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Odile Boone : agricultrice en lapins angora

Dans le cadre des Jeudis de la Somme, organisés par la Chambre d’agriculture, Odile Boone propose une visite guidée de sa ferme le 25 août prochain, à Jumel.

© AAP

 

«Vaincus sont ceux qui n’espèrent pas vaincre.» Cette phrase écrite par José Joaquin de Olmedo (avocat, politique et poète équatorien du XIXe siècle) en hommage à Bolivar, Odile Boone en a fait sa devise. Ne jamais rien lâcher, aller jusqu’au bout de ses intuitions, même si celles-ci sont perçues farfelues par certains, tel est cette agricultrice. «On m’a souvent considérée comme un ovni  dans le milieu agricole, mais tout ce qui a été engagé dans la ferme a porté ses fruits. Trente ans après, je sais que j’ai eu raison de suivre mes intuitions», dit-elle avec fermeté. Mais, pour y arriver, le parcours n’a pas été un long fleuve tranquille.
Arrivée dans la région, après son mariage, en 1982, Odile n’a qu’un projet en tête : s’installer et vivre à la ferme. Bien que non issue du monde agricole, elle a toujours été passionnée par le milieu et a donc suivi des études agricoles. Après avoir vécu une année à Montdidier dans la ferme de la belle famille, le couple s’installe à Jumel. Sur l’exploitation de 36 ha, ils font de la polyculture et des porcs à l’engraissement. Les crises successives mettent fin à cette dernière activité. «Nous n’avions que des projets restreints, car nous étions endettés, mais on était jeunes et heureux. Puis, la famille s’agrandissait», raconte Odile.
Odile s’investit dans la commune, à la paroisse, dans le milieu associatif et de l’école. «L’engagement, c’est l’héritage de mes parents. Ils étaient dans une communauté franciscaine. Je pense que cela m’a beaucoup développé le sens du partage, le besoin de faire ensemble, et ce rapport si fort à la nature qui est le mien. Puis, je ne conçois pas la vie sans les autres», confie-t-elle.

«Il faut sortir de notre petit monde agricole si l’on veut se développer.»
Côté agriculture, elle intègre le réseau Bienvenue à la Ferme dès sa mise en route, et suit sa belle-mère à la commission des agricultrices de la fédération. Elle sera à l’initiative de la création d’une formation sur «Apprendre à vendre et savoir accueillir à la ferme», mise sur pied en collaboration avec le CFPPA du Paraclet.
Une initiative imaginée à partir de sa propre expérience. Voyant que le corps de ferme offre des possibilités, et cherchant à tout prix à créer sa propre activité, elle se lance dans la production de lapins angora en 1984, après avoir lu un article dans la presse mettant en avant le potentiel économique de l’activité avec un faible investissement. L’idée : produire, récupérer la laine  et la vendre . Elle commence sa production avec cinq lapins en 1984. Aujourd’hui, elle en a 64, qui lui assurent une production de laine angora de plus de 250 kg par an.

La passion en partage
Très vite, elle se rend compte que vendre seulement le produit brut n’est pas rentable. D’autant que la Sica qu’elle a intégrée périclite, ainsi que la suivante qu’elle trouve dans les Hauts-de-Vienne. Toutefois, cette dernière renaît de ses cendres grâce à sa reprise par l’un des salariés. Fidèle à ses engagements, Odile continue à travailler avec eux. Mais cette fois-ci, hors de question de s’en tenir à la vente du produit brut. Si elle envoie toujours sa production dans les Hauts-de-Vienne, qu’ils transforment en pelotes de laine, en gants et paires de chaussettes, elle s’occupe de tricoter les pulls, les gilets, les bonnets et les écharpes.
Tout en développant son activité, elle suit des formations à tour de bras pour assouvir sa soif d’apprendre et affiner ses connaissances sur la vente directe, l’accueil du public, le tissage des textiles… «Il faut être curieux pour avancer et il faut sortir de notre petit monde agricole si l’on veut se développer», dit-elle.  Là encore, les projets émergent très vite.Outre la vente directe à la ferme, elle se lance dans les fermes pédagogiques et les fermes de découverte. Elle est d’ailleurs la première à être agréée «Ferme pédagogique» par le réseau Bienvenue à la Ferme en 1992, l’année aussi de son installation sur 40 ha. Partager sa passion tant avec les enfants que les adultes l’enthousiasme. «C’est une mine d’or ce type d’activités car, d’une part, on peut parler de notre métier, et, d’autre part, on est en contact direct avec nos clients. Or, ce sont eux qui définissent le marché. C’est un véritable atout pour nous», commente Odile.
Si la ferme s’anime très vite avec toutes les visites, celle qui ne veut pas qu’on la prenne pour une tricoteuse, mais pour une agricultrice, a une frustration. «Dans l’image de tous, un agriculteur, c’est celui qui produit pour nourrir les hommes. Moi, de ce côté-là, j’étais frustrée de produire quelque chose qui ne se mange pas. Du coup, dans le cadre des visites à la ferme, j’ai réalisé des goûters à la ferme. Pour ce faire, il fallait un produit. J’ai donc acheté un petit moulin pour transformer mon blé en farine, et faire ensuite du pain et des gâteaux», dit-elle. De quoi aussi «nourrir» la ferme pédagogique avec un autre thème : de la farine au pain. Depuis, le petit moulin est devenu objet de présentation et un gros moulin a  pris sa place, permettant à Odile de vendre pains et gâteaux sur les marchés.
L’avenir s’annonce serein pour elle. Mais son regard s’assombrit à l’évocation de celui de l’agriculture en général. «Il n’y a plus d’énergie collective actuellement au sein de ce milieu, et trop de politique dans notre agriculture», regrette-t-elle

 

 

L’exploitation
• 40 ha dédiés au blé, au pois, à la betterave, au colza et à l’escourgeon.
• Production de 64 lapins, dont le poil sert à la fabrication de pulls, d’écharpes, de gants et de chaussettes.
• Fabrication de pains

 

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