Hypothèques sur le libre-échange
Les tendances protectionnistes de Donald Trump inquiètent l’Asie-Pacifique, et leur éventuelle généralisation en Europe préoccupe le Mercosur.
Donald Trump a confirmé le 21 novembre que, dès son premier jour à la Maison Blanche, le 20 janvier 2017, il engagerait le retrait des Etats-Unis du traité commercial transpacifique (TPP), signé en février dernier par les douze pays de la région à l’exclusion de la Chine, mais pas encore approuvé par le Congrès américain dominé par les Républicains.
A la place de «ce désastre potentiel pour notre pays, a-t-il dit, nous négocierons des traités commerciaux bilatéraux et justes qui ramèneront les emplois et l’industrie sur le sol américain.»
Cette hypothèque a, bien entendu, quelque peu assombri le sommet de la Coopération économique pour l’Asie-Pacifique (Apec), qui s’est clôturé le 20 novembre à Lima, en présence de Barak Obama. Et a donné l’occasion au président chinois, Xi Jinping, de manifester son ambition de faire de Pékin le leader des négociations de libre-échange dans cette partie du monde.
UE/Mercosur
Le protectionnisme inquiète également le Mercosur, dont les pourparlers commerciaux avec l’Union européenne viennent d’être relancés. L’accord entre l’Union et le marché commun du Sud (Argentine, Brésil, Paraguay, Uruguay, le Venezuela ne participant pas aux discussions) «pourrait être atteint en 2018 en fonction des résultats des élections en Europe», vient ainsi de pronostiquer prudemment Carlos Marcio Cozendey, sous-secrétaire général aux affaires économiques et financières au ministère brésilien des Affaires étrangères. Sa crainte : la victoire de partis nationaux hostiles au libre-échange lors des scrutins qui se dérouleront notamment aux Pays-Bas, en France et en Allemagne l’année prochaine.
TTIP
Quant au TTIP, la chancelière allemande Angela Merkel a reconnu le 17 novembre, à l’occasion de la visite d’adieu de Barack Obama, que l’accord commercial entre l’Union européenne et les Etats-Unis (TTIP) ne pouvait être conclu en l’état, alors que l’élection de Donald Trump laisse présager une politique commerciale protectionniste. «Je me suis toujours beaucoup investie pour la conclusion d’un accord de libre-échange avec les Etats-Unis. Nous avons bien avancé dans les négociations mais, maintenant, elles ne peuvent être conclues», a-t-elle déclaré, se disant toutefois sûre qu’un jour on pourra y revenir.
«Ce qui nous unit, c’est la conviction commune que la mondialisation doit être organisée humainement, politiquement, mais qu’il n’y a pas de retour possible au temps d’avant la mondialisation», a souligné la chancelière allemande, qui a annoncé le 20 novembre sa candidature pour un quatrième mandat lors des élections législatives de septembre 2017.
Ceta
Par ailleurs, le Parlement européen a rejeté le 23 novembre, par 419 voix contre 258 et 22 abstentions, la demande de 89 députés de renvoyer l’accord économique et commercial global avec le Canada (Ceta) devant la Cour de justice de l’Union européenne pour vérifier la conformité des dispositions relatives à la protection des investisseurs avec le droit des gouvernements à réglementer des objectifs légitimes de politique publique tels que la protection de la santé, la sécurité ou l’environnement.
Le service juridique de l’Assemblée n’avait pas trouvé de contradiction entre ces dispositions et les traités européens. L’accord bilatéral sera mis aux voix en commission parlementaire du commerce international le 5 décembre, et voté en plénière lors de la session du 12 au 15 décembre.
Qu’ils soient situés à l’extrême droite ou pas, les gouvernants actuels ou futurs partagent presque tous des tendances plutôt favorables au freinage des échanges internationaux. Déjà, en Europe, bon nombre d’industriels s’attendent à ce que les échanges commerciaux avec la Grande Bretagne soient rendus plus difficiles depuis le Brexit.