SIE : on peut, on doit, ou on peut ne pas ?
Alors que la moisson est achevée, et les travaux post-moisson bien avancés, la question se pose de l'implantation des surfaces d'intérêt écologique (SIE). Le point avec la FDSEA 80.
Faut-il ou pas semer les Cipan comptant dans les surfaces d'intérêt écologique ? La question est de mise au quotidien, avec, une fois de plus, des réponses techniques, économiques et administratives en total déphasage. D'un point de vue technique, semer des SIE ou de simples Cipan aujourd'hui n'est pas d'une grande pertinence économique ou agronomique. En effet, entre l'usure accrue du matériel dans les sols secs, la faible chance de levée en l'état, et le fait que les propriétés visées par l'implantation de telle ou telle espèce ne sera pas atteint avec une levée tardive ou incomplète, rien ne plaide pour une implantation et la simple question devient un problème.
Le report, « une poudre aux yeux »
Selon l'administration, il n'y a pas de problème. La date limite de semis des mélanges de Cipan déclarées en SIE étant fixée au 7 septembre pour que la fin de la période de 8 semaines en terre corresponde au calendrier des zones vulnérables, cela ne pose pas de problème d'un point de vue strictement réglementaire. Néanmoins, à l'heure où le ministère se félicite d' « avancées » en autorisant le report de la date de semis de ces semis pour une liste de départements définis - la Somme n'en fait pas partie -, il apparaît aux yeux d'un certain nombre d'agriculteurs et de la FDSEA 80 qu'il ne s'agit que « de la poudre aux yeux ». En effet, selon l'organisation syndicale, « permettre à un département de reporter sa date limite d'implantation ne fait que résoudre un souci administratif et ne répond pas au souci de faisabilité ou de pertinence des implantations ».
Décalage des semis, semis sans mélange ?
Dès le mois de juin, la FDSEA de la Somme a sollicité auprès de l'administration des dérogations pour permettre une plus grande liberté dans les choix d'implantation. La raison était alors simple : un effet « Covid » redouté avec des marchés agricoles perturbés, rebattant les cartes des assolements et donc les choix d'emplacement et d'espèce des SIE. C'est le cas par exemple pour les producteurs de lin, dont les emblavements 2021 sont appelés à être réduits. Les choix des parcelles, et des espèces en SIE en seront parfois impactés. Aujourd'hui, compte tenu de la sécheresse de surface, cette demande a été renouvelée. Avec quel résultat ? L'expérience des années antérieures rappelle que des dérogations ont été obtenues pour des décalages de date ou des semis sans mélange ; mais on se rappelle également que « ces dérogations ont toujours été connues dans les tous derniers jours », rapporte la FDSEA de la Somme. En sera-t-il de même en 2020 ? L'affaire est à suivre...
Denis Bully, président de la FDSEA80 : « Ne pas rajouter de bêtise aux difficultés »
Nous avons demandé une totale dérogation pour que le cadre réglementaire corresponde à ce que les champs permettent : si on ne peut rien semer jusqu’au 7 septembre, il faudra que la réglementation s’adapte parce que ce serait inacceptable d’entendre qu’il faut « jeter de la semence pour cocher des cases » en étant certain qu’il ne poussera rien. Nous pouvons voir les choses de façon progressive : déjà, pas de contrainte pour modifier les emplacements et les espèces, puis en pas d’obligation de mélange si on ne peut plus espérer une efficacité de plante associée, puis plus d’obligation de date s’il ne pleut pas d’ici septembre, ou enfin plus de SIE du tout si ça dure encore. Dans tous les cas, il faut y voir clair le plus tôt possible, car ne pas donner de signe, ça fera soit d’un côté que des agriculteurs feront un choix irrationnel pour être dans les clous réglementaires, soit à l’inverse, qu’ils rejetteront toute forme de SIE par ras-le-bol. L’année du COVID et du confinement, ce n’est pas entendable que l’administration soit encore à ce niveau de blocage et que pour avoir « bonne conscience réglementaire », on se permette de rajouter de la bêtise aux difficultés. Et moi, président de la FDSEA, je ne vais pas appeler les agriculteurs à faire n'importe quoi dans les champs. Le bon sens est l'essence de notre métier.