La filière attentive à quatre bioagresseurs émergents
La 14e rencontre régionale sur la protection des cultures légumières s’est tenue à Loos-en-Gohelle (62).
A quelques semaines des premiers travaux dans les champs et les serres, l’heure est à la préparation de la prochaine campagne. Les producteurs de légumes des Hauts-de-France se sont réunis nombreux, le 7 février au c½ur du bassin minier, pour un temps d’échanges hivernal.
Apparition de la punaise diabolique et du candidatus
2016 fut une année en dents de scie pour les producteurs régionaux. Marquée par la pluviométrie et les intempéries du printemps, provoquant pertes, dégâts et attaques d’insectes, puis par une sécheresse estivale, la saison dernière est encore dans toutes les mémoires. «La teigne des choux a provoqué d’importants dommages dans les parcs du Nord-Pas-de-Calais», rappellent les chercheurs du Pôle légumes région Nord (PLRN). Plusieurs études sur cette plante viennent d’ailleurs d’être mises en place par les services de la Fredon. Outre les mouches mineuses, les chenilles ou les noctuelles, d’autres nouveaux bioagresseurs ont fait leur apparition sur le territoire. A commencer par la punaise diabolique (Halyomorpha halys), un ravageur des cultures particulièrement nuisible. «Elle menace de se développer au nord du bassin parisien surtout en arboriculture mais également en maraîchage, indique Sophie Szilvasi, experte nationale des cultures légumières à la Direction générale de l'alimentation (DGAL). Les instituts de recherche ont lancé des études sur cet insecte car on s’attend à des difficultés dans les prochaines années». L’Inra a ouvert récemment une application smartphone pour inviter le public à participer à la détection du ravageur. L’appel à la vigilance est aussi émis pour le «candidatus», un bioagresseur potentiellement nocif. «Il pourrait apparaître sur carottes, souligne la professionnelle. L’observation est de mise», en raison du potentiel de dommages qu'il est susceptible de causer dans les cultures.
«Veiller à l’origine et à la provenance des plants»
Non détectées dans les Hauts-de-France, d’autres espèces alertent néanmoins les producteurs de légumes français. Le «Spodoptera littoralis», aussi appelé «le ver du cotonnier», a été aperçu dans le sud de la France. Ce lépidoptère très vorace cause des dégâts sur diverses plantes maraîchères, généralement sous serres. «Il est essentiel de veiller à l’origine et à la provenance des plants, particulièrement ceux d’artichauts, de choux et des fraisiers», explique Sophie Szilvasi. La lutte contre ce ravageur est rendue difficile à cause du nombre de générations qui se succèdent en saison, ainsi que de la résistance aux produits. A ses côtés, un autre lépidoptère inquiète sérieusement les autorités. Le Tecia solanivora, repéré au nord de l’Espagne et en Galice, figure sur la liste rouge de l’Organisation européenne et méditerranéenne pour la protection des plantes (Eppo). «C’est un bioagresseur très virulent, témoigne la responsable de la DGAL. Il se développe rapidement et, dans certaines parcelles, l’infestation a été telle qu’il n’est plus possible de cultiver de pommes de terre». Plusieurs centaines de tonnes de tubercules ont également été condamnées en Amérique du sud depuis une vingtaine d’années. Là encore, la traçabilité des plants est un critère à prendre strictement en compte pour éviter la propagation du ravageur.
Un rapport sur les néonicotinoïdes attendu prochainement
Depuis l’adoption de la loi biodiversité, il y a huit mois, l’interdiction en France des produits phytopharmaceutiques (PPP) contenant des néonicotinoïdes et des semences traitées sera effective à compter du 1er septembre 2018. «Des dérogations devraient être possibles jusqu’au 1er juillet 2020, annonce Sophie Szilvasi. Elles seront accordées par arrêté interministériel (Agriculture, Environnement et Santé) sur la base des travaux de l’agence nationale de sécurité sanitaire». Des substances contenant des néonicotinoïdes sont, en effet, parfois utilisées sur certains légumes. L’Agence nationale de sécurité sanitaire, de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) évalue actuellement le degré de substitution possible de ces substances. Un rapport attendu prochainement prendra en compte les alternatives possibles et les impacts des interdictions sur les pratiques agricoles.