Indemnisation au fermier pour l'amélioration au fonds loué
Les travaux d'amélioration sur le fonds loué réalisés par le fermier sont encadrés par le statut du fermage suivant les articles L411-28, L411-29 et L411-73 du Code rural.
Rappel de ces travaux soumis à notification ou à l'accord exprès du bailleur.
Les travaux d'amélioration peuvent être prévus dans le bail initial ou lors de son renouvellement ou, encore, en cours de bail par la signature d'un avenant.
Quelle que soit la procédure qui s'applique, les travaux doivent présenter un caractère d'utilité certaine pour l'exploitation.
Travaux soumis à notification
La procédure de notification signifie que le preneur informe le bailleur de son intention de réaliser des travaux d'amélioration sur le fonds loué. Les conséquences et les modalités d'opposition du bailleur dépendent du type de travaux concernés, ils sont au nombre de huit. Pour les travaux énumérés ci-dessous, le fermier doit informer le bailleur par lettre recommandée avec accusé de réception, au moins deux mois avant la réalisation des travaux.
1) La suppression des haies, talus et arbres pour réunir des parcelles dans les limites du fonds loué. Pour ces travaux qui doivent permettre l'amélioration de l'exploitation, le silence du bailleur vaut accord à l'issue du délai de deux mois.
2) Le retournement de parcelles en herbe, la mise en herbe de parcelles de terre, la mise en oeuvre de moyens culturaux non prévus dans le bail : dans ces cas, le bailleur a la possibilité de s'opposer en saisissant le tribunal paritaire des baux ruraux dans les quinze jours à compter de la réception de la notification faite par le fermier par lettre recommandée avec accusé de réception. Le bailleur doit démontrer que les travaux entraînent une dégradation du fonds loué. Il est à noter qu'aucune indemnité ne peut être réclamée par le preneur au titre des travaux réalisés, sauf accord entre les parties.
3) Les travaux d'amélioration de la maison d'habitation destinés à adapter le logement aux normes de salubrité, de sécurité et de confort.
4) Les travaux d'amélioration des bâtiments d'exploitation existants relatifs à l'installation de l'eau et de l'électricité, à la protection du cheptel dans des conditions de salubrité à la conservation des récoltes et des éléments fertilisants organiques.
5) Les ouvrages incorporés au sol lors de participation à des opérations collectives d'assainissement, de drainage et d'irrigation, ainsi que les travaux techniques assurant une meilleure productivité des sols sans changer leur destination naturelle.
6) Les travaux dont la durée d'amortissement ne dépasse pas plus de six ans la durée du bail, autres que ceux concernant les productions hors sol ainsi que les plantations.
7) Les plantations, les constructions de bâtiments hors sol et les unités de méthanisation. Ces trois cas entraînent la même procédure que précédemment, c'est-à-dire que le fermier doit notifier sa proposition au bailleur. En cas de refus du bailleur ou à défaut de réponse, le preneur peut saisir le tribunal paritaire des baux ruraux qui peut, le cas échéant, les autoriser, à moins que le bailleur ne décide de les exécuter à ses frais ou à défaut par le tribunal paritaire.
8) Les travaux de mise aux normes imposés par l'autorité administrative. Le preneur notifie au bailleur la proposition de réaliser les travaux. Le bailleur peut décider de les prendre en charge dans un délai fixé en accord avec le fermier. En cas de refus ou de non-réponse dans les deux mois, le preneur est réputé disposer de l'accord du bailleur pour réaliser les travaux.
Travaux soumis à autorisation du bailleur
Le preneur ne peut construire ou faire construire un bâtiment d'habitation sur un bien loué s'il n'a pas obtenu au préalable un accord écrit du bailleur. Il exécute alors les travaux à ses frais et supporte les impôts et les taxes afférents au bâtiment construit. Si le bailleur refuse la construction, aucune saisine du tribunal paritaire n'est possible.
Tous les travaux d'amélioration non visés par une procédure spécifique entrent dans une procédure qui fait appel à un comité technique départemental placé sous la présidence du commissaire de la République ou de son représentant et de cinq membres de la profession agricole. Ce comité émet un avis motivé qui prend en considération l'utilité économique et technique, les améliorations apportées par les travaux apportés au fonds loué, ainsi que les aspects environnementaux. Il s'agit de tous les autres travaux non cités précédemment. Le fermier notifie sa proposition au bailleur ainsi qu'à un comité technique départemental. Le bailleur peut décider d'exécuter à ses frais les travaux dans un délai fixé en accord avec le preneur. S'il refuse ou s'il ne répond pas dans les deux mois de la notification, le preneur en informe le comité technique départemental qui dispose d'un délai de deux mois pour rendre son avis.
