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Les mesures agricoles à retenir de la loi Climat

Suite de l’exercice inédit de la Convention citoyenne, la loi Climat a été adoptée par les deux chambres le 20 juillet, au terme de l’examen de plusieurs milliers d’amendements. En voici les principales mesures agricoles.

Parmi les mesures, un menu végétarien hebdomadaire est imposé en restauration scolaire, et la liste des produits éligibles pour atteindre l’objectif «50 % de produits de qualité et durables, dont 20 % de bio» a été précisée.
Parmi les mesures, un menu végétarien hebdomadaire est imposé en restauration scolaire, et la liste des produits éligibles pour atteindre l’objectif «50 % de produits de qualité et durables, dont 20 % de bio» a été précisée.
© Paris.fr

Prévu par le premier article du texte, l’affichage environnemental fait partie des sujets sur lesquels les citoyens de la Convention climat ont obtenu satisfaction. À l’issue d’une durée d’expérimentation maximale de cinq ans après promulgation, l’affichage environnemental devrait être rendu obligatoire pour des catégories de biens et de services définies par décret. Les produits agricoles et alimentaires bénéficieront d’un traitement de faveur, puisque l’affichage devra prendre en compte leurs «externalités environnementales». Les sénateurs ont, en revanche, échoué à conserver la rémunération des producteurs dans les calculs de cet affichage, qui sera réservé à l’éventuelle création d’un «rémunéra-score».

 

Biocarburants : publicité partiellement autorisée 

La publicité sera désormais interdite pour les énergies fossiles, mais autorisée pour les carburants renouvelables à plus de 50 %. C’est la seule avancée de la loi Climat pour les dossiers des biocarburants. Les professionnels comptaient beaucoup sur une prise en compte de l’analyse de cycle de vie des énergies utilisées en distinguant le carbone d’origine fossile et celui d’origine renouvelable, mais l’amendement a reçu un avis défavorable du gouvernement. Patients, les professionnels comptent s’appuyer sur la loi Lom (loi d’orientation des mobilités), qui fixe une trajectoire de réduction de 37,5 % des émissions de CO2 d’ici 2030, pour demander chaque année lors de la discussion du PLF un abattement de 40 % sur le malus des voitures roulant à l’E85.

 

Lutte contre l’artificialisation des sols 

Dossier qui traînait de longue date, un cadre réglementaire de lutte contre l’artificialisation est instauré par la loi Climat. Le zéro artificialisation nette s’imposera d’ici 2050 à l’échelle régionale par les Sdraddet, qui pourront le décliner de manière différenciée sur le territoire, avec un premier objectif de division par deux de l’artificialisation sur la première décennie. Principale concession aux sénateurs : les documents d’orientation et d’objectifs pourront tenir compte de nombreux critères dont les besoins en matière de logement ou de revitalisation rurale, ainsi que des efforts déjà consentis par le passé.

Avec quelques possibilités de dérogation, l’ensemble des autres documents d’urbanisme auront entre cinq et dix ans pour se mettre en conformité avec l’objectif, sous peine de ne pas pouvoir délivrer de permis de construire. La FNSEA a salué l’élargissement des capacités des commissions départementales de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPenaf), qui pourront être saisies sur tous les Plans locaux d’urbanismes (PLU).

 

Menus végétariens à la carte

Sur le dossier médiatique du menu végétarien, les citoyens de la Convention n’ont obtenu que partiellement gain de cause. Ils souhaitaient imposer un menu végétarien quotidien dans la restauration collective à partir de 2025, mais le texte final pérennise l’expérimentation de la loi Egalim en imposant un menu végétarien hebdomadaire. Les collectivités locales volontaires pourront toutefois s’engager dans une nouvelle expérimentation de mise en place de ce menu quotidien durant deux ans. L’objectif du menu quotidien s’imposera d’ailleurs dans la restauration collective de l’État pour les établissements qui «proposent habituellement un choix multiple de menus». Pour la mise en œuvre, les établissements de l’État comme les collectivités volontaires à l’expérimentation renforcée bénéficieront d’outils «d’aide à la décision, à la structuration des filières d’approvisionnement sur leur territoire, à la formulation des marchés publics et à la formation des personnels concernés».

 

Approvisionnement des cantines précisé

Lors de la CMP, députés et sénateurs sont de nouveau revenus sur la liste des produits éligibles pour atteindre les objectifs d’approvisionnement de la restauration collective fixés par la loi Egalim (50 % de produits de qualité et durables, dont 20 % de bio). Les produits sous certification de conformité ne seront finalement pas retenus. L’élargissement aux produits issus du commerce équitable est, quant à lui, bien maintenu.

