Betteraves
La campagne betteravière démarre cette semaine
Après une année 2011 exceptionnelle tant en volumes qu’en prix, 2012 sera moins prolifique sur le plan agronomique.
Les premiers arrachages viennent de s’effectuer, avec l’effet bénéfique de quelques millimètres de pluie, et les usines s’apprêtent à cracher leur panache de fumée blanche ; bref, la campagne betteravière démarre en ce moment, faisant la jonction entre une année 2011 exceptionnelle tant en volumes qu’en prix et une année 2012 agronomiquement moins productive. C’est ce qui ressort du conseil de l’Asbs (Association syndicale betteravière de la Somme) réuni mardi 11 septembre.
Récolte 2011 : les cours et l’article 31 consolident le revenu des planteurs
Les groupes livrant les uns après les autres leurs chiffres, on voit se consolider le chiffre d’affaires de la récolte betteravière 2011. Plusieurs paramètres influent sur le prix au sein de chaque groupe : la seule valeur commune est le prix interprofessionnel de base qui se situe à 25,4 € par tonne pour le sucre-quota. Sur le quota, la récolte 2011 présente deux dispositifs favorables à la filière : en premier lieu, la Commission européenne a autorisé la requalification de betteraves excédentaires pour atteindre le quota communautaire ; de plus, au niveau national, la France a autorisé la métropole à produire le quota DOM non réalisé. Ces mesures ont ainsi généré des reclassements significatifs, valorisant ainsi des betteraves excédentaires au prix du quota.
De surcroît, le cours communautaire ayant été élevé, chaque groupe a pu accéder à des marchés valorisants, et la CGB a demandé (et obtenu) l’application de l’article 31 du règlement interprofessionnel qui prévoit un retour de la valeur ajoutée aux planteurs dans ces circonstances. C’est ainsi que selon leurs stratégies de ventes respectives, les groupes sucriers dégagent pour les planteurs un supplément de prix à hauteur de 12 €/T chez Tereos, 10 €/T chez Saint Louis Sucre et 5 €/T chez SVI.
L’autre paramètre vient par ailleurs de la bonne tenue des cours des alcool/éthanol, tirés par une conjoncture soutenue par le cours de l’éthanol de maïs produit aux Etats Unis. Pour les mêmes raisons, les cours intracommunautaires devraient rester fermes sur la campagne à venir, et ce d’autant plus que l’Europe impose à présent des droits de douane sur de l’éthanol américain incorporé à l’essence, le rendant moins attractif. Ces d’autant plus direct pour les planteurs Tereos, car le prix des betteraves éthanol qui leur est payé est indexé à 41 % du prix de l’éthanol départ usine. Enfin, vient le solde des betteraves excédentaires, qui pèse selon les groupes jusqu’à 15%, et qui ont toutes trouvé un débouché valorisant du fait de la conjoncture, au delà de 23 €/T dans chacun des groupes.
Au final, 2011 est une année à rendement exceptionnel, avec toutes les tonnes valorisées, et qui plus est à bon prix. En tenant compte des quote-part de chaque débouché, et des compléments de prix chez Tereos, on parvient à un prix moyen de la betterave, avant rémunération du droit pulpes à hauteur environ de 29 € chez SVI, de 32 € chez Saint Louis Sucre et de 36 € chez Tereos (voir tableau).
A noter cependant que les suppléments de prix ne sont règlementairement payables qu’à partir du 31 décembre 2012, et feront donc l’objet d’un versement postérieur à cette date, en février ou mars 2013.
Un marché toujours solide en 2012, plus incertain en 2013
Gilles Delon, de la CGB a apporté sur ces chiffres un regard prospectif. La campagne betteravière qui débute s’ouvre dans un contexte économique toujours favorable, même si le cours mondial du sucre a connu un réel repli. Cependant, la récolte s’annonce en retrait en France, mais plutôt en progression au sein de l’Union européenne. Ce qui fait supposer que les dispositifs de requalification ne seront sans doute pas activables pour la filière française, alors que le stock fin de campagne pourrait être quasi identique. Si la récolte betteravière 2012 paraît donc en mesure d’être correctement valorisée, la visibilité est plus limitée pour les semis 2013, et la CGB exhorte les planteurs à viser la stricte production de leurs quotas et contrats, sans miser sur la valorisation d’excédents.
