Les dix points qui opposeront les États, le Parlement et la Commission
Après le Parlement, les ministres de l’Agriculture des 27 sont tombés d’accord sur un texte. Mais les négociations se poursuivent.
Les ministres de l’Agriculture de l’UE, réunis les 18 et 19 mars à Bruxelles, sont parvenus à un compromis sur la réforme de la PAC qui constitue le mandat de leur président en exercice, l’Irlandais Simon Coveney, pour les négociations avec le Parlement européen et la Commission européenne. Des «trilogues» qui s’annoncent difficiles et débuteront le 11 avril, l’objectif étant de parvenir à un accord d’ici fin juin. Seules la Slovénie et la Slovaquie n’ont pas soutenu le texte final mis sur la table des Vingt-sept. Les députés avaient adopté leur mandat de négociation le 13 mars.
Voici quels sont les dix points chauds de la réforme qui risquent de poser problème dans ces «trilogues».
1 - La convergence interne des soutiens
Le projet des ministres de l’agriculture est le suivant : tous les paiements par hectare au-dessous de 90 % de la moyenne nationale ou régionale en 2014 combleront un tiers de cet écart d’ici 2019, avec une première étape limitée à 10 % du plafond national ou régional ; possibilité d’appliquer ce rapprochement aux soutiens octroyés au titre du verdissement du premier pilier de la PAC et de sur-primer les premiers hectares dans la limite de 65 % du paiement moyen national ou régional. Un niveau d’ambition «pas acceptable» selon Dacian Ciolos qui souhaite aller plus loin.
2 - Soutien aux jeunes agriculteurs
Possibilité pour les États membres d’octroyer aux jeunes exploitants (40 ans au maximum) un paiement supplémentaire sur une période de cinq ans au maximum, dans la limite de 2 % de l’enveloppe nationale. La Commission estime que ce mécanisme doit être général à toute l’Europe.
3 - Equivalence et verdissement
Conseil et Commission devraient également s’opposer sur le dispositif d’équivalence (possibilité d’échapper à une mesure écologique si un dispositif jugé équivalent est déjà en œuvre dans le pays ou la région) dans le cadre du verdissement. «Il faut que le système reste simple, affirme le Commissaire européen, et que tous les agriculteurs soient impliqués», a-t-il souligné. Par exemple, la proposition d’exclure des exigences vis-à-vis des surfaces d’intérêt écologiques les exploitations situées dans des zones où plus de 50 % du paysage est couvert par des forêts est inapplicable, estiment les services bruxellois, d’autant que, si les arbres sont coupés, les agriculteurs (qui n’y peuvent rien) perdraient leur 30 % de verdissement. De son côté, le Parlement européen a dit non au double financement et au principe même d’équivalence.
4 - Le plafonnement des aides
Sur le plafonnement des aides aussi, la Commission dispose du soutien des députés. Les chefs d’État et de gouvernement ont rendu cette mesure facultative, mais ils ne se sont pas prononcés sur la dégressivité des aides. Pour le commissaire à l’agriculture, cette dégressivité n’est pas une option et doit être obligatoire.
5 - Le régime viticole
Le dossier viticole devrait également faire l’objet de vives discussions. Les États membres ont repris les recommandations du groupe à haut niveau sur la fin des droits de plantation, mais ils proposent une date d’entrée en application en 2019. Bien trop tard, pour la Commission.
6 - Le règlement sucre
Sur l’OCM sucre, alors que les ministres sont difficilement tombés d’accord sur une date de fin des quotas en 2017, le Parlement souhaite leur prolongation jusqu’en 2020.
7- Les surfaces d’intérêt écologique
Sur les surfaces d’intérêt écologique, le Parlement européen a fortement dilué la proposition de la Commission en proposant une mise en place progressive : 3 % la première année, 5 % la deuxième et éventuellement 7 % ensuite après publication d’une étude d’impact de la Commission européenne. Le Conseil est plus proche de la proposition initiale de Bruxelles avec une première étape à 5 % et le passage à 7 % après publication d’une étude d’impact. Par ailleurs, les parlementaires rendent ces surfaces éligibles à beaucoup plus de cultures, comme celles ne nécessitant pas de traitement phytosanitaire (chanvre et lin par exemple).
8 - Zones à handicap naturel
La discussion sur les zones à handicap naturel promet d’être, elle aussi, animée. Le Conseil a repris, en y ajoutant de la flexibilité, la proposition de la Commission européenne, alors que le Parlement européen veut rester au statu quo en attendant qu’un nouveau dispositif soit mis sur la table par la Commission d’ici fin 2014. Pour le Conseil, les zones de montagne sont considérées comme défavorisées. Pour les autres zones, la désignation des zones soumises à contraintes naturelles se fait sur la base des 8 critères biophysiques définis par la Commission européenne (qualité du sol, climat, pente…).
9 - Sanction des paiements verts
Le régime de sanction sur les paiements verts fera également l’objet de discussions vives, sans doute. «Je regrette que le Conseil veuille appliquer des sanctions supplémentaires pour les agriculteurs qui ne seront pas en mesure d’appliquer la mesure de verdissement obligatoire», a réagi le rapporteur du Parlement européen sur ce volet de la réforme, Giovanni La Via.
10 - Soutiens couplés
Possibilité d’accorder un soutien couplé dans la limite de 7 % de l’enveloppe nationale, ce plafond étant porté à 12 % pour les États membres qui octroient déjà ce type de soutiens ou pour ceux qui appliquent le régime de paiement unique à la surface. Le Parlement demande que ces aides puissent atteindre 15 % des enveloppes nationales et la Commission les limite à 5 %.