La date à partir de laquelle seuls les produits issus des exploitations HVE (niveau 3 de la certification environnementale) seront éligibles (et non plus les produits bénéficiant du niveau 2) est bien avancée de trois ans au 1er janvier. De plus, de nouveaux objectifs spécifiques pour la viande sont ajoutés. À partir de 2024, au moins 60 % des viandes bovines, porcines, ovines et de volailles devront répondre aux critères de qualité et de durabilité prévus par la loi Egalim. Pour les restaurants gérés directement par l’État, ce taux devra atteindre 100 %. L’ensemble des règles d’approvisionnement des cantines seront applicables à la restauration collective privée dès le 1er janvier 2024.

 

Engrais azotés : redevance conditionnée

C’était l’un des points les plus périlleux pour la profession agricole : espérant réduire les émissions liées à la fabrication et aux épandages d’azote de synthèse, les citoyens de la Convention avaient proposé dans leur rapport final d’augmenter la TGAP (taxe sur les activités polluantes) pour les fabricants, ou de mettre en place une nouvelle redevance inspirée de celle dédiée aux pollutions diffuses.

La loi climat prévoit que cette redevance sera mise en place sous une double condition : que le secteur ne respecte pas sous deux ans la trajectoire d’émissions qui sera fixée par décret, et que le dispositif de taxation veille «à préserver la viabilité économique des filières agricoles concernées et à ne pas accroître d’éventuelles distorsions de concurrence».

La trajectoire fixée par décret détaillera les cibles de la Stratégie nationale bas carbone (SNBC) révisée en 2020, qui prévoit d’ici 2030 pour le secteur agricole des réductions des émissions d’ammoniac de 13 % par rapport à 2005, et de 15 % des émissions de protoxyde d’azote par rapport à 2015. Cette trajectoire sera assortie d’un plan d’action national dédié aux émissions d’ammoniac et de protoxyde d’azote, sur le modèle d’Ecophyto pour les pesticides. Ce plan établira «un inventaire des technologies disponibles ainsi que la liste des financements publics et des mesures destinés à la recherche, à la formation et au soutien des exploitants agricoles». Les collectivités auront, en revanche, désormais l’interdiction d’utiliser des engrais de synthèse dans leurs espaces verts.

 

Déforestation : nouvelles exigences

Les sociétés soumises au devoir de vigilance et commercialisant des produits agricoles ou alimentaires devront présenter des mesures «propres à identifier les risques et à prévenir la déforestation associée à la production et au transport vers la France de biens et de services importés». Un décret à paraître pour la période 2022-2026, puis renouvelé de manière quinquennale, devrait également détailler la manière dont l’État devra arrêter d’acheter des biens ayant contribué directement à la déforestation, à la dégradation des forêts ou à la dégradation d’écosystèmes naturels en dehors du territoire national.

 

Chèque alimentaire : deux rapports attendus sous six mois

Le chèque alimentaire, qui doit permettre aux ménages les plus modestes de pouvoir acheter des produits alimentaires de qualité, frais et locaux, et aux agriculteurs de mieux vivre, devra faire l’objet de deux rapports gouvernementaux sous six mois. Ils détailleront sa mise en œuvre, et l’aide alimentaire comprendra désormais un critère de qualité. La loi abandonne aux rapports gouvernementaux la précision du fond de la mesure, qu’il s’agisse «des personnes bénéficiaires, des produits éligibles, de la valeur faciale, la durée, les modalités d’évaluation et de suivi, les modalités de distribution, les mesures à mettre en œuvre pour assurer une bonne adéquation entre l’offre et la demande».

 

Écocide : des garanties 

Le délit d’écocide figure bien dans le texte final. Il concernera uniquement les pollutions entraînant «des effets nuisibles graves et durables sur la santé, la flore, la faune». Avec des peines pouvant atteindre dix ans d’emprisonnement et 4,5 millions d’euros d’amende, un écocide sera désormais caractérisé comme toute pollution intentionnelle et grave dont les conséquences durent plus de sept ans. Le texte précise que ces nouveaux délits généraux de pollution s’appliquent, «s’agissant des opérations de rejet autorisées et de l’utilisation de substances autorisées, qu’en cas de non-respect des prescriptions fixées par l’autorité administrative compétente». La notion de déchet est aussi clarifiée, en supprimant la mention aux écoulements de substances dans les sols. Une précision importante alors que les maires de plusieurs communes ont récemment tenté, auprès des tribunaux administratifs, de faire considérer les pesticides comme des déchets. La suite du combat pour l’écocide se déroulera pour le gouvernement français au niveau international.

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