Maïs 2012 : la matière sèche sous haute surveillance
Cette année particulière n’a finalement pas trop pénalisé les rendements, mais elle laisse planer le doute sur la qualité nutritive des maïs.
La météorologie capricieuse de cette année a perturbé la culture et la récolte du maïs : dates de semis tardives, voire très tardives, puis mois d’août peu ensoleillé et septembre avec des températures matinales basses, et enfin stress hydrique pour les plantes en fin d’été… Tout cela a eu pour conséquence une récolte tardive avec de grandes difficultés pour en déterminer la date à l’avance. Parfois des chantiers ont été faits trop hâtivement et pour certaines parcelles la maturité du grain n’était pas encore au rendez-vous alors que les feuilles se desséchaient.
Cette année particulière n’a finalement pas trop pénalisé les rendements, mais laisse planer le doute sur la qualité nutritives des maïs : quelle attitude tenir devant un maïs atypique (trop vert, trop sec, pauvre en amidon…) en terme d’équilibre de ration et quelles réponses zootechniques en attendre ?
Les conséquences du manque d’eau en fin d’été
Une plante qui subit un stress hydrique peut voir sa valeur alimentaire diminuer car la digestibilité de la partie tige/feuille se dégrade plus ou moins. Dans ce cas, on peut constater un encombrement plus élevé et donc une ingestion plus faible par la vache laitière. Cela pourra être compensé en partie si le taux d’amidon est élevé, mais seulement si la ration ne dépasse pas 20% d’amidon ruminal.
Même si les réponses en lait sur ce type de maïs ne sont pas idéales, il convient de conserver les pratiques alimentaires habituelles.
La matière sèche
Cette année, les nombreuses estimations de MS réalisées par les conseillers d’Avenir Conseil Elevage ont apporté une aide supplémentaire à la prise de décision de récolter. Ainsi, dans la plupart des cas, les maïs ont été récoltés au bon stade. Il existe néanmoins des disparités de taux de MS selon les régions. Ce sera la particularité de 2012, impliquant la question suivante : que doit-on mettre en place lorsque le maïs n’a pas été récolté au stade optimal qui est de l’ordre de 32 % de MS ?
Cas des maïs récoltés trop humides
Leurs caractéristiques : une valeur énergétique faible (moins de 0.9 UFL) accompagnée d’une valeur d’encombrement élevée. En effet, l’excès d’eau dans une ration (avec des fourrages conservés) induit une diminution de la quantité totale ingérée par l’animal. Le repère à minima de la MS d’une ration est de l’ordre de 35%, concentrés compris. Il faut encore distinguer les maïs qui sont autour de 28% de MS et ceux en-deçà des 28.
• Avec un maïs à 28% de MS et un taux d’amidon correct 27-30% ; il est tout à fait envisageable d’atteindre un niveau de production correct. Une complémentation éventuelle par du concentré de production ou énergétique voire de pulpe sèche peut se concevoir si l’objectif de performances est élevé. Avec le cours des matières premières de ces derniers mois, il conviendra malgré tout d’évaluer l’intérêt économique de ce supplément de concentré.
• Pour les maïs en-dessous de 28% avec un taux d’amidon faible (moins de 26%) comme certains maïs après RGI, les choses risquent d’être plus compliquées car la vache laitière valorisent mal ce type de fourrage (pas assez énergétique, pas assez d’amidon, trop encombrant…. Si cela est possible, il faut privilégier ce fourrage pour les animaux qui ont des besoins plus faibles (génisses, animaux de viandes à l’entretien…). Quand cela est réalisable, on peut le distribuer en partie pour un deuxième lot de vaches laitières avec un potentiel de production plus faible. En dernier recours, il conviendra «d’assécher» la ration avec des aliments secs (pulpe sèche, luzerne…) ou par l’ajout d’amidon lent (maïs grain, par exemple). Mais cette complémentation supplémentaire va entrainer un surcoût sans garantie de résultat.
Cas des maïs trop secs au-delà de 35% de MS
Leurs caractéristiques : une digestibilité de la partie tige/feuille plus faible, un taux d’amidon élevé et lentement dégradable.
Un taux de MS élevé ne pénalise pas l’ingestion, c’est plutôt l’indigestibilité de la NDF (voisin de la paille), qui aura un effet négatif sur l’ingestion. Un amidon lent en partie by pass n’aura pas pour effet de «booster» la flore microbienne. Face à ce type de maïs, si les performances ne sont pas au niveau espéré, il est possible d’ajouter des sucres rapides (céréale, aliment liquide riche en sucre…) afin de redynamiser la flore ruminale. Pour ce qui est de l’ajout d’eau dans ce type de ration, les avis sont contradictoires. Une chose est sûre : l’eau ne va pas rendre la partie tige feuille plus digestible ; elle peut éventuellement améliorer le mélange de la ration en collant les fines particules (concentrés) aux plus grosses et réduire ainsi le phénomène de tri à l’auge.
Taux d’amidon : faire le lien avec la matière sèche
Avec une grande hauteur de tige et un épi plutôt moyen, il faut s’attendre à des taux d’amidon moyens (voire parfois plus faibles). Avec un taux de MS correct (30-32%), un taux d’amidon moyen (28-30%) n’est pas forcement pénalisant. En effet, dans le cas de rations constituées en grande partie de maïs ensilage ; la vache laitière valorise peu les points d’amidon supérieurs à 30%. Un maïs correct aura sûrement pour effet de limiter le gaspillage. Avant de prévoir un supplément, il sera donc intéressant de vérifier, par une analyse, la teneur en amidon de l’ensilage.
L’hétérogénéité des maïs de cette année invite fortement à réaliser des analyses de fourrage (si cela n’est pas déjà fait), ne serait-ce que pour apprécier le taux de MS afin d’évaluer précisément l’ingestion cet hiver. Après la pesée des aliments, la connaissance de la MS est un élément primordial du rationnement. Les valeurs UFL et PDI, le taux d’amidon… sont également des indicateurs intéressants pour établir la ration.
Pour finir, il n’est pas forcément nécessaire de se précipiter pour acheter les semences de l’année prochaine : attendre la sortie de tous les essais peut être pertinent pour faire le bon choix.
Conservation et maÏs atypiques
Le maïs est une plante qui se conserve bien. Néanmoins, pour les maïs atypiques il conviendra de redoubler de vigilance. Les silos avec un taux de MS faible peuvent subir des fermentations mal maitrisées au front d’attaque. Ceux avec un taux de MS élevé (présence importante d’air dans la masse) peuvent développer des fermentations de type acétique (vinaigre). C’est pourquoi avec ce type de fourrage, il convient de respecter encore davantage les recommandations habituelles : un avancement du front d’attaque de 10 cm l’hiver, 20 cm l’été, une reprise avec le moins d’entrée d’air possible…