Le preneur peut exécuter ou faire exécuter les travaux si aucune opposition à un avis favorable du comité n'a été formée par le bailleur auprès du tribunal paritaire.
Quelles indemnités peut prétendre le fermier aux travaux réalisés ?
Selon l'article L 411-69 alinéa 1 du Code rural, le preneur qui a apporté des améliorations au fonds loué a droit à l'expiration du bail à une indemnité due par le bailleur, quelle que soit la cause qui a mis fin au bail, peu importe qu'il s'agisse d'une résiliation pour faute du preneur ou d'un refus de renouvellement. Ce qui signifie que tous les travaux ou investissements qui modifient le fonds loué sont indemnisables au jour où le bail prend fin. En cas de litige, le juge a la possibilité d'accorder au bailleur des délais de paiement.
Les règles d'indemnité sont d'ordre public. Les clauses ou conventions ayant pour effet de supprimer ou de restreindre les droits du fermier sont réputées non écrites. Par exemple, le preneur qui a obtenu l'autorisation écrite de son bailleur pour construire un hangar à la condition de ne rien réclamer à l'expiration du bail est quand même en droit de prétendre à une indemnité.
Tous les travaux ou investissements qui modifient matériellement le fonds loué et lui apportent une plus-value sont indemnisables : agencement et amélioration des bâtiments existants, constructions neuves, travaux excédant l'entretien normal, plantations, drainage, irrigation... En revanche, la jurisprudence refuse d'indemniser les serres démontables.
En principe, pour percevoir une indemnité, le preneur sortant doit avoir respecter les procédures préalables à la réalisation des travaux, prévues par le Code rural. La part des travaux dont le financement a été assuré par une subvention ne donne pas lieu à versement d'une indemnité.
Les règles de calcul des indemnités dépendent des motifs qui mettent fin au bail. Le statut du fermage distingue la fin du bail suite, à l'exercice du droit de reprise par le propriétaire et la fin du bail pour un autre motif.
En cas d'exercice du droit de reprise par le bailleur, l'indemnité est égale à «la valeur au jour de l'expiration du bail des améliorations apportées compte tenu de leurs conditions techniques et économiques d'utilisation». Ainsi, on ne tient pas compte des amortissements, mais de la vétusté et l'utilité économique de l'amélioration
réalisée. Cette façon de calculer les indemnités ne concernent que les investissements qui sont soumis à l'avis du comité technique ou qui relèvent de la procédure de notification selon l'article L411-73 du Code rural. C'est-à-dire ceux relevant des règles de salubrité dans la maison d'habitation ou dans les bâtiments.
Le calcul des indemnités, hors droit de reprise pour les bâtiments et ouvrages incorporés au sol, est égal au coût des travaux, évalué à la date d'expiration du bail, diminué d'un amortissement. En principe, chaque département, après avis de la commission consultative des baux ruraux, fixe par arrêté préfectoral, les tables d'amortissement applicables. à défaut, c'est le taux de 6 % par année écoulée depuis leur exécution qui s'applique.
En ce qui concerne l'indemnité due au titre des plantations, elle ne peut excéder le montant de la plus-value apportée au fonds. Elle est égale à l'ensemble des dépenses, y compris la valeur de main-d'oeuvre, évaluées à la date d'expiration du bail qui auront été engagées par le fermier avant l'entrée en production des plantations, déductions faites, d'un amortissement calculé à partir de cette dernière date.
En tout état de cause, l'indemnité n'est due que dans la mesure où les aménagements effectués conservent une valeur effective d'utilisation. Ainsi, un coefficient de réfaction peut être appliqué sur l'indemnité pour tenir compte de la valeur des usages qui apparaissent limités ou diminués. L'indemnisation peut être refusée lorsque les installations sont devenues inutiles ou obsolètes.
Propriété des constructions sur le fonds du bailleur
La propriété du sol emportant celle du dessus et du dessous, le bailleur devient propriétaire des constructions et plantations effectuées sur son fonds par le preneur. La question de la date de l'accession à la propriété du bailleur a été tranchée par la jurisprudence. Sauf convention contraire, les plantations et les constructions du preneur deviennent propriété du bailleur lorsque le bail en cours prend fin, c'est-à-dire au moment du renouvellement ou à la fin définitive du bail.
L'importance de l'état des lieux
Il s'avère en pratique essentiel d'effectuer un état des lieux d'entrée et de sortie afin de pouvoir apporter la preuve des améliorations effectuées par le fermier. Malheureusement, l'état des lieux est très souvent négligé, malgré la sécurité juridique qu'il apporte entre le bailleur et le fermier. Cet état des lieux permet également de faciliter le calcul du montant de l'indemnité.
Toutefois, qu'à défaut d'état des lieux, l'expert désigné, le cas échéant, pour évaluer cette indemnité, pourra utiliser toute méthode utile.