Statut du fermage : une proposition de loi fraîchement accueillie
Deux députés de la majorité, Jean Terlier et Sacha Houlié ont déposé le 17 janvier dernier une proposition de loi visant à réformer le statut du fermage.
Dans la Somme la profession agricole s'inquiète des conséquences pour les exploitations agricoles.
Deux députés de la majorité, Jean Terlier et Sacha Houlié ont déposé le 17 janvier dernier une proposition de loi visant à réformer le statut du fermage.
Dans la Somme la profession agricole s'inquiète des conséquences pour les exploitations agricoles.
Bien qu’elle ne soit pas encore inscrite à l’agenda des travaux de l’Assemblée nationale, la proposition de loi (PPL) des députés Jean Terlier et Sacha Houlié fait déjà parler d’elle. Ce qu’elle contient ?
Sept mesures destinées à modifier certaines dispositions du Code rural et de la pêche maritime relatives au régime juridique des baux ruraux.
Renouvellement, préemption, ce que prévoit la loi
La première de ces mesures est la mise en place d’un état des lieux «obligatoire». Formalisé, comme le serait le bail, cet état des lieux obligatoire doit permettre, selon la loi, «de pouvoir bénéficier des indemnités pour amélioration dues au preneur ou pour dégradation dues au bailleur». La seconde mesure préconisée vise à limiter à trois fois le renouvellement d’un bail rural, sans accord du bailleur. Cela reviendrait à remettre en cause le principe actuel de renouvellement du bail à son expiration. Aujourd’hui, selon la réglementation en vigueur, le preneur dispose d’un droit automatique de renouvellement de son bail quand sa durée est de neuf ou dix-huit ans, «saufs motifs légitimes du bailleur ou droit de reprise», précise le Code rural. Selon la proposition de loi Terlier, un quatrième renouvellement resterait toutefois possible, à la seule condition que le preneur se trouve à moins de neuf ans de l’âge légal de la retraite.
Parmi les autres mesures contenues dans le texte de loi, on trouve la révision du fermage anormal lors de la sixième année du bail, des modifications des règles relatives aux cas de résiliation du bail par le propriétaire – défaut d’entretien, de paiement entre autres, sont des motifs de résiliation –, ou encore une proposition visant à modifier le calcul de la valeur d’une terre dans l’hypothèse où un preneur exercerait son droit de préemption sur un bien loué. Actuellement, le prix du bien vendu au preneur est estimé sur la base des terres louées, ce qui constitue une décote. Dans la loi Terlier, dans l’hypothèse où un preneur souhaite exercer son droit de préemption, la valeur du bien serait fixée sur la base du marché des terres libres. L’avant-dernière proposition concerne la parcelle dite de «subsistance». En l’état actuel de la législation, le preneur qui arrive à l’âge de la retraite dispose du droit à une parcelle de subsistance sur l’ensemble des parcelles qu’il exploite, qu’il en soit propriétaire ou preneur. La loi Terlier propose de conditionner le droit à la retraite et le droit à une parcelle de subsistance «prioritairement» sur les terres dont le futur retraité est propriétaire.
Légalisation de la sous-location
L’originalité de la proposition de loi portée par le député Terlier est sans doute une forme de légalisation de la sous-location. Interdite jusqu’à présent – il existe des exceptions pour un usage de vacances, de loisir ainsi que pour la sous-location de bâtiments à usage d’habitation –, la sous-location pourrait être autorisée en tenant compte de certaines règles. La proposition de loi indique qu’«après autorisation du bailleur», et «pour certaines cultures dont la liste est fixée par arrêté préfectoral», la sous-location pourrait être autorisée à condition qu’elle n’excède pas un an. Une part du produit de la sous-location pourrait également être versée au propriétaire bailleur.
«Mort de l’installation»
Dans le département de la Somme, le moins que l’on puisse dire est que l’accueil de la PPL Terlier par la profession agricole est glacial. La session nationale Renouvellement des générations en agriculture (RGA) qui s’est tenue à Saint-Valéry-sur-Somme les 24, 25 et 26 janvier avait déjà, d’une certaine manière, donné le ton. Président des Jeunes agriculteurs de la Somme, Benjamin Bizet a qualifié «d’inacceptables» les mesures contenues dans la PPL : «Avec un taux de 74 % de fermage dans le département, vous comprendrez l’importance que nous portons au statut du fermage (…) Avec de telles mesures, comment pouvons-nous rester maitre de nos exploitations ?», a interrogé Benjamin Bizet. Et d’ajouter que si un projet de loi comme celui défendu par Jean Terlier venait à être voté, puis à s’appliquer, «ce serait la mort de l’installation en Hauts-de-France».