Une campagne plus courte
Les campagnes industrielles vont significativement évoluer en 2012, du fait de la variation sensible des rendements. Cette semaine, l’Asbs confirme sa prévision d’un rendement moyen proche de 83 T/ha, soit 11 T/ha de moins qu’en 2011 (voir page 33). Comment les groupes s’adaptent-ils ? Pour sa part, Tereos projette une réduction de la durée de campagne de 20 à 25 jours, liée à la fois à une baisse de 2,5% des emblavements et au repli agronomique.
Pour optimiser la production face au retard de végétation, le groupe coopératif a par ailleurs retardé de deux semaines l’ouverture de ses sites.
Pour sa part, à surface égale à 2011, l’usine de Sainte Emilie table sur une campagne de 80 jours. Enfin Saint Louis Sucre prévoit une campagne de 115 jours, car l’estimation de repli de rendement est moindre que sur les autres groupes, les usines d’Eppeville et Roye étant significativement approvisionnées hors département par des zones qui avaient souffert de la sécheresse en 2011 (notamment la partie Oise livrant à Roye l’an dernier).
Dominique Fievez, réélu président de l’Asbs
Comme chaque année, l’Asbs a réélu son bureau et les différents membres qui le composent. Dominique Fievez a ainsi été réélu à la présidence du syndicat betteravier. Président de la commission mixte de Saint Louis Sucre, il est entouré en tant que vice-présidents par Jérôme Fourdinier, président de la commission mixte de Sainte Emilie et de la coopérative d’approvisionnement Cabse, et de Xavier Henquenet, président de la commission interprofessionnelle de l’ex sucrerie d’Abbeville pour les planteurs Tereos.
SVI/Cristal Union : plus de 80% du quota souscrit
Jérôme Fourdinier, président de la coopérative d’approvisionnement de l’usine de Sainte Emilie (Cabse) a présenté le niveau de souscription des planteurs SVI au projet porté par Cristal Union. A ce jour, 75% d’entre eux ont rejoint le groupe coopératif, apportant ainsi plus de 80% du quota. A ce stade, chacun se réjouit de l’engouement et de l’adhésion au projet. Jérôme Fourdinier rappelle que pour la récolte 2012, les demandes d’adhésion seront recevables jusqu’au 30 septembre 2012 dernier délai.
Richesse et sucre ne font pas bon ménage
Coupant court à l’idée générale que les variétés riches en sucre sont les plus productives, Gilles Delon (CGB) a montré que sur les trois dernières années, les variétés présentant les plus hauts niveaux de richesse ne sont pas celles qui présentent le meilleur rendement en sucre à l’hectare.
Au contraire, la corrélation inverse est établie, et la tendance est claire : les variétés les plus riches ne sont pas les plus productives.
Et la CGB tire la sonnette d’alarme auprès des fabricants de sucre qui font du critère richesse une priorité. Les industriels prônent en effet ce type de variétés, intéressantes pour la réduction du transport, pour la facilité d’extraction, et donc pour la maîtrise du coût industriel.
Cependant, la CGB a pu chiffrer les effets, et il en ressort que la baisse de productivité chez le planteur est nettement supérieure à l’amélioration sur le transport et la transformation (jusqu’à quatre fois). Au final, c’est donc une voie de sélection, certes partiellement avantageuse pour les industriels, mais globalement préjudiciable à la coopétitivité globale de la filière.
Et au regard du pas de temps de la recherche (une variété mobilisant parfois dix années de recherche), la CGB exhorte tous les représentants des producteurs (administrateurs des groupes coopératifs et membres des commissions mixtes) à appeler leurs industriels respectifs à infléchir leur positions quant aux priorités attendues sur la création variétale.