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Grandes cultures
L’AGPB veut des fermes «agiles» et productives contre la décroissance

Les représentants des organisations syndicale et interprofessionnelle nationales des grandes cultures (AGPB-Intercéréales) ont partagé, la semaine dernière  avec les élus de la FRSEA Hauts-de-France, leur feuille de route pour maintenir une production céréalière dynamique.

PAC 2023-2027, assurance climat et épargne de précaution étaient au menu de la rencontre organisée par la FRSEA  des Hauts-de-France avec l’AGPB le 12 avril dernier, à Boves (Amiens).
PAC 2023-2027, assurance climat et épargne de précaution étaient au menu de la rencontre organisée par la FRSEA des Hauts-de-France avec l’AGPB le 12 avril dernier, à Boves (Amiens).
© D. R.

La décroissance ? Ce n’est sûrement pas le leitmotiv qui porte l’AGPB (grandes cultures) et ses responsables comme ces derniers sont venus le rappeler le
12 avril dernier à Boves aux élus de la FRSEA Hauts-de-France. Agriculteur en Eure-et-Loir, Éric Thirouin est le président de l’organisation qui représente les producteurs de blé et autres céréales. Pour lui, pas de doute : «Nous devons rester productifs tout en prenant en compte les problématiques environnementales et sociétales, et veiller à toujours créer de la valeur. Le défi qui s’oppose à nous est de produire plus et mieux». La rencontre qui a réuni une quarantaine de participants a aussi été l’occasion de rappeler un certain nombre de dossiers dans lesquels l’AGPB a défendu sa vision, et des acquis. Secrétaire général de l’organisation, Philippe Heusèle a détaillé, lors de son intervention, un certain nombre de «pistes» devant permettre à l’exploitation agricole céréalière des Hauts-de-France (et d’ailleurs) «d’être plus agile».

 

Épargne de précaution et assurance climatique

Première piste à faire l’objet d’une attention particulière : l’épargne de précaution. Pour Philippe Heusèle, l’épargne de précaution est un sujet «que l’on travaille depuis longtemps». Le principe ? Profiter d’une année favorable pour mobiliser la déduction pour épargne de précaution (DEP), et surtout anticiper les fluctuations. «Dans la mesure du possible, il faut anticiper et éviter l’effet ciseau.» Autre conseil, «bien connaître ses coûts de production», souligne le secrétaire général de l’AGPB qui rappelle l’existence d’un outil d’aide à la décision développé avec Arvalis.

Dans le même esprit, s’agissant de sécuriser l’avenir, l’AGPB prône auprès des agriculteurs qu’elle représente de souscrire à l’assurance climatique. «Comme le risque lié au marché, le risque lié au climat doit être pris en compte», défend M. Heusèle. Selon l’organisation syndicale, malgré des avancées, il reste du chemin à parcourir mais l’AGPB y croit d’autant que l’État a effectué des arbitrages «favorables» destinés à «créer un choc assurantiel». L’organisation rappelle au passage qu’elle s’est mobilisée pour obtenir un abaissement du seuil de déclenchement de l’assurance climatique.

 

Pas d’interdictions sans solutions

Au sujet de la Pac, «c’est la première fois en 2023 que la nouvelle mouture ne rince pas les grandes cultures», se réjouit Éric Thirouin, rappelant la mobilisation de l’AGPB pour rendre accessible l’écorégime au plus grand nombre d’exploitations de grandes cultures. Des inquiétudes persistent toutefois avec un lot de contraintes à intégrer, notamment en ce qui concerne les BCAE 7 (rotation des cultures) et BCAE 8 (maintien des éléments du paysage). Si la recherche de valeur a pu faire l’objet d’un certain nombre d’attentions depuis plusieurs mois – on pense par exemple au travail qui a abouti aux lois Egalim 1 et 2 –, et malgré des cours jamais atteints, du côté des céréaliers, on ne peut pas vraiment dire que le compte y soit, comme l’a détaillé Philippe Heusèle : «la loi Egalim est intéressante pour des entreprises qui travaillent sur les marchés intérieurs. Pour la filière céréalière, elle est plutôt mal adaptée…» Quant à la hausse des cours, on rappelle du côté de l’AGPB que les coûts de production ont eux aussi subi une envolée et que les contraintes n’ont jamais été aussi fortes.  

