Prix de la betterave : ça vaut le coup d’en faire encore ?
Le 18 avril, Tereos annonçait, dans un communiqué, un prix final de betteraves de 28,40 €/t, supérieur de 14 % au prix annoncé lors de la signature des contrats. Qu’est-ce qui se cache derrière ce prix ? Quelle est la politique de prix des autres groupes sucriers ?
28,40 €/t chez Tereos, 27 €/t chez Cristal Union. A quoi correspondent ces prix ? Avant sa dernière annonce, la coopérative Tereos avait annoncé un prix minimum de base garanti à 25 €/t pendant deux ans (prix incluant celui de la pulpe, ndlr). Cristal Union évoquait, elle, un prix pivot de 27 €/t (prix incluant notamment celui de la pulpe) pour trois ans. Quant à Saint Louis Sucre, point de prix de base garanti, mais un prix de la betterave corrélé au prix des sucres vendus au niveau de Südzucker pour l’ensemble de ses filiales, tant sur le marché européen que le marché mondial, et sur la base d’un contrat d’un an pouvant aller jusquà trois ans. Fin mars, les planteurs ont perçu 85 % du prix prévisionnel estimé à 20,65 €/t à 16° betterave entière (pulpes comprises également), équivalent à 22,20 €/t à 16° betterave décolletée. Saint Louis Sucre s’est engagé cependant à verser fin juin le solde des 15 % et un supplément de prix, dont on ne connaît pas la teneur pour le moment, qui sera négocié en commission de la répartition de la valeur.
A ces prix s’ajoutent des indemnités, qui existaient déjà, mais qui ont été revalorisées ou prolongées du fait de l’extension de la campagne. Celles-ci portent autant sur les arrachages précoces, les pertes dans les silos en fin de campagne, la protection hivernale, etc. Dans certains cas, des crédits sont attribués pour améliorer l’accès aux silos. Dernier élément entrant dans la construction du prix final : la rémunération du capital pour les adhérents des coopératives, sous forme d’intérêts sur les parts sociales ou de dividendes.
Derrière les annonces
Rappelons que la campagne s’achève et que les prix ne sont pas entérinés. Il n’empêche. Dans un contexte fortement concurrentiel entre les groupes sucriers, et en prévision des assolements de juillet prochain, attirer le «chaland» s’impose. Tereos a donc ouvert le bal avec son communiqué du 18 avril, annonçant un prix final - nommé quelques lignes plus tard «prix moyen prévisionnel de 28,40 €/t» -,
qui intègre «le prix de base, les primes versées au titre de la campagne 2017-2018, les intérêts aux parts sociales et le versement de dividendes». Les dividendes versés en 2018 devraient s’élever à 1,70 €/t des betteraves contractées, dont 0,84 €/t versé en février 2018, correspondant en fait à la campagne précédente. «Dans les campagnes précédentes, il fallait un an pour faire remonter les dividendes. A présent, comme nous sommes en coopérative unique, il est possible de remonter les dividendes en attente», explique Thierry Sergeant, représentant des planteurs de Tereos de Boiry.
Une annonce prématurée ? «Non, répond-il. Nous avons connaissance des chiffres, puisque les sucres ont été vendus. On peut donc les communiquer aux planteurs. On sait que pas mal d’entre eux ont des problèmes de trésorerie. En leur donnant ces chiffres, cela peut les rassurer.» Et la coopérative d’assurer qu’en dépit des marchés en berne, elle pourra maintenir son engagement du prix minimum de base garanti de la betterave à 25 €/t durant deux ans. «Après on verra suivant les marchés. Mais on ne pourra pas donner ce que l’on n’a pas», prévient-il.
Du côté de chez Cristal Union, il faudra attendre l’assemblée générale de la coopérative, le 23 mai, pour savoir de quoi se compose précisément le prix pivot. Gageons qu’il comprendra des indemnités et des intérêts de parts sociales. Dans tous les cas, bien que Cristal Union ne souhaite pas entrer dans les détails, «si les campagnes prochaines se déroulent dans un contexte de marchés en berne, il sera compliqué pour nous de tenir cet objectif», reconnaît Jérôme Fourdinier, président de la coopérative de Sainte-Emilie et membre du CA de Cristal Union.
Assurer un prix au moins équivalent au coût de production de la betterave (25 €/t) sera tout aussi difficile chez Saint Louis Sucre, si «les prix dépréciés sur les marchés durent toute une campagne. On fera en sorte que le supplément de prix soit le meilleur possible, mais il sera aussi fonction des résultats de l’entreprise», indique Thomas Nuytten, directeur betteravier de Roye et d’Eppeville.