Sous-location des terres : risques sanitaires
Les risques sanitaires sont-ils avérés en cas de sous-location de terres agricoles ? Le point avec Emilie Hennebois, adjointe au chef de service régional de l’alimentation.
Quels sont les risques sanitaires majeurs dans la production de pommes de terre ?
Deux risques majeurs existent. Le premier concerne la présence et le développement des nématodes, entraînant une baisse des rendements et une impossibilité d’exportation hors de l’Union européenne. Le second porte, lui, sur les bactéries, notamment Ralstonia solanacearum et Clavibacter, qui sont responsables de la pourriture brune et du flétrissement bactérien. Dans les Hauts-de-France, le gros souci, principalement dans les Flandres, est le développement des nématodes de la famille Globodera. La contamination se fait par les plants de pommes de terre, le matériel ou la terre.
Des prélèvements de terre et de plants sont pratiqués. Si la contamination est avérée, des mesures de police administrative sont déclenchées pour éradiquer ces nématodes. Une interdiction de produire des pommes de terre sur la parcelle contaminée peut être prononcée pour six ans, voire trois années supplémentaires. Pour les lots contaminés, la seule solution est leur destruction. Toutefois, comme ce ver ne représente aucun danger pour la consommation humaine, deux alternatives existent aujourd’hui : leur envoi vers une entreprise de transformation agréée (la seule dans les Hauts-de-France est McCain) ou un lavage des pommes de terre dans le champ selon un protocole agréé. Une autre nouveauté pour les parcelles contaminées est la possibilité de mettre des pommes de terre résistantes et dites «assainissantes», car elles tuent les vers.
Les risques sanitaires augmentent-ils avec la pratique de la sous-location des terres ?
Le risque pourrait venir des plants, certifiés et fermiers, mais tout cela est très encadré en France, ce qui permet de le maîtriser. Les contrôles que nous avons effectués dans des parcelles, où des plants certifiés belges étaient utilisés, n’ont présenté aucune infraction à la loi - les plants étant assortis d’un passeport phytosanitaire européen -, ni aucune présence de nématodes.
L’autre pratique à risque peut être le matériel avec la présence de terre sous les roues des tracteurs. Si la contamination est effectivement moindre, cela reste toutefois un axe de travail pour les agriculteurs que nous leur demandons. En revanche, les apports de terre (remorque déposée sur la parcelle) entre parcelles ou les retours de terre des entreprises de transformation sont des pratiques très risquées, car d’importantes quantités de terre, dont le statut sanitaire est inconnu, sont apportées.
La difficulté qui est la nôtre, c’est que comme la sous-location est interdite, nous n’avons pas connaissance des champs dans lesquels elle se pratique. Mais la principale difficulté est de contrôler les pommes de terre qui, en général, partent directement, et ne sont pas stockées en France.
L’autre risque que peut présenter la sous-location sur le plan sanitaire est l’absence de maîtrise par le fermier de la rotation agronomique. Les pommes de terre peuvent revenir, du coup, plus tôt dans les champs, soit tous les deux à trois ans, ce qui crée des conditions favorables au développement des nématodes. La contamination est latente, mais progressive, et il est difficile ensuite d’éradiquer les nématodes.
Il faut vraiment que les agriculteurs ne perdent pas de vue ce problème, ni la difficulté de lutter contre les nématodes. Nombre d’entre eux considèrent que le risque est mineur, car les rendements restent bons un à deux ans. Mais comme nous avons une forte activité d’export vers des pays tiers en Hauts-de-France, il est important de conserver un statut sanitaire bon. Il en va de la préservation de la filière pomme de terre.