Les propriétaires ruraux veulent dépoussiérer le statut du fermage
La Section nationale des propriétaires ruraux (Snpr) constate un désintérêt grandissant des propriétaires à l’égard du bail rural. Pour y faire face, elle demande une réforme de la relation bailleur-preneur.
La Snpr estime que le statut du fermage, institué en 1946, ne protège plus suffisamment les propriétaires. «Il y a eu une évolution importante de la relation propriétaires - fermiers, voire même des dérives», explique Josiane Béliard, sa présidente. La section constate que beaucoup de propriétaires ruraux louent leurs terres sans connaître tous les tenants et aboutissants d’un tel engagement. Lorsqu’ils en découvrent les conséquences, ils souhaitent bien souvent récupérer leur propriété.
Chez les propriétaires plus informés, un grand nombre cherche des alternatives au fermage pour une utilisation plus optimale de leurs terres. Pour la Snpr, «si on ne réforme pas le statut du fermage, il y aura de moins en moins de mise en fermage demain».
Respecter les fondamentaux du contrat
Afin de donner un nouvel élan à la location des terres, la section plaide pour une réforme du statut du fermage visant à «rétablir la confiance». «Il faut un bail de fermage qui soit un véritable contrat» basé sur deux impératifs : une durée limitée et le respect de l’intuitu personae.
Avec la règlementation en vigueur, la durée initiale d’un bail rural est de 9 ans minimum, tacitement reconductible. Les propriétaires souhaitent pouvoir renégocier le bail à chaque renouvellement.
La Snpr constate aussi que même à la fin d’un contrat, il est difficile pour le propriétaire de vendre ou même de disposer de ses terres. Par peur de ne plus pouvoir les récupérer, certains propriétaires préfèrent laisser leurs terres vides, alors qu’elles pourraient profiter à un fermier pendant quelques années, explique la Snpr. Pour la section, il faut revenir à l’essentiel : «Un contrat a un début et une fin».
Les propriétaires dénoncent par ailleurs le non-respect de l’intuitu personae, base fondamentale d’un contrat.
En l’état actuel des choses, le fermier peut céder son bail à ses descendants ou son conjoint. L’accord du propriétaire est nécessaire, mais la Snpr estime que ce n’est pas suffisant : une cession engage une nouvelle partie et la signature d’un nouveau contrat devrait par conséquent intervenir. «Sur ce point, c’est non négociable, affirme Josiane Béliard. La cessibilité des baux doit être choisie et volontaire. Tout autre processus est une spoliation du droit de propriété».
Donner des garanties aux propriétaires
Lorsque le fermier ne paie pas son loyer, les propriétaires regrettent que la règle en vigueur ne soit pas toujours appliquée : le défaut de paiement doit entraîner la résiliation du bail.
La section revendique par ailleurs des ventes au prix «terre libre» pour les ventes en cours de bail au fermier (puisque le bail prend alors fin), mais également pour toute autre vente réalisée dans les 3 dernières années du bail (période qui peut être assimilée, selon la Snpr, à la fin du contrat).
Enfin, les propriétaires ruraux demandent la suppression de la révision du prix de location, actuellement autorisée la troisième année du bail. selon la Snpr, qui observe un décalage entre les prix pratiqués et ceux définis par arrêté préfectoral, cette possibilité destinée initialement à encadrer les prix, a vu ses effets pervers prendre le dessus.
Lorsque plusieurs preneurs potentiels se positionnent sur une terre en vente, certains auraient tendance à utiliser les failles du système et proposer un prix de location élevé pour «gagner» face aux autres candidats. Ils profiteraient, trois ans plus tard, du droit de révision et feraient ainsi revoir le prix à la baisse.
La Snpr, qui s’appuie sur l’exemple de l’Allemagne, demande la mise en place de contrats non révisables, signés sur la base d’un prix en cohérence avec ceux pratiqués sur le marché.
Propriétaires et fermiers : des revendications éloignées
Un compromis entre fermiers et propriétaires semble encore loin, les premiers plaidant pour plus de protection tandis que les seconds exigent plus de souplesse. Les fermiers demandent par exemple des préjudices de démantèlement. Inconcevable pour la Snpr qui explique que, dans le contexte actuel, toutes les exploitations ont vocation à s’agrandir. Demander un préjudice de démantèlement reviendrait par conséquent à imposer à l’intégralité des bailleurs souhaitant récupérer ou vendre leurs terres, le versement de dommages au preneur.