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Sécheresse : la FDSEA demande la reconnaissance de l’état de crise

Malgré le retour de la pluie, les conditions superficielles restent sèches, et certains dégâts sont irréversibles pour les fourrages et les cultures industrielles. La FDSEA demande à l’Etat de prendre les dispositions nécessaires.

Les prairies sont rases depuis plus d’un mois et les éleveurs complémentent les animaux en puisant dans les stocks.
Les prairies sont rases depuis plus d’un mois et les éleveurs complémentent les animaux en puisant dans les stocks.
© F. M.

Le bureau de la FDSEA s’est réuni ce mercredi 8 août, en session commune avec celui des Jeunes agriculteurs. La première partie de ce bureau a été consacrée à la situation de sécheresse du département. Le tour des récoltes a été réalisé sur l’ensemble des secteurs et, globalement, en céréales, c’est une moisson certes qualitative, mais dont le volume est en retrait de 10 à 15 %. La bonne nouvelle de la moisson vient de la reprise du cours du blé, qui retrouve un plus haut niveau depuis trois ans, et qui vient compenser la baisse de rendement.
La situation est beaucoup plus alarmante pour les fourrages et les cultures d’automne, fourragères et industrielles. Côté fourrages, la situation est très tendue pour les prairies et les maïs. Pour les prairies, la pousse est bloquée depuis bientôt deux mois, et on sait d’ores et déjà que la production d’herbe sera inférieure d’un tiers voire plus que lors d’une année normale. Ce manque a un effet domino sur les stocks, qui sont mis à contribution. Et la situation est aussi compliquée en maïs : la sécheresse absolue depuis plus d’un mois a non seulement fait avancer les stades prévisionnels de récolte de plus de quinze jours, voire un mois par endroit, mais elle a aussi pour effet de bloquer la pousse, de faire dessécher et mourir les feuilles inférieures, voire de faire avorter les épis. Dans les situations extrêmes, les ensilages débutent actuellement, car les tiges sont à un niveau élevé de matière sèche, et les épis ne donnent rien…
(cf. article p.17).
Côté cultures industrielles et notamment pommes de terre, certaines parcelles non irriguées surtout, mais aussi irriguées parfois, présentent des déficits de rendement qui ne seront pas rattrapables. La question de la capacité à honorer certains contrats est posée et, là encore, des difficultés «domino» risquent de se produire, puisque certains prévoient l’obligation de fournir le volume contracté en se fournissant sur le marché libre, lequel, bien sûr, s’emballe.
Qu’il fasse chaud et sec l’été, ce n’est pas imprévisible, mais que ce soit à ces niveaux et durant aussi longtemps, ça l’est ! C’est d’autant plus paradoxal que le niveau des nappes, et donc des réserves d’eau en sous-sol pour les usagers, les agriculteurs ou les industriels, ne présentent pas de signes de faiblesse à ce jour. Aussi se retrouve-t-on dans des situations dans lesquelles l’Etat peut activer des dispositions spécifiques pour les agriculteurs, qui n’ont parfois en soit aucune conséquence directe, mais qui ouvrent l’accès à d’autres dispositions qui, elles, sont efficaces.
C’est ainsi que la FDSEA a fait la demande au préfet de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle et de cas de force majeure dans tout le département de la Somme. Ces reconnaissances sont des préalables à de nombreux dispositifs. En premier lieu, à titre individuel, même si on recommande à tout agriculteur assuré de faire une déclaration de perte à titre conservatoire, la reconnaissance de catastrophe renforce la prise en compte de l’intempérie. En second lieu, à titre réglementaire, les reconnaissances de cas de force majeure peuvent ouvrir des dérogations collectives sur les implantations de Cipan (comme en 2015, par exemple), sur les SIE (l’Union européenne a annoncé de la souplesse pour les agriculteurs victimes de la sécheresse), sur les jachères (autant avoir une validation officielle).
A titre d’aide financière, c’est aussi le cas pour le dégrèvement de taxe sur le foncier non bâti et sur les reports de cotisations sociales. Et, enfin, à titre contractuel, c’est là une des rares causes invocables dans certains contrats de dérogation à l’obligation de livraison. Pour l’ensemble de ces raisons, la FDSEA  a formulé sa demande complète, et a invité le préfet à mesurer sur le terrain l’ampleur des difficultés pour permettre une prise de décision rapide.


REACTION de Françoise Crété
La situation est sérieuse

ça y est, les médias généralistes ce sont enfin rendu compte que la sécheresse n’importune pas que le vacancier ou le citadin en quête d’ombre et de fraîcheur, mais touche aussi les acteurs économiques. En agriculture, c’est le fruit d’une année de travail qui est en péril, et la situation des années futures. Nos fermes sont encore marquées de l’année 2016, car 2017 n’avait, ni en prix, ni en volume, suffit à panser les plaies. Nous ne sommes pas en état de supporter de nouvelles difficultés, et le sens de notre démarche est bien de tout activer pour ne pas en rajouter pour les agriculteurs. Récolte des jachères, j’assume, mais je considère qu’il n’y a pas de question à se poser. Semis des Cipan et SIE : idem, tant pour la date du 20 août qui ne sera pas tenable partout, malgré la moisson précoce, que sur la pertinence. Si la pluie ne vient pas, nous n’allons pas jeter de la semence, du fuel, des pièces d’usure et du temps par la fenêtre si ça ne lève pas. Laissons chacun juge de la pertinence et de l’efficacité des semis. Soyons clairs, avec les annonces de la commission, les décisions d’assouplissement viendront probablement, mais sans doute tard, et je ne veux pas que les agriculteurs se dépêchent de semer aujourd’hui et se disent après «si j’avais su, je n’aurais pas fait ces choix idiots». Enfin, je regarde avec beaucoup d’inquiétude les situations fourragères et de cultures d’automne. Faut-il des sécheresses chaque année pour qu’on se souvienne que le maïs s’est déployé après celle de 1976, car on ne peut pas compter nourrir ses bêtes facilement chaque année avec six mois de pousse d’herbe, dont les trois mois d’été ?
L’incertitude est trop grande. Que ce soit par les maïs en élevage ou pour les cultures industrielles, les conséquences se verront sur les trésoreries dans un ou deux trimestres. Notre devoir est de faire preuve aujourd’hui d’anticipation, et au moment venu, avoir à notre disposition un éventail de solutions plus large. Enfin, la protection des exploitations, que ce soit en chiffre d’affaires, en marge ou en volume de production, sera une des clés de voûte de la prochaine Pac. Collectivement, il nous faudra avoir des décisions plus unanimes que de laisser chaque agriculteur face à un choix qui peut le mettre en péril.

Assurés : faites des déclarations à titre conservatoire

Pour l’ensemble des productions non encore récoltées (lin, maïs, betteraves, pommes de terre, etc.),  mais assurées par un contrat type multirisque climatique, la FDSEA recommande de faire des déclarations de dégâts à titre conservatoire. En effet, même s’il est trop tôt pour être sûr d’une perte avérée en volume, nul ne sait ce que les récoltes comporteront de richesse (amidon, fibre, matière sèche…), ce qui ne sera connu qu’après enlèvement et transformation. Dès lors, une déclaration permet de «couvrir ses arrières», et une démarche collective massive ne pourra que renforcer l’analyse de la situation pour les autorités administratives.

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