Opération communication pour les agriculteurs à la Foire expo de Picardie
C’est une expérience à laquelle les agriculteurs sont plus ou moins confrontés dans leur quotidien. Mais tous se sont prêtés au jeu du «découvre mon métier», face aux écoles et au grand public, lors de la Foire exposition de Picardie.
Comment est fabriqué le jus de pomme ? Pourquoi une vache doit-elle faire un veau pour produire du lait ? Ou encore, une poule peut-elle pondre plusieurs œufs par jour ? Telles étaient les questions des visiteurs, en grande majorité des écoles, à la Foire exposition de Picardie, qui avait lieu du 1er au 10 juin, à Mégacité, à Amiens. Pour y répondre, des producteurs samariens s’étaient mobilisés.
Certains sont des habitués de la communication et étaient comme des poissons dans l’eau. C’était le cas de Vincent Liénart, de la cueillette de Saint-Gratien. «Nous accueillons plus de deux mille enfants chaque année, surtout en juin, à la saison des fraises, et en septembre, pour les pommes.» L’activité du jour était celle de la plantation d’un fraisier dans un pot individuel, avec lequel repartaient les enfants. «Ils apprennent ainsi que d’une graine naît une plante, qui donne des fleurs, et qui donne une fraise.»
Bernard Nicolaï, pomiculteur du Domaine de Moismont, à Vron, ouvre aussi régulièrement les portes de son verger. Pour la foire, il avait axé son animation sur l’anti-gaspillage. «Nous expliquons aux enfants ce que nous faisons des fruits moches. Nous, producteurs, avons une carte à jouer dans cette sensibilisation. Et puis les enfants sont nos clients de demain !» Pressage de pommes, récolte du jus, puis dégustation au programme. La Jonagold, naturellement sucrée, est parfaite pour l’exercice, car elle régale les papilles des jeunes palais. «Si nous étions en présence d’un public du troisième âge, j’aurais plutôt choisi la Boskoop, plus acidulée.» L’occasion, donc, de présenter la richesse des variétés qui poussent dans la région.
Délicate question des phytosanitaires
Olivier Bouvet, polyculteur-éleveur d’Acheux-en-Vimeu, qui cultive notamment des betteraves et du lin, trouve aussi important d’échanger sur son métier lors des foires comme celle-ci. «Cela permet d’exposer les problématiques du métier. Et on se rend compte que les gens se sont fait une idée de l’agriculture complétement éloignée de ce que nous vivons au quotidien. Nous devons, par exemple, expliquer pourquoi on ne peut pas revenir au fonctionnement de la ferme de nos grands-parents.»
La question qu’il redoute le plus : celle de l’utilisation des produits phytosanitaires, «parce que c’est un sujet d’actualité brûlant, pointé par les médias, avec lequel on ne se sent pas à l’aise». Le professionnel répond sincèrement : «J’explique que nous avons besoin de soigner nos plantes comme nous soignons les gens. Et je précise qu’il y a un raisonnement avant chaque traitement, des seuils d’intervention à respecter, comme un nombre d’insectes avant lequel il n’est pas nécessaire d’intervenir.»
«Dialoguer avec les gens est important»
Alain Porquier, éleveur laitier à Tours-en-Vimeu, se prêtait, lui, à un jeu nouveau. Mais il semblait ravi. «Dialoguer avec les gens est important.» Avec l’animateur du Cniel, il faisait vivre en direct la traite d’une (fausse) vache, avant la dégustation d’un verre de lait. Et il s’étonnait de certaines remarques. «Les enfants ne savent pas tous que le lait sort de la mamelle.»
Une mise en pratique intéressante pour ces éleves de maternelle d’Oust-Marest, près du Tréport. «Nous avons mené un projet sur l’alimentation tout au long de l’année», explique l’institutrice. Et rien de mieux qu’un agriculteur pour parler de son métier.
Loïc Dumoulin : «le bien-être animal est au cœur des préoccupations»
Loïc Dumoulin a choisi l’élevage de poules pondeuses pour diversifier son exploitation. Mais pas n’importe quel élevage : un poulailler plein air, qui répond à l’attente des consommateurs en termes de bien-être animal.
En plus des 92 ha de blé, betteraves, maïs et colza qu’ils cultivent à Hailles, près de Moreuil, Loïc et Florent Dumoulin élèvent, depuis octobre 2018, 3 950 poules pondeuses. L’élevage des frères suscitait le questionnement à la Foire exposition de Picardie.
«La construction de ce poulailler (un investissement d’1,6 million d’euros, ndlr), en partenariat avec Matines, a été pensé autour du bien-être animal. C’est une réponse à la volonté du consommateur», confie Loïc. Il s’agit d’un poulailler plein air, de 5 ha (4 m2 par poule), avec jardin d’hiver. Les poules restent un an et quelques mois à Hailles, avant le renouvellement. «Et plus ça va, plus elles restent longtemps, car elles se sentent bien !»
Du temps à passer
Les questions des enfants tournaient beaucoup autour du cycle de la poule et de l’œuf : comment vivent les poules, que mangent-elles, combien d’œufs pondent-elles, pourquoi les œufs peuvent être de couleurs différentes ? Et l’éleveur pouvait aussi glisser qu’une telle activité implique du temps à passer. «Entre cinq et six heures par jour, entre la surveillance et les démarches administratives», assure-t-il.
La journée commence par un tour d’élevage, avec le contrôle des consommations des poules, puis le ramassage des œufs. «Nous faisons un premier tri manuel, où nous écartons les œufs sales, cassés et coulants. Ils sont ensuite mis en palette automatiquement.» Le camion de collecte Matines passe trois fois par semaine. «C’est du travail, mais c’est une routine.»
A. P.