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Grandes cultures
Orama : ne pas compromettre la compétitivité des grandes cultures

Les producteurs de grains très inquiets des propositions de réforme de la Pac et des décisions qui pourraient être prises en matière d’environnement.

© aap
«Nous ne voulons pas d’un bilan de santé bis» a déclaré Philippe Pinta, le président d’Orama(*), à l’adresse du ministre de l’Agriculture, lors du Sommet du Végétal qui s’est déroulé à Evreux, les 23 et 24 janvier. Le président d’Orama craint avant tout que des décisions irréfléchies dans le cadre de la réforme de la Pac aboutissent à dégrader la compétitivité des grandes cultures et à créer des distorsions de concurrence avec nos voisins allemands. La France est aujourd’hui le grenier à blé de l’Europe. «Une situation loin d’être acquise» s’inquiète Philippe Pinta, redoutant le scénario du porc et de la volaille qui a vu la production française diminuer tandis que celle de l’Allemagne progressait.

Eviter les distorsions de concurrence
«Il est stratégique qu’il n’y ait pas de distorsions entre un céréalier français et un céréalier allemand», insiste-t-il. Sont visées les propositions diverses et variées pour coupler ou cibler les aides sur telle ou telle production, telle région ou tel type d’exploitations. Et notamment le souhait du ministre de l’Agriculture de surprimer les 50 premiers hectares. Orama a calculé que si le projet était adopté, seuls les cinquante premiers hectares bénéficieraient d’aides, car il ne resterait rien pour les hectares suivants, verdissement mis à part.
Les propositions de la Commission en matière de verdissement sont loin d’être partagées. Orama ne remet pas en cause le taux de 30 %, mais estime que le taux de surfaces d’intérêt écologique projeté à 7% est «une aberration» et s’apparente à «de la jachère obligatoire» S’agissant de la convergence des aides au sein de chaque Etat membre, Philippe Pinta demande à ce qu’elle soit «progressive et linéaire sur une période allant au-delà de 2020», la proposition d’une première marche à 40 % en 2014 devant en tout état de cause être abandonnée.

Divergences
Sur ce sujet, les producteurs de grains comme la Fnsea ont réussi à convaincre  le ministre de l’Agriculture : «On n’aura pas de taux unique en 2020, la plupart des pays qui sont sur les références historiques sont d’accord» là-dessus a assuré Stéphane Le Foll. En revanche, il tient à ce que la prochaine Pac contribue au rééquilibrage des aides. «Les écarts sont très importants en France, nous devons maintenir des aides suffisantes en polyculture élevage et nous devons primer un peu plus les premiers hectares que les autres, sans remettre en cause la pérennité de l’ensemble de l’agriculture» a-t-il confirmé.
Sur le verdissement, le ministre s’inscrit dans les propositions de la Commission. Pas question donc de les remettre en cause. Le ministre tient à avoir «un cadre européen précis» pour éviter les distorsions de concurrence qui ne manqueraient pas d’apparaître si les Etats avaient le choix des mesures.
Très attendu sur les questions environnementales qui brident la compétitivité des grandes cultures, le ministre n’a pas convaincu. «Si nous n’anticipons pas, elles nous rattraperons» a-t-il indiqué. Alors que les producteurs de grains attendaient des réponses précises sur la protection des aires d’alimentation de captage, la création de retenues collinaires, la protection des plantes et l’enrobage des semences, la sélection variétale et les biotechnologies. S’ils sont prêts «à produire autrement» comme le souhaite le ministre, les producteurs de grains aimeraient au préalable que les efforts déjà engagées soient reconnus et que les innovations scientifiques et techniques soient prises en compte. Là-dessus, il faut reconnaître que le malentendu entre le ministre et les producteurs de grains n’a pas été levé.
(*) Orama est l'union qui fédère trois associations spécialisées de la Fnsea l'Association générale des producteurs de blé (Agpb), l'Association générale des producteurs de maïs (Agpm) et la Fédération des producteurs d’oléo-protéagineux (FOP).
Les céréales ne sont pas la cause des difficultés de l’élevage
«Le plus souvent, ce qui déclenche l’arrêt d’un élevage ce sont les contraintes réglementaires, plutôt que les problèmes économiques», a déclaré Xavier Beulin, président de la Fnsea, lors du Sommet du végétal. Il a reconnu cependant que «la volatilité des cours des matières premières pose des problèmes à l’élevage lorsqu’elle est excessive». Selon lui, la Pac n’est pas la seule réponse à la volatilité, et l’idée de mettre en place un droit à paiement unique (DPU) unifié à l’hectare ne règlerait pas le problème. Faisant référence à l’organisation inter-filière des agriculteurs, Xavier Beulin a insisté sur le fait que le fonds de modernisation céréaliers éleveurs devait être mené à son terme. Mais il assortit cette initiative de deux demandes : que les dispositifs de négociations existants, pour ajuster les prix avec la grande distribution, soient utilisés lorsque les prix des matières premières sont en hausse, et qu’il y ait une coresponsabilité inter-filières, et des filières avec les pouvoirs publics.

Philippe Chalmin : «le monde a besoin de la France et de l’Europe»
En matière de production de grains, «le monde a besoin de la France et de l’Europe», a assuré Philippe Chalmin, professeur à Paris Dauphine et président de l’Observatoire sur la formation des prix et des marges des prix alimentaires. En effet, selon l’expert des matières premières, la consommation de céréales (essentiellement blé et maïs) va progresser de 350 millions de tonnes dans les dix ans qui viennent en raison de la croissance démographique et de l’élévation des revenus, notamment dans le Sud-est asiatique. Outre la Chine qui a «l’obsession de sa sécurité alimentaire», l’Afrique et le Moyen Orient vont rester structurellement déficitaires, estime Philippe Chalmin. Et pour ce qui est du bassin méditerranéen, il s’agit d’un marché qui représente 40 % de la demande mondiale et qui est «à notre porte». Contrairement aux pays riverains de la Mer noire qui sont soumise à de forts aléas climatiques et au Brésil qui rencontre des difficultés de logistique,  la France et l’Europe, de par leur climat, sont en mesure d’assurer la régularité d’approvisionnement dont ces pays ont bien besoin pour éviter les tensions sociales et politiques. Quant au prix de marché des céréales «le prix moyen 2013 devrait être inférieur à celui de 2012» pronostique Philippe Chalmin. «Si la climatologie est normale» a-t-il toutefois précisé.
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