Le chantier de la gestion des risques est ouvert
Après l’épisode de gel qui a durement touché de nombreux secteurs agricoles lors des deux premières semaines d’avril, le rapport du député Frédéric Descrozaille s’est inscrit, malgré lui, en pleine actualité.
Après l’épisode de gel qui a durement touché de nombreux secteurs agricoles lors des deux premières semaines d’avril, le rapport du député Frédéric Descrozaille s’est inscrit, malgré lui, en pleine actualité.
Avec son rapport d’une quinzaine de pages - il en compte en réalité près de 330 pages avec les très nombreuses annexes -, le député, qui connaît bien le monde agricole pour être passé notamment par l’APCA, la CFCA, le CNJA et Interfel, part du constat que l’évolution du régime des calamités est aujourd’hui «inachevée» et que «la frontière entre ce qui est assurable et ce qui ne l’est pas est absolument décisive parce que partiellement indéterminée et, de plus, évolutive : elle doit faire l’objet d’une réflexion partagée au niveau national». Il lui semble également indispensable de donner «une cohérence et une légitimité» à un système aujourd’hui décrié et peu efficace. Critiquant assez vivement la moyenne olympique, il pose comme principes la nécessaire intervention de l’État dans le futur dispositif et le recours à la solidarité nationale.
L’eau, une question centrale
Fort de ces constats, il fait état de trois propositions, sciemment imprécises car elles doivent «être traitées dans le cadre d’une gouvernance qui implique les métiers de l’assurance et de la réassurance, le secteur agricole et l’État». Première de ces propositions : prévenir le risque, notamment par le conseil et la formation des agriculteurs, mais aussi par le soutien aux investissements dans les équipements de protection et prévention. Il souhaite aussi s’attaquer au chantier de l’eau, notamment parce que l’aspersion est un élément de protection des fleurs et bourgeons. C’est une question «absolument centrale», souligne-t-il. Deuxième piste du député : faire nécessairement évoluer l’assurance multirisques climatiques (MRC) dans le cadre de ce que permet le règlement européen Omnibus. Enfin, troisième proposition qui s’imbriquera avec les deux précédentes : faire intervenir l’État pour la gestion des risques «forts» c’est exceptionnel, systémiques, «non assurables ou nécessitant une réassurance publique dans les cas de phénomènes d’ampleur exceptionnelle».
Urgence sur le dossier
Le 22 avril, la FNSEA et JA ont salué ce rapport qui répond «à une demande forte de la profession agricole : la refonte en profondeur de l’articulation entre régime de solidarité et assurances». Les agriculteurs ne pourront «en aucun cas faire face, seuls, à l’enjeu du changement climatique», ajoutent les deux organisations qui «se félicitent de l’affirmation, par le député, de la légitimité de l’intervention de l’État et du principe de solidarité nationale».
Intervenant lors de l’assemblée générale de la Fédération nationale des producteurs de lait (FNPL), le 22 avril, le ministre de l’Agriculture, Julien Denormandie, avait déclaré qu’il fallait «accepter l’idée que le risque climatique ne peut plus être supporté par le monde agricole lui-même (…) Appeler à la solidarité nationale fait sens», a-t-il insisté. Pour Joël Limouzin, membre du bureau de la FNSEA en charge du dossier calamités agricoles, il y a «urgence» sur ce dossier qui s’inscrit en totale cohérence «avec l’annonce du ministre de l’Agriculture d’organiser un Varenne de l’eau». Mais chacun devra «prendre ses responsabilités, y compris professionnelles», a-t-il ajouté. Si La FNSEA et JA retrouvent la philosophie et les positions qu’ils défendent depuis des années et si «les orientations politiques vont dans le bon sens, tout reste à construire», a conclu Joël Limouzin.