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Retrouver le chemin du bon sens dans les normes agricoles

Après avoir présenté au Sénat le rapport dont il est rapporteur, Daniel Dubois revient en détail sur ses propositions, et livre une analyse personnelle du sujet.

Daniel Dubois prône le dialogue, et une forme de management politique.
Daniel Dubois prône le dialogue, et une forme de management politique.
© AAP


Le sujet est un véritable serpent de mer en agriculture : en vingt ans, chaque ministre de l’Agriculture s’est fendu à sa prise de fonction d’une tirade sur la simplification, avant que son successeur ne dresse un tableau empiré de la situation. Comment sortir de cette incessante spirale des normes dont on dit souvent qu’elle tue l’agriculture ? C’est la tâche à laquelle se sont attelés Daniel Dubois (rapporteur), Gérard Bailly (président du groupe de travail) et sept de leurs collègues sénateurs.

Un constat lucide
Le premier temps est celui du constat et là, les chiffres sont hallucinants : plus de 15 000 normes concernent de près ou de loin l’agriculture. Un ordre de grandeur qui explique à lui seul le sentiment d’overdose. Mais paradoxalement, les agriculteurs n’y sont pas hostiles ! Parfois même, ils les créent eux-mêmes, notamment avec les cahiers des charges des labels et AOC. Ce qui exaspère, c’est la surenchère, l’emballement, l’accumulation ou le changement permanent. A ce propos, Daniel Dubois pointe le fait «qu’en France nous n’évaluons jamais les effets de nos décisions, ni après leur application, ni avant dans le cadre d’une expérimentation». Et dès lors de proposer que toute norme soit construite avec obligatoirement une phase de construction en associant systématiquement la profession, qu’une analyse d’impact économique soit réalisée, qu’une expérimentation soit mise en œuvre et qu’une évaluation soit réalisée dans un délai de trois à cinq ans après mise en œuvre avec abrogation des dispositions ayant un effet négatif.

Rien que l’Europe
L’autre faille pointée par le sénateur vient de la surtransposition chronique des directives européennes. «On les transpose en augmentant le niveau de contrainte ou de complexité, ce qui fait qu’au final, elles font perdre de la compétitivité (cas des ICPE), elles sont incompréhensibles ou mal vécues (rigidité des déclarations Pac), ou qu’elles aboutissent à une impasse (règles sur les prairies…); sans compter que leur complexité rend l’application subjective, difficile à interpréter pour les administrations dont les décisions sont trop souvent attaquées.

Donner de la légitimité à la demande
Le sénateur en est convaincu, apporter une méthode pour alléger le poids des normes (et pas seulement en agriculture) est un enjeu politique majeur : «c’est un sujet sur lequel on est au bord de la rupture avec les citoyens. Le prochain gouvernement, quel qu’il soit, ne peut pas le sous-estimer». Ensuite, il faut une légitimité à la démarche. «Nous devons faire adopter un plan de simplification par le Conseil supérieur d’orientation de l’économie agricole et agroalimentaire avec des objectifs chiffrés. Ce plan doit être opposable aux autres ministères, et un rendu annuel doit être fait au Parlement pour en assurer l’efficacité et le suivi».

La clé est dans le dialogue
Les points clés de la démarche de Daniel Dubois sont d’un côté la légitimité de la démarche, qui doit être engagée au bon niveau. Il parle d’ailleurs du «management politique, pour faire vivre le plan de simplification comme un plan d’entreprise. Ensuite, un élément clé est l’association de la profession. En associant la profession, on évite de mettre en œuvre des normes applicables. Le ministre de l’Agriculture essaie en général de le faire, ce n’est pas le cas des autres. Du coup sans associer, sans entendre les messages de la profession, sans évaluer ou tester avant de généraliser, on arrive inéluctablement à un rejet. Dans le pire des cas, les normes peuvent n’avoir aucune acceptabilité, et même devenir le produit d’une minorité hostile. Cela suit les mêmes principes que les débats entre urbains et ruraux. Nous devons vivre ensemble, et pour cela, nous devons nous entendre, faute de quoi tout devient clivant». Un sentiment que bon nombre d’agriculteurs partagent aujourd’hui.

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