Elevage
Le lapin cherche sa place à table
L’association interprofessionnelle du lapin des Hauts-de-France (AILHF) a reçu milieu de semaine la vice-
présidente du Conseil régional chargée de l’agriculture pour évoquer l’explosion du coût de l’aliment, le besoin de promouvoir cette production et les efforts d’éleveurs pour répondre aux attentes sur
du bien-être animal.
L’association interprofessionnelle du lapin des Hauts-de-France (AILHF) a reçu milieu de semaine la vice-
présidente du Conseil régional chargée de l’agriculture pour évoquer l’explosion du coût de l’aliment, le besoin de promouvoir cette production et les efforts d’éleveurs pour répondre aux attentes sur
du bien-être animal.
«Cela fait 37 ans que je fais du lapin et je ne me souviens pas d’une situation comme celle-là.» Éleveur à Wattrelos (59), Christophe Catteau est vice-président de l’association interprofessionnelle du lapin des Hauts-de-France (AILHF) et faisait partie de la délégation qui a accueilli mercredi 23 mars la vice-présidente du conseil régional en charge de l’agriculture, Marie-Sophie Lesne, sur un élevage cunicole de Crouy-Saint-Pierre (80). Lors de cette visite à la rencontre d’une filière «marginale» dans la région, pas un mais plusieurs objets de discussion : «La première chose, expliquait Christophe Catteau, c’est de faire connaître notre métier aux élus régionaux et de leur montrer qu’il y a des jeunes qui se lancent, même si c’est compliqué et que la consommation baisse.» La délégation a été accueillie sur la ferme de Pierre Carton, 25 ans, qui a inauguré il y a quelques mois un bâtiment d’élevage «nouvelle génération», avec une meilleure prise en compte du bien-être animal et de celui de l’éleveur. «Notre principale difficulté, c’est de faire consommer du lapin», a encore assuré le vice-président de l’interprofession régionale.
Hausse de l’aliment pénalisante
Depuis quelques mois, une autre préoccupation – et elle est de taille – est venue s’ajouter : l’explosion des coûts de production et, en particulier, celui de l’aliment. «Contrairement à d’autres élevages, nous ne sommes pas en mesure de fabriquer l’aliment nous-même, constate M. Catteau. Les formules sont trop complexes, puisqu’elles comptent entre 23 et 26 ingrédients. Parmi ces ingrédients, le prix de certains flambent parce qu’ils sont corrélés au prix des céréales.» Et puis, il y a aussi le prix du gaz et de l’électricité qui s’envole… «Rien qu’en ce qui concerne l’aliment, on a déjà subi une hausse de 50 €/t l’an dernier. Aujourd’hui, les fabricants nous annoncent une hausse pour les prochains mois comprise entre 60 et 100 €/t ! Nos prix de vente, eux, ne bougent pas…» Autre soucis de préoccupation, toujours en matière d’alimentation : «l’utilisation de la pulpe de betteraves pour alimenter des méthaniseurs» s’insurge Christophe Catteau, qui y voit une concurrence malsaine.
Face à la représentante du Conseil régional des Hauts-de-France, l’interprofession enfin pointe les difficultés à «faire passer des hausses de prix aux acheteurs» et dénonce une répartition des marges inéquitable : «Si l’éleveur et l’abatteur pouvaient récupérer un peu plus du prix final, nous nous en sortirions tous mieux», témoigne François Vandomme, président de l’AILHF et directeur de Socla, l’abattoir installé à Vaudringhem (62).
Des élevages respectueux de l’animal et de l’homme
Dans un contexte pas vraiment porteur, de jeunes éleveurs décident quand même de poursuivre le travail de leurs aînés et investissent. C’est le cas de Pierre Carton, 25 ans, qui a inauguré il y a quelques mois un bâtiment d’élevage «nouvelle génération», avec une meilleure prise en compte du bien-être animal et de celui de l’éleveur. C’est chez lui que la délégation du Conseil régional a été accueillie avec l’interprofession. «Le lapin est une production méconnue, et elle évolue comme d’autres pour répondre aux attentes des consommateurs», a rappelé Christophe Catteau. Problème pour les éleveurs qui optent pour ce type de bâtiment, élever des lapins dans un bâtiment d’engraissement sans cages, - cela facilite les interactions et la mobilité, mais réduit la productivité -, avec plus de lumière et des systèmes d’aération et d’alimentation automatisés coûte «plus cher», sans la possibilité de le répercuter sur le prix du produit fini. Une situation «ubuesque» qui inspire à Marie-Sophie Lesne une réflexion sur l’accompagnement financier de ce genre de projets : «Nous devons réfléchir à la manière de mieux aider les investissements à la pointe par rapport à des investissements plus courants.» Et d’imaginer «pourquoi pas une bonification». En ce qui concerne les débouchés de la viande de lapin, le Conseil régional espère lui aussi pouvoir apporter sa contribution : «On doit pouvoir se servir de la restauration scolaire, dans les lycées et les collèges (avec les Départements) pour faire consommer aux jeunes de la viande de lapin, a soumis Mme Lesne. Ce n’est pas ce qui va révolutionner vos ventes, mais cela permet de sécuriser un débouché, avec un prix que l’on peut discuter. Nous l’avons fait avec le Maroilles et l’agneau quand il a fallu le faire et cela a plutôt bien marché.»