En ce qui concerne le volet «phytosanitaires» par exemple, les choses sont loin d’être réglées : «Nous devons être mobilisés en permanence face à la menace de nouvelles restrictions, voire des interdictions pures et simples», a rappelé Éric Thirouin. La menace qui pèse sur l’utilisation de la phosphine pour le transport des céréales par voie maritime n’est qu’un exemple de plus. «Pas d’interdiction sans solution reste notre cheval de bataille. Le prochain chantier que nous allons aborder est celui des usages du glyphosate, mais l’encadrement de l’utilisation des produits phytosanitaires dans les zones Natura 2000…» Avec ses presque 130 000 hectares classés sous ce statut de protection et bien qu’elle ne soit pas la plus directement impactée (4 % de son territoire), la région des Hauts-de-France ne pourra pas passer à côté de ce dossier compte tenu du poids de l’agriculture dans son environnement.

Intercéréales prône de produire «partout où cela est possible»

À l’heure qu’il est, si quelqu’un est capable de dire quelle sera l’issue du conflit qui dure désormais depuis un peu plus d’un an entre l’Ukraine et la Russie, qu’il lève le doigt… La seule chose autour de laquelle tous les acteurs de l’interprofession française des céréales (Intercéréales) sont néanmoins d’accord, c’est le fait que «la guerre aura des impacts à moyen et à long terme», a souligné Philippe Heusèle, s’appuyant sur les résultats d’une étude prospective réalisée par l’interprofession. Ces impacts, a-t-il encore dit, peuvent être tellement «importants» qu’il faut «avoir les idées claires et être armés». Dans les Hauts-de-France, on est lucide : «Les conséquences de la guerre en Ukraine, on les voit depuis un petit moment», a ainsi souligné Luc Vermersch, président délégué de Noriap, corroborant le panorama dressé par Intercéréales : «L’instabilité amenée par la guerre touche tous les secteurs, du producteur à l’organisme stockeur (OS), en passant par les exportateurs». Pour Philippe Heusèle, «la guerre met en évidence la fragilité des équilibres mondiaux, dont l’équilibre alimentaire qui dépend de la capacité à exporter d’un certain nombre de pays vers ceux qui ont des besoins.» Problème, a-t-il souligné, «c’est que tout le monde n’a pas la même définition de la souveraineté alimentaire…» Face à une philosophie européenne qualifiée «d’angélique» par rapport à d’autres puissance mondiales – on pense par exemple à la Russie ou aux États-Unis qui ne se gênent pas de défendre leur secteur agricole -, les responsables d’Intercéréales s’inquiètent de la stratégie européenne en matière d’agriculture. Et de citer par exemple la mise en œuvre de Farm to fork et le verdissement de la Pac… «La guerre en Ukraine vient mettre en avant un certain nombre de faiblesses, même s’il existe aussi des opportunités», rappelle Philippe Heusèle plus que jamais convaincu «qu’il est nécessaire de produire partout où cela est possible». 

Les Hauts-de-France, «l’autre grenier à blé de la France»

Le qualificatif est flatteur et c’est à l’interprofession des céréales de France (Intercéréales) que la région Hauts-de-France le doit. Dans sa dernière publication du panorama de la production de céréales dans les Hauts-de-France, l’interprofession rapporte en effet que cette région «aux reliefs contrastés» occupe la deuxième place sur les productions céréalières et affiche le meilleur rendement national sur le blé tendre… à égalité avec la région Île-de-France. 
Réparties sur 2,2 millions d’hectares (Mha) de surface utile, les activités agricoles valorisent à 69 % – record national – ce territoire de 3,2 Mha. Implantées sur près de 1,1 Mha, les cultures céréalières représentent à elles seules 50 % de la surface agricole utile et assurent une récolte annuelle de 9 millions de tonnes (Mt). En tête des productions céréalières figure le blé tendre. Avec plus de 6,8 millions de tonnes cultivées sur 830 000 ha, la région Hauts-de-France est la première région française, devant la région Grand-Est. Elle fournit près de 20 % de la production française. Le reste des céréales récoltées en Hauts-de-France sont l’orge (1,1 Mt) et le maïs (871 000 t). Enfin, on recense dans la région 23 000 exploitations agricoles dont une grande partie (19 200) cultive des céréales. 
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