Pressions syndicales sur Bruxelles pour la levée de l’embargo
La crise du porc est aggravée par les mesures de rétorsion commerciales prises par la Russie à l’encontre de l’UE. Précisions.
Les organisations agricoles de l’UE font pression sur la Commission européenne pour qu’elle multiplie les initiatives afin d’obtenir la réouverture «étape par étape» du marché russe pour les produits du porc qui ne sont pas soumis à l’embargo politique imposé par Moscou.
Le secteur du porc, comme celui du lait, connaît «de toute évidence une situation très sérieuse», a admis Phil Hogan, le 18 janvier, à Strasbourg, devant la commission de l’agriculture du Parlement européen.
Bruxelles s’est efforcée d’amener la Russie à ouvrir son marché aux produits du porc (lard, graisses et abats), qui ne sont pas soumis à l’embargo politique sur les produits agroalimentaires de l’UE, mais à une interdiction d’accès liée aux cas de peste porcine africaine dans les Pays baltes et en Pologne, a rappelé le commissaire européen à l’agriculture.
Il ajoutait que le président de la Commission, Jean-Claude Juncker, a même écrit à Vladimir Poutine pour tenter de «normaliser les relations commerciales. Nous continuons de faire des propositions et modifier notre certification vétérinaire [...], mais en vain à ce stade», a-t-il regretté.
Certification «étape par étape»
Les organisations et coopératives agricoles de l’UE (Copa-Cogeca) maintiennent néanmoins la pression. Dans une lettre adressée le 20 janvier par leurs présidents à Jean-Claude Juncker, elles jugent «très important» que l’exécutif européen «prenne toutes mesures pour reprendre dès que possible les négociations techniques avec les autorités compétentes russes sur les certificats d’exportation de l’UE et les restrictions vétérinaires» concernant le cinquième quartier du porc.
En France, les manifestants des diverses régions du pays pointent tous l’embargo russe comme étant une des causes conjoncturelles des difficultés, plus globalement structurelles, rencontrées par les filières d’élevage. Toujours en France, la pression provient également de la grande distribution, dont certaines enseignes éminentes ont envoyé le même message que les producteurs : l’embargo russe doit être levé pour pouvoir reprendre les exportations de surplus de porcs.
«Nous pourrions soutenir une feuille de route, négociée par la Commission, qui engage les deux parties à poursuivre les négociations pour la reconnaissance de la régionalisation de l’UE étape par étape, annonce le Copa-Cogeca. Compte tenu de la nouvelle situation épidémiologique, une proposition mise à jour de l’UE pourrait être transmise aux services vétérinaires russes comme base pour entamer des consultations techniques.»
Ne pas attendre le verdict de l’OMC
«Nous estimons que la Commission devrait saisir toutes les occasions pour travailler sur les détails techniques du dossier avant la remise des conclusions du comité de règlement des différends de l’OMC» sur la plainte déposée contre l’embargo sanitaire russe sur les produits du porc, soulignent également les organisations agricoles. «Malheureusement», pour le secteur, même si la Commission devait avoir gain de cause à l’OMC, «ce qui pourrait prendre plus d’un an du fait des possibilités d’appel, il faudrait encore négocier les certificats avec les autorités européennes, ce qui repousserait un éventuel accord sur ce point à une date dans un futur lointain», ajoutent-elles.
Ce dossier est «d’une grande importance», car il s’agit de la vente de produits «pour lesquels le secteur du porc de l’UE n’a pas pu trouver des marchés alternatifs équivalents», conclut le Copa-Cogeca.
Aides au stockage privées : - 3 % demandés
Selon un relevé publié le 18 janvier par la Commission européenne, les demandes d’aide au stockage privé de la viande porcine ont porté dans l’UE sur 70 241 tonnes (dont 67,3 % pour une durée de 90 jours) au cours des deux premières semaines d’application de ce régime mis en œuvre le 4 janvier. Elles ont été déposées à concurrence de 23,4 % en Allemagne, 22,9 % en Espagne, 14,8 % au Danemark, 11,9 % aux Pays-Bas, 7,4 % en Pologne, 7 % en Italie, 2,7 % en France. Les jambons désossés représentaient 53,9 % des quantités concernées, le lard 10 %. Le précédent régime d’aide au stockage privé instauré début mars 2015 et clôturé fin avril avait permis de retirer temporairement du marché quelque 65 000 tonnes dans 18 Etats membres.