Projet de loi foncière : les propositions de la FNSafer
Protéger et valoriser sont les thèmes autour desquels la FNSafer, l’APCA, la FNSEA et JA ont remis leurs propositions pour le projet de loi foncière, la semaine dernière, au ministre de l’Agriculture.
La loi foncière aurait dû être votée. Elle ne l’est toujours pas. Si le gouvernement se montre timoré, «c’est parce qu’il craint d’ouvrir la boîte de Pandore et de générer des conflits, comme d’ouvrir le sujet sur le statut du fermage. Il y a beaucoup plus de consensus sur le sujet que le gouvernement ne l’imagine. Et avec les évolutions que connaît l’agriculture aujourd’hui, il est temps d’avoir une loi foncière qui colle à la réalité du terrain», dit Muriel Gozal, directrice générale de la FNSafer. Et bien une loi, et pas des ordonnances, comme il se murmure dans les couloirs du gouvernement.
Entre le développement des formes sociétaires, celui du travail à façon, la concentration des exploitations, l’artificialisation galopante des terres et le rachat de terres des Chinois rapporté par la presse, le gouvernement a fini par s’emparer du sujet. Il a donc demandé à la FNSafer, à l’APCA, à la FNSEA et aux JA de coucher sur papier leurs propositions sur le projet de loi. Celles-ci devraient être mises en débat à l’automne. Mais en raison d’un calendrier gouvernemental très chargé, la loi ne devrait être promulguée qu’en 2020. En attendant, les organisations ont rendu leur copie au ministre de l’Agriculture la semaine dernière.
Protéger le foncier
Rien de mieux pour protéger le foncier que de le mettre sous la protection de la nation, selon les organisations. «Aujourd’hui, c’est incontournable de se saisir de cette ressource qui est non-renouvelable et grignotée par l’artificialisation des terres et la constitution des friches», indique Muriel Gozal. Sa protection serait d’intérêt général, comme sa mise en valeur et sa régulation, afin de réhabiliter les terrains en état d’inculture ou considérés comme des friches pour l’exercice d’une activité agricole, forestière ou agro-sylvo-pastorale.
Cette disposition serait introduite dans le Code rural et de la pêche maritime et permettrait la protection du foncier. «Derrière cette protection, c’est l’indépendance de l’agriculture française qui est en jeu», insiste Thierry Bussy, vice-président de la Safer Grand Est.
Assurer la transparence des marchés
Qui dit régulation, dit transparence de tous les marchés du foncier, contrôle ciblé et efficace des marchés et des prix, et orientation de ces marchés en fonction des objectifs poursuivis par les politiques publiques, des besoins des territoires et des individus.
Pour ce faire, un guichet unique Safer pourrait être créé, qui s’appliquerait à l’ensemble des marchés, dans l’objectif de faciliter l’accès au foncier et de promouvoir une concurrence loyale et équitable, et ce, sans alourdir les formalités administratives pour les entreprises.
Assurer le contrôle
Dernier axe : assurer le contrôle des projets d’exploitation, comme de l’ensemble des marchés immobiliers et mobiliers. Pour le contrôle des projets d’exploitation, celui-ci serait fondé sur des objectifs et non plus sur des critères, pour passer d’une application mécanique des règles à une application concrète, qui confronte la pertinence et l’économie des projets en concurrence aux besoins ou aux enjeux des territoires et de l’agriculture. Une fois cela dit, le contrôle ne saurait être limité à la sanction. Il doit aussi permettre de trouver, avec les acteurs locaux représentant le territoire, des solutions alternatives pour accompagner les parties prenantes.
Quant au contrôle de marchés immobiliers et mobiliers, il pourrait s’exercer en améliorant les droits de préemption existants et en instaurant un agrément des mutations de parts de société. Ce que pratiquent déjà les Allemands. Dans cette même orientation, les organisations proposent d’encourager, par des mesures incitatives, notamment fiscales, l’orientation du foncier. Il s’agirait, par exemple, de réserver le taux fixe de droit d’enregistrement de 125 € aux seuls acquéreurs qui participent aux travaux sur les lieux de façon effective et régulière ou permanente, ou de permettre aux Safer de démembrer une exploitation sociétaire sans fiscalité des plus-values.
L’enjeu est de taille, comme le rappelle Thierry Bussy : «Si on abandonne le contrôle de structures, c’est la régulation des marchés fonciers agricoles qu’on abandonne.» C’est clairement le modèle agricole qui est en jeu dans notre pays.