Grande distribution : les éleveurs se fâchent
Les éleveurs de la somme manifestent contre les marges excessives que la grande distribution pratique sur les produits issus de l’élevage.
Samedi dès 6h du matin, près de 200 agriculteurs ont bloqué les entrées des grandes surfaces et déversé de la paille sur les parkings des supermarchés à Abbeville, Doullens, Amiens et Péronne. Cette action conduite à l’initiative de la Fdsea, des JA, et de l’Uplp, visait neuf magasins représentant huit enseignes différentes.
120 courriers avaient été envoyés aux directeurs des grandes surfaces du département en début de mois demandant une explication sur les prix de vente aux consommateurs et un rééquilibrage des prix d’achat des denrées que les éleveurs produisent (voir AAP du 8 février). Seules quelques réponses ont été données. Les agriculteurs ont donc décidé de mener des actions coup de poing pour se faire entendre. Etaient ciblés, les magasins qui n’avaient pas répondu aux courriers. «Les grandes surfaces nous mettent sur la paille toute l’année, aujourd’hui c’est nous qui vous mettons sur la paille», «Les grandes surfaces s’engraissent sur le dos des éleveurs», ont lancé les agriculteurs aux directeurs des supermarchés.
Les manifestants sont partis à l’ouverture des magasins vers 8h30, ce qui a permis de nettoyer les abords et d’ouvrir peu de temps après leur départ. «Notre objectif est d’alerter la grande distribution, pas de tout casser, ni d’empêcher les consommateurs de faire leur courses», a expliqué Armand Paruch, secrétaire général des JA. A Abbeville, les supermarchés ont été bloqués jusqu’à 10h.
2012 a été une année très difficile pour les éleveurs. Les coûts de production ont flambé et les prix d’achat des produits ne permettent pas de répercuter cette hausse. Actuellement, les négociations commerciales entre transformateurs et distributeurs battent leur plein. Elles doivent se terminer fin février. C’était donc le moment pour les agriculteurs de mettre «un coup de pression» à la distribution afin qu’elle passe les hausses demandées par les industriels.
Les éleveurs asphyxiés
Le monde agricole veut qu’elle «baisse ses marges en faveur des exploitants sans répercussion sur le consommateur». Cela est possible indique Olivier Thibaut, vice-président de l’Uplp. Il précise : «il faut deux à trois ans à un éleveur pour qu’un bovin produise du lait et gagne sur ce produit 8 euros sur les 100 euros dépensés par le consommateur, alors que les grandes surfaces n’ont besoin que de quelques heures pour mettre les produits en rayon et les vendre et cela leur rapporte 21 euros. Ce n’est pas normal ! Si les marges étaient rééquilibrées, le monde agricole se porterait beaucoup mieux». Cette action dans les grandes surfaces n’est pas la dernière puisque les éleveurs ont décidé de continuer jusqu’à avoir satisfaction. «Nous utiliserons tous les moyens pour nous faire entendre et obtenir une revalorisation de nos produits» a souligné Françoise Crété, secrétaire générale de la Fdsea. Affaire à suivre.
REACTIONS
Dominique Dengreville, Président de l’Uplp
«Restons mobilisés»
«Merci de cette mobilisation en masse. Plusieurs directeurs de magasins nous ont proposé une rencontre, ou nous ont dit qu’ils allaient faire remonter l’information à leur hiérarchie. Un pas en avant est fait. Néanmoins, ce n’est pas terminé. Nous poursuivons notre action cette semaine pour obtenir une augmentation de nos prix d’achats. Nous devons aussi rencontrer le préfet pour lui demander d’organiser une table ronde entre les grandes surfaces, les transformateurs et les éleveurs».
Marc Hossart, président des JA
«Opération réussie»
«Samedi matin, vous étiez nombreux à vous mobiliser pour pailler les parkings. Merci aux éleveurs et aux non éleveurs de votre mobilisation. Cette action souligne, une fois de plus, la solidarité dans le département entre les productions. Elle manifeste également la situation alarmante des élevages. Notre action a été un succès puisque nous avons perturbé l’ouverture des magasins. La grande distribution et également le public ont été alertés de notre détresse. Je n’ai qu’une chose à vous dire : bravo et encore merci pour votre mobilisation».