L’avaleur de silo : une technique à améliorer, estime l'Asbs
L'avaleur de silo est une technique innovante qui pose toutefois dans la pratique des problèmes aux planteurs et entraîne pour eux un surcoût.
L'utilisation de l'avaleur de silo en lieu et place de la trémie est en train de se développer dans la région, notamment chez Tereos et les usines d'Attin et Boiry pour ce qui concerne la Somme. La coopérative l'avait clairement annoncé dans tous ses conseils d'administration : sa volonté est d'avoir à terme des avaleurs partout. Cet appareil était également en démonstration en ce début de semaine dans le Santerre pour la sucrerie de Roye.
La raison est principalement d'ordre économique. L'avaleur, c'est une machine au lieu de deux, d'où un gain de l'ordre de 15 à 20 cts d'euro à la tonne pour l'industriel. Ensuite, les pertes consécutives à la casse de betteraves sont bien moindres qu'avec la grue. L'avaleur préserve beaucoup mieux les racines puisqu'il reprend le silo en douceur. Et du point de vue sécurité, il est plus sûr que l'ensemble grue trémie. C'est aussi un engin très sophistiqué, bourré d'électronique, qui reflète le haut niveau de technologie auquel est parvenu le machinisme agricole.
Pas plus de 9,50 m de large
L'avaleur a donc des avantages indéniables. Mais à l'usage, des inconvénients sont apparus pour les planteurs (voir tableau ci-dessus). Le syndicat betteravier de la Somme (Asbs) met en avant un certain nombre de problèmes qui découlent de la largeur imposée pour les silos. Celle-ci ne doit pas dépasser 9,50 m avec les avaleurs de marque Ropa utilisés dans le département. "Dans la pratique, constituer un tel silo est relativement compliqué avec des bennes de 16 à 18 tonnes (*), ce qui est le standard ici, explique Dominique Fiévez, président de l'Asbs. Si l'on ne fait pas très attention, on déborde très vite. Et si le silo fait 10 m de large, voire plus, l'usine va appeler l'agriculteur pour qu'il vienne repousser les bords du silo avec son engin de manutention. Actuellement, et en première année de mise en place de l'avaleur au Nord de la Somme, 10 à 20% des silos enlevés nécessitent un réajustement. Ce n'est pas satisfaisant".
Se pose également le problème de la longueur du silo qui peut atteindre une dimension impressionnante lorsque toutes les betteraves vont être arrachées, normalement d'ici la mi-novembre. Si la parcelle n'est pas adaptée à la constitution d'un silo de grande longueur, l'agriculteur devra placer ce silo à un autre endroit, quitte à emprunter la route avec tous les problèmes de salissement que cela peut entraîner. Dominique Fiévez soulève aussi la question du positionnement du camion. "Il faut rallonger de 30% minimum la zone de stationnement. C'est un coût important pour le planteur, nous l'avons chiffré à 180 euros l'hectare si celle-ci fait l'objet d'un aménagement particulier (base 15 euros/m2)".
Un moyen d'éviter cet aménagement serait de faciliter le stationnement des camions sur la chaussée, là où les conditions de sécurité le permettent. "C'est une discussion que nous devons ouvrir avec les pouvoirs public", souligne le président de l'Asbs.
Les aires stabilisées obsolètes ?
Autre gros inconvénient de l'avaleur, il ne fonctionne pas sur les aires stabilisées, des aménagements qui avaient été recommandés il y a une quinzaine d'années pour faire baisser la tare terre et qui avaient été financés par des fonds interprofessionnels. Ces aires deviennent aujourd'hui obsolètes : elles sont trop courtes pour la technique avaleur et les doigts de l'appareil arrachent la plate forme en dur, contrairement à la terre ou à l'herbe.
Enfin, dernier inconvénient soulevé par l'Asbs, un silo plus étroit est plus sensible au gel, il faut y mettre davantage de bâches, ce qui occasionne là aussi un coût supplémentaire pour le planteur.
Des solutions existent
Cela étant des innovations techniques existent pour pallier certains de ces inconvénients. "Nous suivons attentivement l'expérimentation que mène actuellement Tereos dans la région de Lille avec le Kleine Fender, un avaleur de 8 m de large muni d'une vis de côté qui divise le silo, indique Etienne Lenaerts, directeur de l'Asbs. Ropa doit également tester un avaleur de 8 m coupeur de tas. Ces appareils permettraient d'avoir des silos de 14 m de large. Kleine équipe en outre sa machine d'un système autorisant son fonctionnement sur les aires stabilisées. Si ce type de matériel fait ses preuves, cela résoudra ces problèmes".
Constructeurs et fabricants à l'écoute des planteurs
L'Asbs estime qu'une plus grande réflexion doit être menée par les industriels sur le remplacement des déterreurs à trémie par les avaleurs. Car au-delà du surcoût financier pour les planteurs liés à l'avaleur, ce sont surtout les inconvénients techniques (voir tableau) qui suscitent l'insatisfaction. "Les constructeurs doivent poursuivre leurs recherches et nous proposer des machines qui puissent avaler des silos de plus de 10 m de large et travailler sur tous les types de supports : chaume, plate forme, aire enherbée, indique Dominique Fiévez. Avant d'accepter le remplacement généralisé des déterreurs à trémie, nous attendons que les constructeurs proposent des machines qui répondent à nos cahiers des charges et apportent complète satisfaction aux acteurs de la filières, planteurs et fabricants".
(*) L'intégrale est certes mieux adaptée pour confectionner ce type de silo. Est-ce à dire que la généralisation de l'avaleur implique nécessairement celle de l'intégrale ? "Non, répond le syndicat betteravier, car le choix de la machine d'arrachage, intégrale ou automotrice, est à raisonner par l'agriculteur en fonction de critères agronomiques d'abord, puis organisationnels et économiques.