Climat
Le ministère de l’Agriculture présente sa feuille de route climatique
En réponse à la demande de Matignon, le ministère de l’Agriculture a publié, le 23 juin, sa feuille de route pour atteindre les objectifs de réduction d’émissions de gaz à effet de serre fixés par la Stratégie nationale bas carbone (SNBC).
En réponse à la demande de Matignon, le ministère de l’Agriculture a publié, le 23 juin, sa feuille de route pour atteindre les objectifs de réduction d’émissions de gaz à effet de serre fixés par la Stratégie nationale bas carbone (SNBC).
«Une route pour atteindre les objectifs climatiques», annonce le ministère de l’Agriculture dans le communiqué joint au plan climat, adressé à la presse le 23 juin. En six axes et 22 pages, de la loi Egalim à la loi climat en passant par le plan biodiversité et le plan de relance, le document détaille scrupuleusement l’ensemble des mesures climatiques mises en œuvre ou prévues par la Rue de Varenne. «C’est à peine une addition des politiques en place, qui ne permettra pas d’atteindre l’objectif de division par deux des émissions à 2050», tranche Cyrielle Denhartigh, responsable agriculture au sein du Réseau action climat.
Cette feuille de route avait été demandée par le Premier ministre, Jean Castex, au ministère de l’Agriculture en novembre 2020, par un courrier que les Amis de la Terre avaient publié sur leur site internet. Le Premier ministre y demandait à Julien Denormandie «un plan d’action visant à répondre aux différentes orientations de la SNBC et du PNACC», en «définissant des jalons appropriés». Plus précisément, le chef du gouvernement exigeait même de mettre l’accent sur «la conversion aux pratiques agricoles à haute valeur environnementale et à l’agroécologie», ainsi que sur «le potentiel des secteurs agricoles et forestiers à séquestrer et stocker durablement du carbone».
Dans son architecture, le plan publié le 23 juin répond scrupuleusement à la demande. Le ministère y rappelle plusieurs mesures fortes déjà en place ou attendues dans les prochains mois, comme le décret d’application de la loi Climat fixant une trajectoire annuelle pour les émissions de protoxyde d’azote et d’ammoniac, ou encore les aides du plan de relance à la filière légumineuses. Principale nouveauté : le ministère évoque un plan d’action à paraître en 2021 «pour diminuer les émissions de méthane», dans le cadre de la stratégie sur la bioéconomie
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Flou sur l’élevage
«Pour nous, il y a un gros manque sur la baisse de consommation de produits carnés dans la population générale», regrette Cyrielle Denhartigh. Le plan évoque bien les mesures de la loi Egalim en faveur du menu végétarien dans les écoles, ainsi que des guides à destination des cantines pour favoriser l’utilisation des légumineuses, mais il aborde uniquement l’évolution des régimes alimentaires de l’ensemble des Français par le biais de l’affichage environnemental. «Santé publique France a déjà ses recommandations sur le sujet, nous aimerions une campagne promouvant la baisse de la consommation de viande», plaide Cyrielle Denhartigh.
Alors que la SNBC prévoit une baisse de 20 % des émissions de méthane entre 2015 et 2030, le plan détaille aussi les mesures de soutien au biométhane, sans répondre pour autant à la demande de Jean Castex de favoriser «une évolution de l’élevage vers des systèmes reconnus pour leur capacité à réduire les émissions».
Le PSN en ligne de mire
Selon le cabinet du ministère de l’Agriculture, ce Plan climat n’inclue pas «d’objectif» ou de «stratégie» de réduction des cheptels. Si l’on reconnaît que la réduction des cheptels fait partie des scénarios tendanciels et qu’elle participerait, de fait, à l’atteinte des objectifs de réduction des gaz à effet de serre, l’objectif du ministre est plutôt celui d’un maintien des cheptels dans le cadre de son objectif de «souveraineté alimentaire», assure-t-on. «Objectivement, il sera impossible d’atteindre les objectifs de réduction sans toucher au mix produit, tout en limitant la déforestation importée, les engrais de synthèse, et les
pesticides», analyse Pierre-Marie Aubert.
Ce plan d’action ministériel répond au rapport 2020 du Haut conseil pour le climat, dans lequel les experts recommandaient, en plus de la mise en place d’un plan sur les protéines végétales, «de mettre en place un processus d’évaluation en regard du climat de la Pac». Or, la Cour des comptes de l’Union européenne, dans un rapport publié le 21 juin, a recommandé à son tour à la Commission de fixer des objectifs chiffrés de réduction des émissions dans les futurs plans stratégiques nationaux (PSN), et de suivre annuellement avec des indicateurs l’effet des mesures d’atténuation financées. Alors que le plan climat ne détaille pas les réductions d’émissions attendues sur chacun des axes, le PSN pourrait être une opportunité pour la Rue de Varenne de s’exercer à la comptabilité climatique.