra notamment travailler sur le prix des betteraves, et des dividendes, qui, jusqu’ici, venaient suppléer au déficit de rentabilité. Mais tout cela ne va pas se faire d’un coup de baguette magique. Il y a beaucoup d’efforts à faire pour retrouver de la profitabilité.
Y aura-t-il des investissements en France ?
Il y a des projets de modernisation. Des efforts ont déjà été faits. Nous irons au rythme des moyens disponibles. Nous vivons une phase de redressement de notre coopérative, il faut regarder vers l’avenir. Je veux encourager les producteurs à maintenir leurs surfaces dans les zones à fort potentiel que sont la France et notamment la grande région Nord. Tereos doit tirer son épingle du jeu en Europe vis-à-vis de la commercialisation du sucre et de l’éthanol. La culture de la betterave a tout son potentiel là où Tereos a des usines.